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Julie Deliquet met Fassbinder à la fête

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Julie Deliquet adapte Huit heures ne font pas un jour de Fassbinder au Théâtre Gérard Philipe TGPPascal Victor
Julie Deliquet adapte Huit heures ne font pas un jour de Fassbinder au Théâtre Gérard Philipe TGP

Photo Pascal Victor/Opale

Pour sa première création en tant que directrice du Théâtre Gérard Philipe, la metteuse en scène s’empare de Huit heures ne font pas un jour du réalisateur et dramaturge allemand avec l’intelligence, la finesse et la foi dans le collectif qui, toujours, la caractérisent.

Qu’il est étonnant de croiser la route de ce Fassbinder là – dont on pouvait douter qu’il puisse exister –, d’un auteur jovial et résolument optimiste, ayant foi en ses semblables et dans la force du collectif. Au cœur de son œuvre plutôt sombre, Huit heures ne font pas un jour occupe, en réalité, une place à part. Résultat d’une commande de la chaîne régionale allemande WDR passée au début des années 1970, elle est, avant tout, une série télévisée, un feuilleton comme on les appelait alors, destinée à un large public. Plus habitué, à l’époque, à s’adresser aux bourgeois des salles de théâtre qu’aux masses téléspectatrices, Fassbinder s’est donc mis à la hauteur des préoccupations du plus grand nombre et a eu l’audace de placer le monde ouvrier au premier plan de son action. Une démarche inédite, loin, très loin, d’être innocente.

Car la famille Krüger-Epp est faite de ce bois là. Sur trois générations, ses membres sont tous des représentants typiques de la classe populaire, de la couche laborieuse de cette Allemagne des seventies. À partir de l’anniversaire de la grand-mère Luise, Fassbinder suit leur quotidien, leur devenir, et plus particulièrement l’histoire d’amour de Jochen et Marion qui viennent tout juste de se rencontrer. Loin de se contenter du cocon familial, le réalisateur allemand opère un inhabituel mélange entre les sphères personnelle et professionnelle, celle de l’usine, comme si l’une n’allait pas sans l’autre, comme si l’une matriçait l’autre, et inversement. A travers cette fresque, il donne à apprécier, sans jamais sombrer dans le misérabilisme, les difficultés quotidiennes de cette famille, mais aussi les tendances de fond plus sourdes, plus lourdes, qui bousculent la société, et les Krüger-Epp avec elle, tels le mépris de classe, la xénophobie ou encore la volonté émancipatrice des femmes qui n’est pas sans rester en travers de la gorge de certains membres de la gent masculine qui, en réponse, tombent dans la violence conjugale.

Malgré ces obstacles, tout réussit, ou presque, à ce gentil clan. Dès qu’un problème se pose, Fassbinder le règle en moins de temps qu’il ne faut pour le dire – ce qui, au moment de la sortie de la série, lui avait été reproché par ses détracteurs. C’est que, dans l’immédiat-après 1968, l’auteur a un message politique à faire passer – il est vrai, parfois, à gros traits – au peuple : celui de la force de l’intelligence collective et de la solidarité qui, bien armées, peuvent soulever toutes les montagnes et renverser tous les rapports de forces. Dans une période pourtant marquée par la guerre froide, par l’affrontement bloc contre bloc, les idéaux et l’idéologie ne sont jamais, chez lui, le berceau des actes, mais ce sont bien ces derniers qui, réalisés en groupe, génèrent des solutions et donc des idées. Une logique intellectuelle qui ne pouvait qu’aller comme un gant à Julie Deliquet qui, depuis ses débuts, démontre la force du collectif théâtral au plateau.

Aux commandes des épisodes 1 à 5 – les seuls à avoir été tournés sur les huit écrits par Fassbinder –, la metteuse en scène transforme cette utopie en marche en un long plan-séquence à la fluidité remarquable d’intelligence et de finesse. Ils sont peu nombreux les artistes capables, comme elle, de faire montre d’une telle maîtrise de la dramaturgie et de la scène, d’emporter le spectacle dans un seul et unique mouvement qui jamais ne s’interrompt. À ce titre, la scénographie est astucieuse, à la fois suffisamment déterminée et indéterminée pour être en mesure de symboliser, sans que cela ne jure, un appartement, un vestiaire d’usine ou une salle des fêtes pour un mariage. Pour signifier un changement de lieu, elle joue sur les costumes, les maquillages et les coiffures des comédiens qui alternent entre plusieurs rôles, sans même, parfois, que l’on s’en aperçoive, comme lors de la transition bluffante entre les épisodes 4 et 5.

Si la metteuse en scène place résolument sa pièce dans une esthétique très années 1970 – pantalons pattes d’eph’ et lunettes géantes faisant foi –, elle cherche aussi, comme toujours, à la conjuguer au présent, à transformer l’Histoire en immédiat. Face à cette épreuve, de laquelle ils sont coutumiers, ses fidèles comédiens se montrent, en tous points, et comme à leur habitude, étincelants, et ne feront que gagner, au fil des représentations, en intensité. Avec eux, la balle théâtrale ne retombe jamais, grâce à une dynamique de troupe qui n’écrase pas pour autant les partitions individuelles, à commencer par celle d’Evelyne Didi, grand-mère piquante à souhait. Tout dans ce spectacle brille de facilité et d’aisance alors que tout est, à l’inverse, le résultat d’un travail de fourmi et de titan. Il paraît qu’il s’agit là de l’une des marques de fabrique des grands.

Vincent Bouquet – www.sceneweb.fr

Huit heures ne font pas un jour – Episodes 1 à 5
de Rainer Werner Fassbinder
Mise en scène de Julie Deliquet
Avec Lina Alsayed, Julie André, Éric Charon, Évelyne Didi, Christian Drillaud, Olivier Faliez, Ambre Febvre, Zakariya Gouram, Brahim Koutari, Agnès Ramy, David Seigneur, Mikaël Treguer, Hélène Viviès et, en alternance, Paula Achache, Stella Fabrizy Perrin et Nina Hammiche
Traduction Laurent Muhleisen
Collaboration artistique Pascale Fournier, Richard Sandra
Version scénique Julie André, Julie Deliquet, Florence Seyvos
Scénographie Julie Deliquet, Zoé Pautet
Lumière Vyara Stefanova
Costumes Julie Scobeltzine
Coiffures, perruques Judith Scotto

Production Théâtre Gérard Philipe, centre dramatique national de Saint-Denis
Coproduction La Comédie – CDN de Reims ; TnBA, Théâtre national de Bordeaux en Aquitaine ; La Coursive – scène nationale de La Rochelle ; Théâtre Joliette – scène conventionnée de Marseille
Avec le soutien de L’École de la Comédie de Saint-Étienne / DIÈSE #Auvergne-Rhône-Alpes

Les œuvres de Rainer Werner Fassbinder sont représentées par L’ARCHE – agence théâtrale.
L’intégralité des huit épisodes de l’œuvre Huit heures ne font pas un jour est publiée par L’ARCHE Éditeur.

Durée : 3h20 (entracte compris)

Théâtre Gérard Philipe, centre dramatique national de Saint-Denis
du 28 septembre au 9 octobre 2022

Le 14 octobre 2022, Espace Marcel Carné, Saint-Michel-sur-Orge

Du 19 au 21 octobre, Domaine d’O, Montpellier

Du 8 au 11 novembre, TnBA, Théâtre National de Bordeaux en Aquitaine, centre dramatique national

Les 17 et 18 novembre, Théâtre Edwige Feuillère, Vesoul

Les 1er et 2 décembre, Théâtre de Lorient, centre dramatique national

Les 13 et 14 décembre, La rose des vents, scène nationale, Lille Métropole Villeneuve d’Ascq

3 octobre 2021/par Vincent Bouquet
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