Après le beau succès de la Poupée sanglante d’après Gaston Leroux la saison dernière, le théâtre de La Huchette accueille une nouvelle adaptation musicale de roman : L’Écume des jours de Boris Vian. Moins dans un esprit cabaret que la création précédente, cette nouvelle production est baignée dans une forme d’étrangeté inhérente à ce roman aussi absurde que fascinant.
Plongeant immédiatement dans un univers langagier fantastique, l’adaptation est fidèle à l’ouvrage. Colin est dans la salle de bain et se prépare à accueillir son ami Chick, pauvre car ingénieur. L’un comme l’autre vont rapidement se retrouver pris dans des histoires d’amour invraisemblables avec Alise et Chloé, dans un monde où les inventions dingues sont la norme, où les chaussures repoussent et les canons fleurissent avec de la chaleur humaine. Des situations enfantines transposées dans des vies d’adultes, où la tristesse et la mort pointent à l’horizon.
Pour la musique, le choix a été fait d’instruments peu conventionnels. Une guitare électrique, un synthétiseur et un sampleur. Armés comme un « rock’s band », les musiciens oscillent dans leurs mélodies entre un concert de Fauve et un groupe de blues français. On est à mille lieues de La poupée sanglante. Ce choix d’interprétation entre le slam et la chanson est curieux au premier abord, mais finalement bien adapté aux situations déclamées.
Comme tout décor, un papier peint pend en fond de plateau. Seules la musique et la lumière ornent la petite scène. Le sentiment délicieusement suranné qui se dégage de l’histoire contraste avec la jeunesse de la distribution. L’interprétation est espiègle, presque cartoonesque par moment. On rêve avec ces personnages hors du commun, enveloppés en leur compagnie dans un petit nuage rose.
Les mots sont bien là. La narration vécue par les personnages fait naître les images. On pense à Prévert, à Queneau, à toute cette poésie du XXe siècle qui parvient à produire de nouvelles images limpides par des mots inventés mais logiques. On ressort de la représentation conquis ! Après tout, comment Boris Vian, le jazz et la rue de la Huchette n’auraient-ils pas fait bon ménage ?
Hadrien VOLLE – www.sceneweb.fr
« L’ECUME DES JOURS » de BORIS VIAN
dans une adaptation de Paul Emond
une mise en scène de Sandrine Molaro et Gilles-Vincent Kapps
une musique de Gilles-Vincent Kapps
avec Roxane Bret, Maxime Boutéraon, Antoine Paulin
Durée : 1h25La Huchette
À PARTIR DU 11 MARS 2017
du mardi au vendredi à 21h – samedi 16h et 21h
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