« Les classiques me font penser à cette petite boîte rouge vitrée, fixée au mur, où on peut lire : « Briser en cas d’urgence ». » Peter Sellars. Si l’on vous dit : « Pour qui sont ces serpents qui sifflent sur vos têtes », vous vous écriez : « Mais c’est bien sûr ! ».
Parce que vous avez fréquenté l’école et que vous connaissez vos classiques. Mais est‐ce si sûr ?… Depuis quand n’avez‐vous pas « relu » Alexandre le Grand ou La Thébaïde ? Vous avez peut‐être besoin de rafraîchir un peu votre culture. Voici donc un petit vade‐mecum racinien qui vous permettra de combler vos lacunes et de briller dans les dîners en ville. Ca aurait pu s’intituler Racine pour les nuls mais ce titre eût été par trop vulgaire et démagogique. N’insultons pas la mémoire de nos grands hommes !
Racine par la racine pourrait se définir comme une modeste entreprise de réhabilitation iconoclaste du corpus racinien. Réhabilitation parce que nous vivons une époque où le laisser‐ aller linguistique fait office de politique et où il est de bon ton de ne pas « se prendre la tête ». Racine, lui, prend non seulement la tête mais le corps tout entier. Il emporte dans un tourbillon sublime et féroce de passion. La beauté de ses vers nous est plus que jamais précieuse dans une société bien prosaïque. Iconoclaste, car les grands hommes méritent eux aussi d’être soumis à un salutaire ravalement, faute de quoi on finirait par se cantonner à les arroser scolairement comme de flétris chrysanthèmes ou pissenlits. Et puisqu’on parle de pissenlits, revenons à nos racines : Racine par la racine est un hommage au grand tragédien, hommage qui se veut cocasse mais dont le but ultime est de susciter l’envie de (re)lire ou (re)voir une œuvre qui, à l’instar de La princesse de Clèves, a encore beaucoup à nous apprendre de l’homme et de la beauté du monde.
Mais tout le pari du spectacle est de ne pas sacrifier à la démagogie et de donner à entendre le vers racinien au détour d’une joyeuse comédie. Parce qu’enfin, il ne sera pas dit que ce grand auteur meure dans un grand bâillement d’ennui de la modernité.
Notre mise en scène est à l’image de cette allégresse : les couleurs des costumes, les clins d’œil cinématographiques et musicaux donnent au spectacle une dimension fantaisiste et iconoclaste. Promenant tour à tour le spectateur entre l’Antiquité grecque, l’âge classique et le monde actuel, les tableaux successifs portent sur l’œuvre de Racine un éclairage nouveau et surprenant. Si comme l’écrivait Barthes, le théâtre de Racine est « aux trois quarts mort », pensons au dernier quart qu’il nous reste à sauver, quitte à pratiquer une allègre irrévérence ! Note d’intention de Serge Bourhis
Racine par la Racine
Avec : Fabienne Dubois, Alberto Lombardo, Pierre-Etienne Royer, Caroline Hartpence et en alternance Elise Roth / Lisa Olivier.
Mise en scène : Serge Bourhis
Durée : 1h10
Cie La Caravane Rouge
Avignon Off 2013
Du 8 au 31 juillet 2013
14h25
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