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Les portraits dansés de Selma et Sofiane Ouissi

À la une, Coup de coeur, Les critiques, Marseille, Théâtre

Photo Pierre Gondard

Le duo d’artistes tunisiens Selma et Sofiane Ouissi dressent de singuliers « portraits dansés », qui s’inscrivent dans un passionnant projet au long cours, Le Moindre Geste. Après Marseille en 2019, ils ont mené le même travail en Seine Saint-Denis qu’ils présenteront aux Rencontres Chorégraphiques Internationales.

Dans leurs spectacles comme au festival Dream City qu’ils ont créé dans la médina de Tunis en 2007, Selma et Sofiane Ouissi aiment à inventer des manières de repenser la ville. Des partitions où chorégraphie, vidéo et théâtre se mêlent au point de ne plus former qu’un seul espace. Un « espace démocratique où le geste artistique questionne à chaque instant, et où il est questionné en retour », nous expliquaient-ils en 2016 au début de leur projet Le Moindre Geste. Ils étaient alors en résidence au Frac Lorraine, où ils cherchaient à élaborer avec trois groupes de personnes souvent marginalisées – des demandeurs d’asile, des malentendants et des personnes âgées – un vocabulaire commun. Un langage mi-parlé mi-gestuel qui permette de donner à entendre ce qui est le plus souvent passé sous silence. La solitude, la tristesse, mais aussi des paroles hors des syntaxes et des idées connues.

Les frères et sœurs ont ensuite poursuivi leur route et leurs recherches. Ils ont fait escale au Musée des Beaux-Arts de Gand, puis au Kustenfestivaldesarts dont Jan Goossens, actuellement à la tête du Festival de Marseille, était alors le directeur. C’est maintenant dans son festival qu’ils s’arrêtent, avec une série de six portraits d’habitants de la ville. Des individus aux personnalités, au parcours très divers, mais qui ont en partage une forme d’isolement. Une certaine exclusion. Le soir de la première, le 27 juin, c’est par exemple un peintre de la classe ouvrière qu’il nous était offert de rencontrer. Un homme qu’une « solidarité de classe » pousse, l’entend-on dire grâce au casque qui nous a été remis à l’entrée, à dénoncer « l’absence d’une véritable culture populaire » en France. L’élitisme des théâtres – Macha Makeïeff, directrice de La Criée, en prend au passage pour son grade – et des musées. Leur peu de talent pour dialoguer avec la majorité de la population.

Riche, ponctué d’anecdotes et de digressions, le monologue du peintre nous parvient d’autant mieux qu’il est coupé de son image. Qu’à la place de cet homme d’un certain âge – cela fait pas moins de 34 ans qu’il met tous les jours ses pinceaux au service de la cause ouvrière, dit-il fièrement – c’est un jeune homme qui apparaît sur écran installé au fond d’un plateau nu. Un garçon en tenue de sport qui semble prêt à commencer un entraînement. Ce ne sont pourtant pas des pompes qu’il se met à faire, ni des étirements, mais une succession de gestes étranges. Moulinets des bras, index pointé vers une direction mystérieuse, hochements de tête… Autant de petits mouvements, de signes qui, comprend-on rapidement, sont ceux de l’homme qui parle mais que l’on ne voit pas. Ou plutôt, ils s’en rapprochent autant que le permettent le corps et les réflexes du gesticulant, bientôt rejoint par des collègues qui se livrent au même exercice que lui. Avec chacun un résultat différent.

Dans Le Moindre Geste, la parole n’est donc accessible que par des intermédiaires divers. Elle est une chose qui échappe sans cesse, et dont l’origine demeure elle aussi en partie inconnue. De même que le « dispositif audiovisuel plus sophistiqué qu’il n’y paraît », lit-on sur la feuille de salle, qui la donne à entendre. L’absence de corps sur scène pose de nombreuses questions. Parmi lesquelles la place de l’artiste. Son rôle dans la performance, et de manière plus générale dans la société. Une interrogation au centre du travail de Selma et Sofiane Ouissi, qui ont confié en 2017 et 2019 – la prochaine édition aura lieu du 4 au 13 octobre – le commissariat de Dream City à Jan Goossens. L’éloignement, voire la disparition, suggèrent-ils ainsi, est parfois le meilleur moyen d’approcher le réel. Surtout lorsque notre intérêt se porte vers ses parties cachées, rejetées.

Ce n’est qu’en sortant de la salle que l’on comprend mieux le dispositif. Ce qui ne nous apprend rien toutefois des autres témoignages – parmi lesquels, nous révèlent Selma et Sofiane en aparté à la fin de la représentation, une femme sans domicile fixe, une Syrienne ou encore une prostituée – répartis sur plusieurs jours. Pour appréhender Le Moindre Geste dans sa globalité, il faut donc soit se déplacer plusieurs fois, soit échanger avec les spectateurs des autres soirs. Ou avec les deux artistes, qui une fois la performance terminée livrent avec plaisir quelques secrets de fabrique. Et quelques réflexions qui font écho à celles de Jan Goossens, dont la belle programmation de cette année tisse avec la ville et ses habitants des liens forts et, espère-t-on, durables.

Anaïs Heluin – www.sceneweb.fr

Le Moindre Geste
De Selma et Sofiane Ouissi
Collaboration et vidéo : Nicolas Sburlati
Illustration : Mahn Kloix
Production : Festival de Marseille
Durée : 90 min

RCI 93
Mercredi 18 mai 2022 • 19h 30
Jeudi 19 mai 2022 • 19h 30
Le Pavillon

29 juin 2019/par Anaïs Heluin
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