On ne rit pas dans la nouvelle revu(e) de Jean-Michel Ribes. Tout simplement parce qu’elle n’est pas faite pour cela. C’est une tragédie cynique sur la barbarie humaine à travers trois personnalités attachantes du mouvement Dada.
La nouvelle mise en scène de Jean-Michel Ribes, Par-delà les marronniers est sous-titrée Revu(e), comme « revu » car la pièce été créée un première fois dans les années 70 avec entre autres Gérard Darmon et comme une « revue » car il y a intégré quelques chansons pour donner un peu de légèreté. Mais c’est avant tout une pièce sombre et désenchantée. Il ne s’agit en aucune façon d’un spectacle drôle ou d’une revue torride. D’où la sortie prématurée de quelques spectateurs en cours de représentation qui s’attendaient peut-être à plus de gaudriole. Il est vrai cependant que les scènes avec les trois « girls » ne sont pas toutes concluantes. Si tenté que l’on puisse faire abstraction de ces apartés musicaux, l’histoire de ces trois dandys dadaïstes dans les années 20 en France est passionnante.
Jacques Vaché (Maxime d’Aboville), Arthur Cravan (Michel Fau) et Jacques Rigaut (Hervé Lassïnce) sont trois poètes phares du mouvement Dada, beaucoup moins connus que Françis Picabia , André Breton, Tristan Tzara ou Marcel Duchamp. Mais ils n’avaient pas été oublié de la grande rétrospective Dada du Centre Pompidou et du MOMA en 2006. On pouvait y lire leurs écrits ou admirer leurs dessins (on a retrouvé dans le catalogue des collages de Jacques Vaché). Jean-Michel Ribes a souhaité remettre en scène ce texte après les attentats de Charlie Hebdo de janvier 2015.
Les trois dadaïstes de la pièce, persifleurs de leur époque comme les dessinateurs assassinés sous les balles d’une kalachnikov, ont eux aussi connu des destins tragiques. Jacques Vaché est mort d’une surdose d’héroïne, Jacques Rigaut s’est tué d’une balle dans le cœur et le boxeur Arthur Cravan a mystérieusement disparu après un combat perdu au Mexique.
La pièce émouvante. Elle est le témoin d’une jeunesse sacrifiée par la première guerre mondiale. Ces artistes anarchistes et anticonformistes dénonçaient avec leur poèmes la barbarie et la tyrannie de l’art établi. La scénographie de Sophie Perez et Xavier Boussiron, constituée de petits modules sur roulette renvoie bien l’image de cette période artistique innovante. Les trois comédiens possèdent la noirceur nécessaire pour endosser le rôle de ces personnages « poil à gratter ». On a souvent été touché par leur jeu sombre et pince sans rire. On a regardé le spectacle comme une œuvre d’art témoin d’une époque révolue.
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
Par-delà les marronniers, la nouvelle revue de Jean-Michel Ribes
avec : Maxime d’Aboville, Michel Fau, Hervé Lassïnce, Sophie Lenoir, Alexie Ribes, Stéphane Roger, Aurore Ugolin
musique : Reinhardt Wagner
scénographie : Sophie Perez
avec la complicité de : Xavier Boussiron
costumes : Juliette Chanaud
lumières : Laurent Béal
chorégraphie : Fabrice Ramalingom
assistanat à la mise en scène : Virginie Ferrere
assistée de : Capucine Crône-Crépel, Guillaume Alberny
accessoires costumes : Mélina Vaysset
sculptures et peintures : Dan Mestanza
construction décor : ateliers de La Comédie de Saint-Étienne
réalisation des costumes : atelier de costumes du Théâtre de Liège
production Théâtre du Rond-Point, coproduction Opéra Orchestre national / Montpellier – Languedoc-Roussillon, Théâtre de Liège, La Comédie de Saint-Étienne – Centre dramatique national, l’Opéra Orchestre national / Montpellier – Languedoc-Roussillon est financé par Montpellier Méditerranée Métropole, la Région Languedoc-Roussillon et le ministère de la Culture et de la Communication, texte à paraître le 24 février 2016 aux éditions Actes Sud-Papiers, création au Rond-Point le 15 mars 2016Théâtre du Rond-Point
15 mars – 24 avril 2016
DU MARDI AU SAMEDI : 20H30 – DIMANCHE, 15H – RELÂCHE LES LUNDIS, LES 20 ET 27 MARS
Salle : Renaud-Barrault
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