Des Ailes du désir de Bruno Bouché d’après Wim Wenders par le Ballet de l’Opéra du Rhin jusqu’au Rouge et le Noir de Pierre Lacotte d’après Stendhal avec le Ballet de l’Opéra national de Paris , la rentrée chorégraphique est riche d’inspirations diverses. Focus.
De Notre Dame de Paris aux Illusions perdues, le ballet, le plus souvent classique, raffole des grandes histoires. Une narration appuyée, des personnages bien campés, sur le papier rien de plus simple qu’une adaptation littéraire. Mais les pièges sont tout autant nombreux. Il faut savoir alléger, enlever ou créer des personnages. Ainsi pour sa très attendue version scénique du roman de Stendhal, Le Rouge et le Noir, Pierre Lacotte a « gonflé » un des personnages, Elisa.
Son idée de décor –qu’il signe ainsi que les nombreux costumes- repose sur un livre, avec des pages blanches, comme un écrin au récit. Soit 35 toiles peintes ! Le Rouge et Le Noir accompagne le « maître » depuis un moment. Il a failli ne pas voir le jour –du moins à Paris. En effet, en période de restrictions économiques, Stéphane Lissner, ancien directeur de la Maison, avait décidé de remiser cette production ambitieuse –et coûteuse ?-. Mais elle verra le jour en ce mois d’octobre, rare création cette saison du Ballet de l’Opéra de Paris.
« Faire un ballet sur une trame semblable m’a aimanté. Attiré par ces multiples débordements, j’ai souhaité adapter l’œuvre de Stendhal pour en faire une œuvre chorégraphique. Le découpage nécessaire pour traduire les réactions de personnages qui s’affrontent avec une telle intensité devait être scindé en différentes scènes se joignant les unes aux autres comme une série de questions et réponses » résume Pïerre Lacotte. Du côté du Bolshoï à Moscou, les ballets-romans ont également le vent en poupe. Après Orlando (chorégraphié par Christian Spuck-), on attend une version dansée du Maître et Marguerite d’après le chef d’œuvre de Mikhail Bugalkov pour décembre prochain. Il est –grand- temps de réviser nos classiques….
La danse en plan large
Si le ballet classique a puisé dans la littérature matière à danser, il a d’abord gardé ses distances avec le Septième art. Jalousie ? Qui sait. Certaines étoiles se seraient bien vues stars d’Hollywood à commencer par Rudolph Noureev. Il sera Valentino au cinéma en 1977 pour Ken Russell. Un échec qui sonne le glas de sa carrière. Comme une vengeance, il signera une Cendrillon dans le milieu du cinéma ! Mais peu à peu, les chorégraphes se risquent à adapter des films. Ainsi José Martinez met en scène Les Enfants du Paradis à l’Opéra de Paris en 2008. « Il m’a semblé un film très chorégraphié, par ses scènes de foule qui alternent avec des duos, trios (un peu comme dans un grand ballet classique), les mouvements de la caméra faisant partie intégrante de cette chorégraphie » témoigne alors le danseur. Outre-Manche, Matthew Bourne chorégraphie Edouard aux mains d’argent le film de Tim Burton puis dernièrement les Chaussons rouges, œuvre iconique de Michael Powell situé dans le milieu de la … danse.
Cet automne, Les Ailes du désir, film culte de l’allemand Wim Wenders, devient une chorégraphie réalisée par Bruno Bouché pour le Ballet de l’Opéra National du Rhin. Un pari. « J’ai vu les Ailes du Désir la 1ère fois vers l’âge de vingt ans dans un petit cinéma du Quartier latin. Je suis sorti de la séance dans un état un peu cotonneux, sans savoir si j’avais aimé ou non ce film. L’idée que les anges puissent entendre toutes nos pensées était vertigineuse, je me sentais face à un objet artistique dont je ne saisissais pas toute la teneur. Je n’ai pas eu d’évidence sur le moment mais l’inconscient a fait son travail et des images et des sensations me sont restées à vie. Je conservais donc un souvenir très profond de ce film ». Qui va devenir un ballet. Si le premier acte colle au scénario du long métrage, le second prend plus de libertés. Surtout le chorégraphe introduit une certaine idée d’apesanteur dans son ballet avec des scènes réglées par Fabrice Guillot de la compagnie Retour Amont. « Dans un entretien radiophonique lors de la sortie de film à Cannes, Wim Wenders explique qu’il s’est emparé de l’imaginaire des anges pour mieux rendre compte de la beauté du simple fait d’être vivant. L’histoire des Ailes du Désir c’est avant tout, pour moi, l’histoire de la chute, du renoncement à l’éternité pour goûter la vie ». La danse sur les ailes du désir, en résumé.
Philippe Noisette – www.sceneweb.fr
Le Rouge et le Noir, chorégraphie Pierre Lacotte, Palais Garnier Paris du 15 octobre au 4 novembre.
Diffusion le 21 octobre au cinéma dans certaines salles UGC
www.operadeparis.frLes Ailes du désir, chorégraphie Bruno Bouché, 30 octobre au 4 novembre Opéra de Strasbourg, 13 au 15 novembre La Filature Mulhouse, 29 et 30 mars 2022 MAC Créteil
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