La crise de Solness est aussi celle d’Ibsen se penchant sur son œuvre passée. C’est aussi celle d’une société confrontée à son impasse, aux erreurs commises au nom d’une idéologie du progrès en laquelle elle ne croit plus. Une fois perdu le sens de nos actes, que faire de notre « machine désirante » ? Dans quel dépassement, quelle nouvelle perte peut-être, s’engager ? Et que transmettre à ceux qui suivent ?
Chose fascinante dans cette œuvre testamentaire, la crise transparaît dans la forme même : la fable politique de John Gabriel Borkmann, le réalisme psychologique de Maison de Poupée et d’Edda Gabler se craquèlent sous la poussée du fantastique (les Trolls de Peer Gynt), du mythologique (des Tentations du Christ au mythe de Faust…). Cela donne une sorte de thriller symboliste, une construction faite, non pas de raison, mais d’imprévisibles associations d’images.
Les phrases elles-mêmes se morcellent, les tirets, lapsus et ravalement de salive abondent. Les strates les plus enfantines de notre inconscient, envahissent l’univers aseptisé du cabinet d’architecte. Croissent des secrets d’enfants morts, de piles de vieux livres et de poupées brûlées. L’œuvre est irréductible à un propos : elle est, fond et forme, le don d’un monde intérieur.
Pour restituer cette énergie de crise et de combat, loin des lieux communs d’un Ibsen sombre et lent, il faut une grande vitalité, un humour noir, un goût pour l’invention formelle. D’où ces acteurs, dont une cadette, la Ysé remarquée de notre Partage de Midi.
Une diction ou un geste décalés sous l’impulsion de la musique, et on s’éloigne de la sécheresse du phrasé réaliste. On entrevoit alors, sous un mot tout simple, ces mondes passés, enfouis, qui viennent hanter Solness et Ibsen à l’approche de la mort.
Solness, constructeur de Henrik Ibsen
nouvelle traduction Solveig Schwartz
mise en scène Jean-Christophe Blondel | assisté de Claire Chastel
dramaturgie Christèle Barbier
avec Valérie Blanchon, Jean-Luc Cappozzo, Claire Chastel (JTN), Benjamin Duboc, Philippe Hottier, Eléonore Joncquez, Michel Melki
musique Jean-Luc Cappozzo (trompette) et Benjamin Duboc (contrebasse) | scénographie Marguerite Rousseau | costumes Tormod Lindgren | lumières Tatiana Elkine (JTN) |coproduction la Plateforme des producteurs associés de Normandie : le Préau CDR de Basse-Normandie Vire, Comédie de Caen CDN de Normandie, Le Trident SN de Cherbourg, Théâtre des Deux Rives, CDR de Haute-Normandie, Le Volcan SN du Havre ; Le Quai des Arts (Argentan) dans le cadre des Relais Culturels Régionaux, Le Rayon Vert scène conventionnée de Saint Valéry en Caux | avec la participation artistique du Jeune Théâtre National | avec le soutien de l’ODIA Normandie, l’ADAMI, la SPEIDAM, Région Haute-Normandie, Conseil Général Seine-Maritime, ville de Rouen, Festival Les Boréales, un festival en Nord, plateforme de création nordique | accueils en résidence Lilas en scène, Le Préau CDR, Théâtre des Amandiers CDN de Nanterre
Argentan | Le Quai des Arts | 22 novembre
Les Lilas | Théâtre du Garde-Chasse | 23 novembre
Vire | Le Préau CDR de Basse-Normandie Vire | 27 et 28 novembre
Rouen | Théâtre des Deux-Rives CDR | 29 et 30 novembre
Granville | L’Archipel scène conventionnée | 4 décembre
Norvège | Oslo | Théâtre de la Cruauté | 7 et 8 décembre
19 au 22 Décembre 2012 Théâtre de l’Opprimé – Paris
Le Havre | Le Volcan scène nationale | 2 et 3 avril
Saint-Valéry en Caux | Le Rayon Vert scène conventionnée | 5 avril
Théâtre de Gisors | 7 avril
Cherbourg | Le Trident scène nationale | 9 et 10 avril
Saint-Lô | Théâtre Municipal | 11 avril
Lisieux | Théâtre de Lisieux-Pays d’Auge | 12 avril
Caen | Comédie de Caen CDN de Normandie | 17 et 18 avril
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