Le Paris des femmes du 10 au 12 janvier 2019 au Théâtre de la Pépinière
Pendant les 3 jours du festivals, exposition au Bar du théâtre
Paris des femmes en scène de FRANCESCA MANTOVANI
La photographe Francesca Mantovani accompagne le Paris des Femmes depuis 2015. Elle saisit à la fois les instants de répétitions et de représentations. Et signe les portraits noir et blanc des auteures invitées.
Quel joli mot que le mot de noces au pluriel généreux, qui, entre autres choses, semble toujours abriter une noce au singulier avec son cortège de visions désuètes, bucoliques, conviviales, champêtres, ensoleillées, de celles qui nous font quitter l’époque, nous transportent loin de tous les mariages qu’ils soient décidés ou forcés, d’amour ou de raison, pour tous ou non, et oublier l’institution au profit d’une suspension rêveuse, fastueuse, bienheureuse. Car à la noce, certes on s’unit mais avant tout, on se réjouit, on danse et on festoie. Bref de se marier on ose y faire fête, comme le déplore Armande, l’une des femmes savantes et résolument célibataires de Molière. Oui, à la différence du mariage, les noces libèrent l’essence d’une fête comme la vie n’en recueille que rarement, peuplée de familles unies, d’amis sincères, de visages radieux, de rires, d’ivresse, de musique, de robes qui tournent, de balancelles badines, de brises légères et de senteurs printanières. Mais à cette suspension, à ce rêve, encore moins que la vie, ni la littérature ni le théâtre ne concèdent strictement jamais parce qu’il est bien connu que les mariages heureux n’ont pas d’histoires et quand bien même en auraient-ils qu’il leur manquerait le nerf de la guerre. De cette guerre larvée ou non qui attire notre œil, notre oreille et fonde notre avidité de spectateur. Au théâtre, nous préférons de loin les noces où soudain le tempo de la danse ralentit, la blancheur s’obscurcit, où l’ivoire s’entache de rouge sang, où la griserie pique du nez et où la fatigue monte inexorablement. L’immense fatigue de l’âme au matin de la fête finie et de l’amour trahi. Des noces shakespeariennes, tchékoviennes, des mariages sanglants, où s’invitent des noceurs infidèles, excessifs, grotesques, débauchés, cyniques, des créatures revenues de tout et prêtes à renverser la table, emporter la mariée, révéler des secrets, qui nous feraient risquer leur presque paronymie avec la noirceur, une noirceur d’autant plus noire ce jour-là qu’elle tranche avec le nuancier blanc de l’innocence mais qui, en d’autres circonstances, se piquerait de vérité. Oui, souvent sur scène, les noces telles de grandes fleurs candides se détournent du jour et du soleil pour, et bien que l’étymologie n’en dise rien, confondre leurs ombres avec celles d’une nox profonde et tumultueuse où l’amour n’est ni sain ni sauf ni même réellement présent à la table des convives. De cette nuit-là, on perçoit peu à peu les cris, les chuchotements, les monologues désolés des époux, les sanglots, les regrets, et, telle une basse continue, l’infini lamento du désenchantement.
Alors oui, décidément, quel bien joli mot que le mot de noces avec son cortège de matières dont la valeur augmenterait avec celles des années, passant du coton à l’or, en l’espace de cinquante ans, qui nous ferait volontiers croire à la solidité grandissante d’un lien et d’une fête inaltérable. Parions qu’avec lui et une fois encore, la langue souvent prompte aux substitutions et aux tours de magie, tente d’enjoliver la vocation du mariage mais que, si précieuses les noces soient-elles, elles risquent comme lui à tout instant d’être mises en pièces.
Nathalie Azoulai
Préface de NOCES, éditions L’avant-scène théâtre, 2019
JEUDI 10 JANVIER / 20h30
Mise en scène ANNE BEREST
NOCES DE PLOMB
D’ANNE BEREST
Avec Judith Magre, Anna Mouglalis
Le soir de son vernissage, un photographe voit débarquer une femme qu’il a connue quatorze ans auparavant. Habillée comme pour une nuit de noce, cette mystérieuse apparition va bouleverser le diner donné en l’honneur de l’artiste.
PUISQUE QU’IL FAIT JOUR APRES LA NUIT
De et avec ANNA MOUGLALIS
Dans une chambre à coucher, une lettre est glissée sous la porte. La femme qui la reçoit apprend l’officialisation de son divorce. Cette missive remue en elle les souvenirs de sa noce. Elle revient sur les événements qui l’ont menée à son pitoyable mariage
CONTRECHAMP/DRAFT
De RÉBECCA ZLOTOWSKI
Avec Kate Moran
Sept lettres qu’une femme amoureuse écrit à son amant – lettres que peut-être, elle n’enverra jamais. Sept lettres rédigées sur les routes, au fin fond de la solitude, comme des rêves de voyages de noces, vécus en secrets.
VENDREDI 11 JANVIER / 20h30
Mise en scène Michel VUILLERMOZ, de la Comédie-Française
LA PHOTO DE FAMILLE
D’ADÉLAÏDE BON
avec Bruno Gouery, Carmen Brown
La place de l’église, un jour de noces. On entend les premières notes d’un Ave Maria. Une femme en robe de dentelle blanche sort de l’église, hésite un peu, puis se met à courir. Un homme sort à son tour, l’appelle et la poursuit. Qui est-il pour elle ? Et elle, pour lui ?
CINQUANTE PAS DANS L’ALLÉE
D’ISABELLE CARRÉ
avec Jacques Boudet, Jean-François Cayrey, Laurence Colussi
Ce sont des noces tardives, mais la mariée voudrait quand même remonter au bras de son père dans l’allée… Qu’est-ce qui rend cet instant si rare et précieux ? Pourquoi ces quelques pas se cristalliseront pour toujours dans sa mémoire ? Sinon parce qu’ils suffisent ((presque) à combler l’absence …
THIS IS NOT A LOVE SONG
De CAROLE FIVES
avec Jean-François Cayrey, Laurence Colussi
Un couple décide de boycotter ses noces de cristal (quinze ans de mariage) et de se coucher tôt. Mais leur soirée va être perturbée par des bruits répétitifs venus de chez les voisins. Coups, cris, appels à l’aide ? Vont-ils intervenir ? Ou fêter ce soir leurs noces de lâcheté ?
SAMEDI 12 JANVIER / 18h
RENCONTRE AVEC LES AUTEURES
Animée par Karine Papillaud
Avec Anne Berest, Adélaïde Bon, Isabelle Carré, Noëlle Châtelet, Catherine Cusset, Carole Fives, Tania de Montaigne.
SAMEDI 12 JANVIER / 20h30
Mise en scène JÉRÉMIE LIPPMANN
LA PSYCHÉ
De NOËLLE CHÂTELET
Cousins lointains, une jeune étudiante, Charlotte, et un jeune étudiant, Jérôme, vivent dans un appartement en colocation. Dans le vestibule qui sépare les deux chambres, trône un magnifique miroir. Spécial, ce miroir ? Comme dans les contes ?
Oui, mais rien à voir avec celui de Blanche Neige …
LES NOCES DE SAINT-PÉTERSBOURG
D’après un épisode de « L’autre qu’on adorait » de Catherine Cusset, éditions Gallimard
De CATHERINE CUSSET
Thomas, un Français de 33 ans, rencontre une Russe, Olga, à l’université de Portland où ils viennent tous deux d’être nommés professeurs. Ils tombent amoureux et Thomas, pour la première fois, pense au mariage. Olga lui répond qu’il doit d’abord aller faire sa demande à son père à Saint-Pétersbourg. Sur les rives de la Neva, une mauvaise surprise l’attend. Les noces n’auront pas lieu.
AUTOPSIE
D’après « Tokyo, c’est loin » de Tania de Montaigne, éd. Flammarion
De TANIA DE MONTAIGNE
Il arriva qu’un homme vit une femme. Il arriva que la réciproque fût vraie. Il arriva que le cœur de l’un batte à l’unisson de l’autre. Qu’on se voit un peu, puis beaucoup, puis tout le temps. Il arriva qu’on envoie des faire-parts pleins de cœurs et de guirlandes et, qu’en échange, on reçoive des cadeaux consternants. Il arriva, donc, que la vie suive son cours et, puisque tout avait un début, naturellement, vint la fin. Après la noce, vint la dé-noce.
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