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Clément Viktorovitch, l’art de la transmission politique

A voir, Les critiques, Lille, Marseille, Metz, Nantes, Paris, Tours
Clément Viktorovitch crée L'Art de ne pas dire au Festival d'Avignon 2024
Clément Viktorovitch crée L'Art de ne pas dire au Festival d'Avignon 2024

Photo Just Arno

Accompagné par Ferdinand Barbet à l’écriture – et mis en scène par ce dernier –, le célèbre politologue, auteur et streamer porte son premier spectacle, L’Art de ne pas dire. Un seul en scène où le propos se révèle bien plus percutant et puissant dans l’analyse que dans la fiction.

Il y a des représentations qui marquent à jamais les spectatrices et spectateurs. Parce qu’elles se déroulent à un moment historique particulier. Et aussi, pour certaines, parce que leur propos, leur forme, leur parole font plus que résonner avec l’actualité : ils nous convoquent, nous interpellent, invitent à (re)considérer avec encore plus d’acuité le temps présent. C’est peu de dire qu’assister au spectacle de Clément Viktorovitch le soir du second tour des élections législatives de juillet 2024 relevait de ces catégories… Pour son premier spectacle, le politologue, chroniqueur, auteur et streamer, connu autant pour ses interventions dans les médias que sur les Internets – notamment sur YouTube et Twitch –, prolonge ce qui fonde son travail : s’intéresser aux procédés rhétoriques et transmettre, par l’analyse, les moyens de les démonter et de les déplier, autant pour se prémunir de leurs fonctions manipulatrices et escamotrices que pour les contrer. Cette question de la langue politique, de ce qu’elle nous fait, de ce qu’elle produit, évite, refoule, camoufle, comme de la manipulation ou de la dissimulation à l’œuvre, a plus que jamais infusé la campagne éclair pour les législatives ayant suivi la dissolution de l’Assemblée nationale.

Lorsqu’en ce dimanche 7 juillet, aux alentours de 20h25, le comédien annonça, au moment des saluts, les résultats et la présence en tête du Nouveau Front Populaire, ainsi que l’arrivée en troisième position du Rassemblement national à l’Assemblée, un soulagement traversa la salle. Une émotion qui, après le propos déployé par L’Art de ne pas dire, prenait une tonalité toute particulière. Si Clément Viktorovitch précisa qu’il annonçait les résultats sans les commenter – donnant rendez-vous à toutes et tous le lendemain matin sur sa chaîne Twitch –, il signala que sa pièce aurait pu s’appeler, si elle avait été écrite après la dissolution, Comment en sommes-nous arrivé.es là ?. Car, dans cette fiction largement nourrie de réel, l’étude scrupuleuse des mécanismes du discours met au jour leur perversité, la façon dont les stratégies de communication et procédés divers en viennent à obscurcir la violence – elle, bien réelle – des politiques menées.

Dans cette fiction, donc, Clément Viktorovitch incarne seul en scène, sur un plateau nu, seulement occupé par trois bandes de tissu blanc, un conseiller en communication désavoué. Simplement vêtu d’un jean et d’une chemise écrue, cet homme, dont l’attention à sa coiffure trahit un ego démesuré, a accompagné l’ascension du président de la République, avant d’être évincé pour malversations financières. Qu’à cela ne tienne, le communicant à la langue bien pendue propose aujourd’hui ses services de conférencier. Cette circulation de la politique à la communication – et possiblement inversement – bien caractéristique du champ politique français – signal s’il en est du néolibéralisme – est ici poussée au paroxysme de son cynisme : ce sont, en effet, les secrets de discours et de rhétorique que l’homme monnaye désormais. De son itinéraire personnel, de son absence d’éthique, de son carriérisme extrêmement calculateur aux exemples qu’il donne pour décrypter les structures des discours politiques, et jusqu’à la violence sociale d’état, tout résonne avec notre société contemporaine.

Séquencé en quatre parties, l’ensemble déplie de façon chronologique l’ascension du député, le propos fictionnel venant comme enrober les analyses des mécanismes de rhétorique, et leur perversité. Et c’est bien ce qui s’avère le plus passionnant, essentiel, puissant, mais aussi le plus pertinent en matière de jeu. Clément Viktorovitch n’étant pas comédien, les séquences où il porte l’itinéraire fictif de son personnage sont, en ce début de Festival Off d’Avignon, encore très fragiles. Il semble alors comme empêtré, engoncé dans son rôle, peinant à trouver la justesse de jeu nécessaire. Ces quelques scènes tranchent avec ce qui architecture solidement L’Art de ne pas dire : l’analyse implacable, habile, et au didactisme équilibré, des discours, et l’exposé des différentes figures de style utilisées par nombre de politiques. Là se retrouvent la vivacité et le sens de la répartie du politologue, son aisance à aller chercher le dialogue avec le public et à intégrer cet échange à son propos.

À sa façon, Clément Viktorovitch s’inscrit dans une histoire d’analyse des discours, du travail mené par le philologue Victor Klemperer sur la langue du IIIe Reich – et sur les formes et la structure du discours totalitaire nazi – à celui réalisé par l’écrivain, metteur en scène et sociologue Michel Simonot sur la novlangue – biberonnée au néolibéralisme – ayant largement contaminé le champ culturel français – dans La langue retournée de la culture –, en passant par les écrits de Sandra Lucbert, qui mettent au jour la façon dont les discours gestionnaires – sous-tendus par une idéologie, là encore, néolibérale – annihilent les individus. Et si la tentative de fiction ne convainc actuellement pas, Clément Viktorovich tient néanmoins, par son propos solide, son adresse sans fard, la barre de ce qui sédimente tout son travail : faire œuvre de transmission, de pédagogie, pour permettre au plus grand nombre d’appréhender les ressorts des discours politiques. Avec la conviction que la mise au jour des préjugés racistes, classistes, sexistes, nourrissant nombre de paroles, de discours, de procédés, ne peut qu’engager à faire front contre une politique se dévoyant elle-même.

caroline châtelet – www.sceneweb.fr

L’Art de ne pas dire
Écriture Ferdinand Barbet, Clément Viktorovitch
Mise en scène, scénographie Ferdinand Barbet
Avec Clément Viktorovitch
Création lumière Gautier Devoucoux
Musiques Hugo Sempé
Création costume Augustin Rolland

Production Gilles Mattana / Agoram Productions ; L’Académie Rhétorique
Soutiens L’Auditorium de Seynod, scène régionale Auvergne-Rhône-Alpes ; Les Allos – Théâtre de Cluses

Durée : 1h20

Vu le 7 juillet 2024 au Festival Avignon Off

Théâtre Saint-Georges, Paris
à partir du 22 septembre
Dimanche et lundi à 19h

Centre culturel La Ferme Corsange, Bailly-Romainvilliers
le 8 novembre

La Fleuriaye Théâtre, Carquefou
du 12 au 14 décembre

Radiant-Bellevue, Caluire-et-Cuire
les 8 et 9 janvier 2025

La Bascala, Bruguières
le 16 janvier

Le Pin Galant, Mérignac
le 18 février

Le Cepac Silo, Marseille
le 6 mars

Cité des Congrès, Nantes
le 13 mars

Palais des Congrès, Tours
le 14 mars

Le Ponant, Pacé
le 11 avril

L’Arsenal, Metz
le 29 janvier

L’ED&N, Sausheim
le 25 avril

Théâtre Sébastopol, Lille
le 29 avril

22 septembre 2024/par Caroline Chatelet
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