Au Festival d’Avignon, François Chaignaud et Geoffroy Jourdain font s’accorder les voix et les corps dans t u m u l u s, un spectacle polyphonique d’où émanent des accents aussi bien profanes que sacrés. Beauté et ennui se confondent sur leur monticule où n’advient pas vraiment la transcendance espérée.
Un paysage imposant baigne dans l’obscurité, puis s’éclaire progressivement sous des couleurs chatoyantes et contrastées. C’est un mausolée géant, herbeux, dont les formes rondes et généreuses renferment une sépulture. Ce tumulus, qui donne son titre au spectacle et renvoie au tombeau, est aussi un terme proche du verbe « tumer » qui, au Moyen-Âge, signifie danser. L’endroit, plutôt aride, apparemment abandonné, accueille justement une communauté nomade composée de treize artistes polyvalents. Camouflés sous de longs manteaux en nylon polyamide, puis assez mal fagotés dans des costumes hybrides dont l’excentricité frise le ridicule, ils prennent les traits de voyageurs passagers. En lente et silencieuse procession, tous débarquent du haut des gradins, s’approchent et appréhendent l’espace vierge de toute présence humaine. Ensemble ou éclatés, toujours reliés les uns aux autres, ils vont gravir et dévaler la colline verte, parfois se poser, se reposer, ou davantage s’exalter. Sur les hauteurs, les visages et les corps tutoient et incantent les cieux.
Le vaste répertoire de chants polyphoniques qu’ils interprètent provient de toute l’Europe et s’étend de la Renaissance à l’époque contemporaine. On entend notamment résonner les motets de Josquin Desprez, figure de l’ars perfecta du XVIe siècle, mais aussi le Musik für das Ende de Claude Vivier. Les airs sont chantés a capella par les membres de l’ensemble musical Les Cris de Paris dont les lignes vocales, à la fois autonomes et interdépendantes, s’entrelacent harmonieusement.
Les corps chantant et dansant répondent rigoureusement au projet du chorégraphe et performeur François Chaignaud et du musicien Geoffroy Jourdain, tous les deux très amateurs de la porosité des genres artistiques, qui consiste à faire fusionner les pratiques disciplinaires ; un geste audacieux, exigeant, mais inégalement probant. Car si t u m u l u s ne manque pas de souffle et de voix, la danse, elle, peine à pleinement se déployer. En cause, une insuffisance technique et dramaturgique qui se fait vraiment sentir.
La forme épurée et étirée, au départ très figée, mais qui gagne progressivement en ampleur et en fluidité, veut célébrer l’union intime et sacrée de l’homme avec la nature. Ritualisante, archaïsante, la proposition chorégraphique de François Chaignaud manque de substance et donc de consistance. Elle ne dépasse l’exercice du pastiche. Les poses sculpturales des danseurs en cortège, les petits bonds, les pieds collés qui martèlent le sol, les lignes et les rondes calmes, puis affolées, sont autant d’éléments d’inspirations nijinskiennes évoquant Le Sacre du printemps qui fit scandale en 1913 et qui vient d’être recréé par la chorégraphe et chercheuse Dominique Brun. Mais à la composition sauvage et abrasive d’Igor Stravinsky, se substitue un univers primitif plutôt très calme et étale, bien trop poseur, qui se laisse agréablement regarder, mais sans toucher ni bousculer.
Christophe Candoni – www.sceneweb.fr
t u m u l u s
Conception François Chaignaud, Geoffroy Jourdain
Chorégraphie François Chaignaud assisté de Anna Chirescu
Avec Simon Bailly, Mario Barrantes, Florence Gengoul, Myriam Jarmache, Evann Loget-Raymond, Marie Picaut, Alan Picol, Antoine Roux-Briffaud, Vivien Simon, Maryfé Singy, Ryan Veillet, Aure Wachter, Daniel Wendler
Direction musicale Geoffroy Jourdain assisté de Louis Gal
Dramaturgie Baudouin Woehl
Scénographie Mathieu Lorry Dupuy
Lumière Philippe Gladieux, Anthony Merlaud
Costumes Romain BrauProduction Mandorle productions en association avec Les Cris de Paris
Coproduction Bonlieu scène nationale (Annecy), La Villette, Paris Initiatives d’Artistes , Wiener Festwochen, Kunstenfestivaldesarts (Bruxelles), Théâtre Vidy (Lausanne), Points communs nouvelle Scène nationale de Cergy-Pontoise Val d’Oise, Théâtre de Saint-Quentin-en-Yvelines Scène nationale, Tandem Scène nationale Arras-Douai, Berliner Festspiele (Berlin), Théâtre Auditorium Poitiers, Festival d’Avignon, Malraux Scène nationale Chambéry, Opéra de Dijon, Maison de la Danse (Lyon), Scène nationale d’Orléans, Maison de la culture de Bourges Scène nationale, Le Manège scène nationale (Reims), La Cité musicale (Metz), la Ménagerie de Verre, le Théâtre Molière scène nationale archipel de Thau (Sète), le Théâtre de Cornouaille, le Ballet national de Marseille CCN, la Scène Nationale du Sud-Aquitain, le Festival d’Automne à Paris
Avec le soutien de Jeune Théâtre National, MC93 – maison de la culture de Seine-Saint-Denis, L’échangeur CDCN Hauts-de-France, la Fondation Royaumont (Asnières-sur-Oise), CN D Centre national de la Danse, Dance Reflections by Van Cleef & Arpels, et pour la 76e édition du Festival d’Avignon : Spedidam
Résidences le Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris et le Théâtre de l’Aquarium
Construction décors Ateliers de la Maison de la culture de Bourges Scène nationaleFusalp accompagne la réalisation des costumes.
Ce projet a bénéficié d’une aide exceptionnelle à la production de la DGCA.
Ce spectacle est soutenu par “PEPS” Plateforme Européenne de Production Scénique Annecy-Chambéry-Genève-Lausanne dans le cadre du programme Européen de coopération transfrontalière Interreg France-Suisse 2014-2020Durée : 1h15
Festival d’Avignon 2022
La FabricA
du 20 au 26 juillet à 18hScène nationale du Sud-Aquitain, Bayonne
le 11 septembrePoints communs, Cergy-Pontoise
le 16 novembreThéâtre de Saint-Quentin-en-Yvelines
le 18 novembreLa Villette, Paris
du 24 au 27 novembreMaison de la Culture de Bourges
le 30 novembreMalraux Scène nationale Chambéry Savoie
les 3 et 4 décembreConcertgebouw Brugge (Belgique)
le 17 décembreLa Comédie de Clermont-Ferrand
les 23 et 24 mars 2023Théâtre Molière Scène nationale archipel de Thau, Sète
le 28 marsThéâtre Auditorium de Poitiers
le 31 mars
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