Sébastien Desjours dans Point Cardinal de Léonor de Récondo
Avons-nous la liberté d’être ? Sommes-nous conformes ou conformés ?
Comment nous dégageons-nous du regard des autres, regard constitutif
et pourtant aliénant ? La France a considéré la transidentité comme une maladie mentale jusqu’en février 2010. Ce n’est que très récemment, en Mai 2019 que l’Organisme mondial
de la santé l’a retirée de la catégorie des troubles mentaux et du comportement » pour la déplacer dans celle de « santé sexuelle » sous le nom « d’incongruence de genre ». L’avancée est à saluer mais la catégorisation et la terminologie laissent entrevoir le chemin qu’il reste à parcourir.
L’identité de genre n’a jamais été autant interrogée. Les singularités n’ont jamais été aussi visibles. Pourtant elles n’ont jamais été autant attaquées dans le discours ou dans la rue : 83% des personnes transgenres ont été victimes de violences physiques. « On m’avait prévenue, je m’en doutais » dira Julia, femme trans, agressée le 31 mars 2019 en plein jour place de la République. Point cardinal donne à entendre l’histoire de Laurent. Face à lui-même, à sa famille, son épouse, sa fille, son fils, face à son entourage, à ses collègues, à la société, face à l’incompréhension, à la colère. Le combat de Laurent pour être elle, pour être, est le combat de la justesse, de l’adéquation. Un chemin nécessaire, vital. Une quête menée ici pour le genre, mais une quête universelle, où chacun se retrouve.
Être soi.
Un face à face avec le spectateur, partager, donner à entendre, à imaginer, et voir.
Seul, ensemble, avec eux.
La présence d’un acteur seul en scène renforce la sensation de danger, de fragilité.
Seul, face aux autres.
Une présence totale, sans la possibilité de s’échapper, il faut affronter les tempêtes, les surprises et les accidents avec détermination. Une détermination semblable à celle du parcours mouvementé de Laurent. Deux temporalités s’entremêlent dans le texte : le narratif – le temps de celui qui a déjà traversé l’histoire – et le présent – les moments qui ressurgissent, les flashs qui seront traversés comme des « premières fois ». Ce qui implique deux types d’adresse, l’une frontale, directe, informative, l’autre intime, sensible. Le va-et-vient sera permanent, l’intime peu à peu s’imposera.
De Il à Elle, et enfin Je.
C’est un spectacle sur un homme qui est une femme, par un homme qui donne à voir sa part féminine. La féminité sera évoquée par le corps, sans naturalisme, excepté au début où l’image fugace d’une féminité « exacerbée » sera présente. Une corporalité dessinée, cadrée, laissera place à un corps libéré de son carcan. Ne pas montrer ce qui est dit afin que se déploie l’imaginaire. Le spectateur s’engage au côté de l’acteur.
Je serai le corps qui porte cette parole. Je jouerai de mon masculin et de mon féminin.
Je laisserai émerger ma part de féminin que j’ai tant de fois étouffée. J’irai à l’essence, à l’intime, au plus proche de la langue de Léonor de Récondo, de la voix de Laurent, de Lauren, des battements de leurs cœurs.
Sébastien Desjours
Point Cardinal
Texte Léonor de Récondo
Adaptation scénique, conception et jeu Sébastien Desjours
Collaboration artistique Claire Chastel et Bénédicte Rochas
Scénographie et costumes Anne Lezervant
Collaboration à la scénographie Quentin Paulhiac
Lumières & création musicale Olivier Maignan
Création son Gildas Mercier
Production et diffusion Clémence Martens – Histoire de…
Attachée de presse Francesca Magni
Production Théâtre de Belleville et Histoire de…
Remerciements Nathalie et Claude le Damany, Béatrice et Gérard Schallier, Pauline Ribat, Thomas Arbez, Frédéric Bonnet, Laurent Dattas, Fréderic Labonde,Guillaume Léglise, Thomas Icher,
Mélanie Féhart, Luc Antoine Diquéro, Laurence Demaison et Martin Nikoloff
Le roman est édité chez Sabine Wespieser EditeurDurée 1h05
Théâtre de Belleville
Mercredi 1er > jeudi 30 septembre 2021
Mer. 19h15, Jeu. 19h15, Ven. 19h15,
Sam. 19h15, Dim. 15h
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