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« L’Imposture », l’impureté assumée

À la une, Avignon, Best Off, Théâtre
L'Imposture de Lucie Hanoy
L'Imposture de Lucie Hanoy

Photo Camille M / Walls and Sounds

Dans L’Imposture, Lucie Hanoy déplie un touchant, et parfois vraiment cocasse, récit fragmentaire, entre one-woman-show et autofiction marionnettique. 

Le syndrome de l’imposteur, ou sentiment d’imposture, vous connaissez ? Ce sentiment subjectif et parfaitement intériorisé, selon lequel vous ne vous sentez pas légitime, considérant du même coup que le monde entier partage cet avis, nombre d’entre nous ont pu l’éprouver ou se le coltinent encore régulièrement. C’est de ce doute intrinsèque, qui fut désigné comme « syndrome d’imposture » en 1978 par deux psychologues américaines, Pauline Rose Clance et Suzanne Imes, et qui, depuis, fait florès, entre autres, chez les coachs et autres adeptes du développement personnel, que Lucie Hanoy se saisit. Soit en choisissant, au risque de fragilités, de le mettre à nu, d’en exhiber les racines personnelles, en exposant les mécanismes qui l’ont, pour elle, alimenté. La marionnettiste, diplômée en 2014 de l’École nationale supérieure des arts de la marionnette (ESNAM) de Charleville-Mézières, et par ailleurs créatrice du karaoké marionnettique LuluKnet, a ainsi créé, en 2019, L’Imposture. Ce solo co-écrit et co-mis en scène avec Aurélie Hubeau et Pierre Tual, l’équipe le reprend à l’occasion du Festival Off d’Avignon. Le résultat est une création étonnante, non pas par son esbroufe ou sa maîtrise intégrale, mais par sa sincérité, sa façon de déployer un récit autofictionnel dans une forme lorgnant vers les codes du one-woman-show et du stand-up, en se moquant de toute bienséance.

Comme Lucie Hanoy l’énonce dès l’introduction, le sentiment d’imposture, et ses ravages, se déclenche pour elle « au moindre succès », « au moindre signe de reconnaissance ». Avec pour accessoires un micro sur pied situé à l’avant-scène, à cour, deux portants avec des vêtements – portants qu’elle déplacera pour redessiner l’espace, vêtements qu’elle enfilera parfois –, la comédienne et marionnettiste se livre à un récit autobiographique fragmentaire. Après ce qui ressemble, comme elle-même le souligne, à plusieurs débuts – mais c’est bien son droit le plus strict, puisqu’il s’agit de son spectacle –, après avoir commencé à narrer son enfance sur un ton mièvre et à grand renfort de musique douce, après avoir fait voler en éclats ce récit convenable et positif au quinzième degré, elle se qualifie : c’est en tant que femme grosse, lesbienne et marionnettiste qu’elle déplie son propos. Et c’est depuis ces trois positions, qu’elle qualifie avec humour de « points dramaturgiques » – jouant ainsi avec les codes de l’écriture qui architecture tout bon spectacle –, qu’elle s’adresse à nous.

En exposant différents souvenirs et anecdotes – souvenirs d’enfance, petits événements familiaux ou situations de travail –, l’artiste détaille les moqueries, les quolibets, les violences verbales et autres micro-agressions quotidiennes. Dans une adresse directe et permanente au public, l’ensemble de ce qui est raconté dessine des mécanismes de relégation et la façon dont une société homophobe et grossophobe assigne et exclut. Si la question de son lesbianisme est plutôt abordée par la bande, par des allusions et autres rappels à l’ordre à la féminité dite « classique » – renvoyant, qui sait, en cela, à la façon dont l’homophobie lui fut adressée plus en sous-main –, la grossophobie est au cœur du spectacle. Comme elle le dit, c’est « la discrimination [qu’elle] préfère », car « ça rassemble ». Dont acte, et plusieurs séquences travaillent ces souvenirs, en installant une drôle de position : si les saynètes citent des souvenirs de violences grossophobes, il est difficile de ne pas voir dans certains des rires suscités un prolongement de cette violence. Pourtant, par son écriture directe, Lucie Hanoy en vient pour partie à retourner le stigmate.

Mais toute L’Imposture est ainsi sur le fil : sa force réside sans conteste dans sa manière de convoquer des références impures, des formes moins légitimes – univers du stand-up, chansons de variété française –, non pas au second degré – dans une position de surplomb –, mais par un désir assumé de les travailler. Fragile par moments dans son écriture et sa fameuse « dramaturgie », casse-gueule à d’autres dans sa manière d’alimenter un rire aux dépens d’elle-même, plus ou moins anecdotique dans son recours aux marionnettes, le spectacle emporte néanmoins. Loin de tout misérabilisme, Lucie Hanoy porte avec une présence sincère, qui ne triche pas, une voix, la sienne, et la transmet sans fard, en jouant avec les attendus comme en les déjouant. Et l’une des dernières séquences, terriblement drôle par son récit scrupuleux d’une intervention en milieu scolaire, rappelle à quel point le travail des artistes lui-même – marionnettistes en tête – est souvent dévalué, délégitimé et rabattu sur des stéréotypes et clichés.

caroline châtelet – www.sceneweb.fr

L’Imposture
Conception et interprétation Lucie Hanoy
Texte et mise en scène Aurélie Hubeau, Lucie Hanoy, Pierre Tual
Scénographie Michel Ozeray
Création marionnettes Anaïs Chapuis
Création lumière Olivier Bourguignon, Guillaume Hunout
Création sonore Thomas Demay
Collaboration artistique Alice Chéné
Costumes Marie La Rocca

Production Big Up Compagnie

Durée : 1h10

Théâtre du Train Bleu, dans le cadre du Festival Off d’Avignon
du 6 au 24 juillet 2025, les jours pairs, à 11h20

23 juillet 2025/par Caroline Chatelet
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