Irina Brook a placé les thématiques écologiques au cœur de sa saison 2015/2016 au Théâtre National de Nice dont elle est la directrice. Elle a demandé à l’écrivain italien Stefano Massini de lui écrire une pièce autour du drame écologique de l’industrie chimique coupable du suicide de milliers d’agriculteurs dans le monde. Avec en tête de distribution Romane Bohringer et Hyppolite Giradot.
On connaît l’engagement de Stefano Massini pour les thématiques politiques. On lui doit Femme non rééducable sur la journaliste russe Anna Politkovskaïa et Chapitres de la chute sur les Lehman Brothers. Ici il dénonce l’industrie chimique. Irina Brook a été touchée par le sort de ces milliers d’agriculteurs qui se suicident en avalant les pesticides vendus par les multinationales (dont Mosento) parce qu’ils sont endettés et appauvris. Elle mentionne dans le spectacle le chiffre de 250 000 suicides. Toutes les sources confirment effectivement qu’il y 1000 suicides par mois depuis 20 ans en Inde. Cette pièce est traversée aussi par la parole de Vandana Shiva, docteur en physique quantique, engagée dans le combat contre l’industrie chimique et chef de file des écologistes et des altermondialistes pour la promotion de l’agriculture paysanne traditionnelle et biologique. Elle s’est d’ailleurs venue au TNN pendant la Cop 21 en décembre dernier.
Cette pièce se compose de multiples petites scènes, de fragments avec des accélérations et des retours en arrière. C’est comme un puzzle que le spectateur doit reconstituer. Elle débute par des images vidéo d’agriculteurs cultivant leur terre. L’action oppose deux avocats. Romane Bohringer incarne Odela Zagira qui défend un jeune agriculteur Hagos Nassor (Pitcho Womba Konga). Hippolyte Girardot incarne Wilson Helmett, avocat de Earth Co. Deux avocats, deux styles de combat. Romane Bohringer met toute sa force et sa fougue dans ce personnage d’avocate engagée qui met en balance la valeur du droit face à la valeur de l’argent représenté par l’agent commercial (Jeremis Nussbaum). On découvre dans cette pièce une très belle comédienne belge d’origine bissau-guinéenne, Babetida Sadjo, qui incarne Fatissa, la femme de l’agriculteur.
Les bureaux des avocats se font face, comme deux boxers dans chaque coin de leur ring avec au centre la cuisine du couple d’agriculteurs, victimes de cette tragédie de la mondialisation. Derrière un tulle on aperçoit le champ de cannes à sucre en piteux état qui s’est transformé en décharge à ciel ouvert pollué par des carcasses d’appareils ménagers.
Le texte de Stefano Massini est elliptique et poétique. On zappe, peut-être un peu trop rapidement par moment, sans nous laisser le temps de recoller les morceaux. Mais on est pris par l’engagement de ce projet théâtral d’Irina Brook, sincère et citoyen, qui défend l’idée d’un théâtre engagé porté par la parole d’un des plus grands dramaturges vivants.
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
Terre noire de Stefano Massini
traduit de l’italien par Pietro Pizzuti
mise en scène Irina Brook
avec Romane Bohringer, Hyppolyte Girardot, Pitcho Womba Konga, Jeremias Nussbaum, Babetida Sadjo musiques Jean-Louis Ruf production Théâtre National de Nice – CDN Nice Côte d’Azur L’Arche Éditeur est l’agent théâtral du texte représenté audiodescription le mercredi 3 février à 20h30.Théâtre National de Nice
Les 14 et 15 janvier 2017
La tournée 2017 : La Rochelle, La Coursive [17/21 jan], Namur [25/27 jan], Lyon, Les Célestins [31 jan/4 fév], Fréjus, Théâtre le Forum [7 fév], Plan les Ouates [10 fév], Bulle, Théâtre CO2 [17 fév], Bruxelles, Wolubilis [22 fév), Neuilly sur Seine, Th. des Sablons [25 fév], Lattes, Théâtre Jacques Cœur [3 mars], Marseille, La Criée [9/11 mars], Yzeure, CC Yzeurespace [14 mars], Miramas, Théâtre la Colonne [17 mars], Pistoia, Il Funaro [23 & 24 mars]
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