Daniel Jeanneteau adapte La ménagerie de verre de Tennessee Williams avec Dominique Reymond en tête de distribution. Elle éclaire ce huis clos familial. Son jeu dramatique et parfois drôle donne de l’épaisseur à une mise en scène trop lisse.
« La Ménagerie de Verre » est un huis clos familial de Tenessee Williams où le narrateur, Tom, se prépare à fuir définitivement un environnement féminin qui l’étouffe. Amanda, la mère, semble avoir perdu la boule depuis que son mari est parti (ou bien est-ce elle qui l’a fait fuir?) tandis que la sœur Laura a le mal-être communicatif. Timide au stade pathologique, elle ne s’intéresse qu’à ses bibelots de verre, soigneusement installés dans une pièce annexe au salon. L’arrivée de Jim O’Connor créera un événement qui nous ferra prendre conscience de l’immuabilité de la névrose familiale que rien ne fera changer, et donc, de la nécessité inévitable pour le fils de partir.
De la part de celui qui a longtemps été le scénographe de Claude Régy, on pourrait attendre quelque chose de particulier de la construction de l’espace et de la mise en scène. Or, ce sont d’abord les actrices qui portent cette nouvelle création de Daniel Jeanneteau.
Dominique Reymond est le stéréotype de la mère envahissante. Son jeu est borderline, plein de gestes et de manières soulignant une folie furieuse, marquée par un langage suranné achevant de la déconnecter de son époque. Les mimiques enfantines ajoutent au malaise dans la relation à son fils. Un fond d’inceste plane sur celle qui joue encore la gamine séductrice. Effroyablement dramatique, elle en devient très drôle. Puissante dans son incohérence, sa lecture du monde ne correspond qu’à elle, comme c’est le cas pour Laura. Sans elles, le spectacle perdrait la majeure partie de son intérêt.
Le beau décor contraste avec la violence du ressenti des personnages. Il colle à la dualité des sentiments en présentant, conformément à la volonté de l’auteur, une réalité brute dans un espace irréel. Cube de tissus, les couches de rideaux successives isolent les acteurs des spectateurs. Leurs voix, transformées par une chambre de résonance, terminent d’amplifier la distance. Une moquette shaggy donne un aspect vaporeux, brumeux à l’espace. La mise en scène va bien dans ce décor : sobre, soigneuse, mais aussi trop lisse. Ce sentiment nous habite au sortir du spectacle : une histoire dramatique qui a perdu sa dimension tragique de l’abandon au profit d’un environnement rassurant.
Hadrien VOLLE – www.sceneweb.fr
La ménagerie de verre DE TENNESSEE WILLIAMS
TRADUCTION : ISABELLE FAMCHON
MISE EN SCÈNE ET SCÉNOGRAPHIE : DANIEL JEANNETEAU
AVEC :
SOLÈNE ARBEL
PIERRIC PLATHIER
DOMINIQUE REYMOND
OLIVER WERNER
lumières : Pauline Guyonnet
costumes : Olga Karpinsky
son : Isabelle Surel
vidéo : Mammar Benranou
collaboratrice à la scénographie : Reiko Hikosaka
régie générale : Jean-Marc Hennaut
Remerciements Marie-Christine Soma
production : Maison de la Culture d’Amiens – Centre européen de création et de production, Studio-Théâtre de Vitry
coproduction : La Colline – théâtre national, Espace des Arts scène nationale de Chalon/Saône, Centre Dramatique National Besançon Franche Comté, Maison de la Culture de Bourges, Shizuoka Performing Arts Center – Japon, Institut Français
L’Auteur est représenté dans les pays de langue française par l’Agence MCR, Marie Cécile Renauld, Paris, www.paris-mcr.fr en accord avec Casarotto Ramsay Ltd, London. La traductrice est représentée dans le monde par l’Agence MCR. La Ménagerie de Verre est présentée en vertu d’un accord exceptionnel avec «The University of the South, Sewanee, Tennessee»Durée : 2h
création à la Maison de la Culture d’Amiens du 24 au 29/02/16
CDN de Besançon du 3 au 5/03/16
Théâtre National de Bretagne, Rennes du 8 au 12/03/16
Scène Watteau, Nogent sur Marne 19/03/16
Espace des Arts, Scène Nationale de Châlon sur Saône 22 et 23/03/16
Théâtre National de La Colline, Paris du 31/03 au 28/04/16
Maison de la Culture de Bourges du 11 au 13/05/16
Le Quartz, Scène Nationale de Brest 18 et 19/05/16
Comédie de Reims du 24 au 27/05/16
Fameuse pièce de Tennessee Williams, « La ménagerie de verre » offre encore des possibilités d’exploration infinies. En s’y attelant, le metteur en scène Daniel Jeanneteau confirme cette capacité à combiner direction sensible des comédiens et mise en scène feutrée, dont la rigueur se met au service du drame.