Créée au Théâtre de la Cité, CDN de Toulouse, la dernière pièce jeune public de l’autrice Anna Nozière ne convainc pas à cause de son texte, malgré une mise en scène foisonnante d’idées.
L’argument d’OISEAU pourrait évoquer un film de Tim Burton. Tous les mercredis, sous l’impulsion d’une certaine Françou, trois enfants qui ont fait l’expérience du deuil organisent des rendez-vous dans un cimetière pour parler aux disparus. Ensemble, ils partent de l’autre côté, au « pays des morts » … Puis, c’est la panique à bord. Au grand dam de la directrice de leur école, du gardien de leur établissement et de leur maîtresse, le mouvement fait tache d’huile : ils sont trois, puis six, puis dix, et bientôt toute la classe les rejoint pour discuter de ce sujet très compliqué et un peu tabou, mais jamais démoralisant.
À l’inverse d’un film de Tim Burton, l’esthétique et l’atmosphère ne sont ni gothiques ni inquiétantes. Parce que d’emblée on sourit, et l’on blague. Car rapidement, on se tient par la main, et l’on s’épaule. Voilà l’occasion de mettre des paroles sur une épreuve difficile, et de repenser la place de la mort dans notre société (n’ayons pas peur de grands mots).
Écrit par Anna Nozière (Les Fidèles, Histoire d’Annie Rozier, La Petite, Joséphine (Les Enfants punis) …), ce texte estampillé théâtre jeune public (à partir de neuf ans) ou ses prémisses ont reçu un accueil très favorable : lauréat de l’Aide à la création ARTCENA, de la Bourse de création du CNL, Prix PlatO pour les écritures de jeunesse 2021… Bientôt, peut-être, la palme d’or de la meilleure pièce pour enfants et l’oscar du plus grand scénario pour un texte français.
Avec de telles louanges, sa création par l’autrice était donc attendue au tournant. Et contre toute attente, ce texte (que nous découvrions sur scène) nous aura paru faible quand sa mise en scène était réussie. Faible parce qu’un peu niait sur le fond, malgré de bonnes formules et un humour mordant. Cette utopie, selon laquelle les enfants pourraient se retrouver autour de la mort en trouvant un langage commun, n’est pas très convaincante. Elle ressemble davantage à un rêve d’adulte qu’à une possibilité souhaitable. Parce que le deuil est rarement soluble dans une expérience collective. Car les « petits » ont besoin de l’aide des « grands » pour traverser cette épreuve, dénicher des mots qui apaisent, accepter cet aspect insupportable de notre condition. Ici, l’opposition adulte-enfant, en général très opérante, tombe à plat. Elle paraît même un peu démago.
Sur scène, en revanche, les solutions trouvées par l’artiste sont originales et intelligentes. Les deux comédiennes précisent leurs rôles avant de les incarner, créant une distance avec leurs personnages, évitant l’écueil de l’imitation souvent très gênante des enfants ; elles jouent juste et bien. Les accessoires sont joliment utilisés ; on se souviendra de ces petites voitures tirées sur le plateau, de cet écran que l’on manipule pour faire place à la vidéo. L’adresse au public, comme s’il s’agissait d’une classe, est simple et bien pensée ; jamais les spectateurs de 13-14 ans ne se déconcentraient. Ces derniers semblaient conquis d’ailleurs, contrairement à nous qui aurions aimé participer à la fête.
Igor Hansen-Løve – sceneweb.fr
OISEAU
Texte et mise en scène Anne Nozière
Avec Kate France et Sofia Hisborn
Et les voix de Loubna Dupuis Putelat et Samuel Simon
À l’image Walid Riad et les enfants de l’association socioculturelle Courteline
Assistanat à la mise en scène Steve Brohon
Scénographie Alban Ho Van
Assistanat à la scénographie, objets et vêtements : Emma Depoid
Son Nicolas de Gélis
Lumière Mathilde Domarle
Régie générale et plateau Louisa Mercier
Collaboration artistique Patrick Haggiag
Conseil en développement et stratégie Anne de Amézaga
Administration Audrey Gendre
Logistique de tournée Floriane Brault
Régie lumière en tournée Benjo Trottier
Régie son en tournée Aoife O’Connell
Régie générale et plateau en tournée Julien Bouvier
Stagiaires Léa Moralès et Ambre Lentin
Durée : 1 heure
Théâtre Paris Villette
du 18 octobre au 3 novembre 2024
Laisser un commentaire
Rejoindre la discussion?N’hésitez pas à contribuer !