Au Théâtre National de Strasbourg, l’auteur et metteur en scène Lazare embarque pour presque trois heures d’ébullition théâtrale. Le spectacle saturant brasse dans la confusion les thèmes de l’identité et du changement.
Fidèle à son style généreusement disparate et à sa forme de théâtre musical et de cabaret bouffon, Lazare signe une nouvelle création où règnent l’éparpillement, le débraillement. Le spectacle veut aussi bien prendre les traits d’un film de science-fiction, d’une comédie musicale, d’un gala télévisé, d’un opéra, d’une revue… Le mélange prédomine donc, sans hiérarchie. Les cultures savantes et populaires sont réunies. On y rencontre Nerval et E.T., Schumann et Batman. On joue beaucoup de musique, du Vivaldi comme du rap, on danse le French Cancan. Les femmes se dénudent et les hommes se travestissent. Ça hurle, ça délire. Tout cela sous l’égide d’un Jésus Christ qu’on dirait sous acide. Le ton se veut aussi bien lyrique, épique, parodique, scatologique, prophétique, logorrhéique. Tout est assumé avec jubilation par une équipe d’interprètes touche-à-tout. Acteurs, danseurs, chanteurs, musiciens, Anne Baudoux, Laurie Bellanca, Odile Heimburger, Thibault Lacroix, Olivier leite, Emile Samory Fofana, Philippe Smith, Veronika Soboljevski, Julien Villa, Marion Faure épatent dans une approche très libre du texte et de la scène.
Mais la vivacité et l’originalité de l’ensemble ploient sous l’abondance de propositions qui deviennent souvent du n’importe quoi et parfois s’apparentent davantage à du remplissage qu’à un propos vraiment nécessaire. Peut-être se dégage-t-il de manière épisodique une poésie brute et insolite mais elle s’émousse et s’épuise à mesure qu’avance la représentation qui souffre de ses boursouflures. Le trait est épais, Tout passe en force. Il paraît bien difficile de trouver du sens dans un propos aussi incompréhensible. Il est à l’évidence question de renouveau, de mutation, d’avènement de transformation de l’humain avec implantation de disquette dans le cerveau et recours à l’intelligence artificielle, de l’avènement d’une civilisation suprême mettant un terme au néant généralisé mais se présentant comme la menace d’une inquiétante standardisation de l’humanité.
En filigrane, Lazare interroge le monde, ses changements, ses dérives, interroge le théâtre, se raconte, évoque la banlieue, l’intégration, la stigmatisation de l’étranger, fait l’ éloge des minorités (les extraterrestres) et de l’altérité, sans misérabilisme et même avec un humour détonnant. Il adopte en revanche la posture plus complaisante d’un l’artiste maudit à travers le personnage d’Ismaël qu’il joue lui-même à l’écran et qu’il présente comme un poète errant, insatisfait et empêché de s’exprimer. Un comble pour le signataire d’un spectacle accompagné par le TNS et qui apprête à tourner au T2G, au Théâtre de la ville à Paris, à Toulon, à Rennes, Nantes, Amiens, Vire …
Christophe Candoni – www.sceneweb.fr
JE M’APPELLE ISMAËL
Texte et mise en scène
LazareAvec
Lazare,
Anne Baudoux,
Olivier Leite ,
Julien VillaEt (pour le film)
Charles Berling,
Lazare,
Thibault Lacroix,
Olivier Leite,
Mourad Musset,
Ouria,
Jean-François Perrier
en coursCollaboration artistique
Anne Baudoux
Scénographie
Olivier Brichet
Son
Jonathan Reig
Assistanat à la mise en scène
Marion FaureLe texte a reçu l’Aide à la Création du Centre National du Livre et du Centre National du Théâtre
Pour le tournage, remerciements à la Mairie de Bagneux
Avec l’autorisation de la Préfecture de Police de la Ville de ParisLe décor et les costumes sont réalisés par les ateliers du TNS.
Production
Théâtre National de Strasbourg, Vita novaCoproduction
T2G – Théâtre de Gennevilliers,
Le Liberté – Scène nationale de Toulon
en coursLazare est artiste associé au projet du TNS
Durée : 2h50
Théâtre National de Strasbourg
Du 27 fév au 9 mar 2019
Gennevilliers du 21 mars au 1er avril 2019 au T2G – Théâtre de Gennevilliers
Toulon le 3 mai 2019 au Liberté – Scène nationale de Toulon
Paris du 4 au 8 juin 2019 au Théâtre de la Ville – Paris
Rennes automne 2019 au Théâtre National de Bretagne / Rennes
Nantes automne 2019 au Grand T – Théâtre de Loire Atlantique
Mais quelle étrange conclusion !
Ça voudrait dire que Charlie Chaplin n aurait pas pu incarner son légendaire charlot au regard de son succès cinématographique ? La distance manque certaines fois !
dit -on à Vincent Lindon (habitant de Neuilly) qu’il est un imposteur quand il incarne le chômeur du cinéma français ? demande t’on à l’acteur qui joue Richard III de tuer pour être crédible ? tim burton est -il complaisant quand il réalise Ed Wood l’histoire d’un réalisateur raté ? le jeux des masques n’a plus la cote, sale temps pour les acteurs!
Tout à fait d’accord avec Julie. C’est idiot. Les auteurs et les poètes doivent pouvoir s’écrire et s’incarner dans tous les doubles qu’ils désirent. Et le langage du poète ne sera jamais celui du journaliste, bien heureusement.
Mais je suis tout à fait d’accord avec cet article !!!!
marre de ces acteurs complaisants qui incarnent ce qu’ils ne sont pas!!!! Platon voulait les bannir de la cité, il avait raison! Artistes, Arrêtez de mentir. Du mensonge!!! Du mensonge!!! J’ai vu Isabelle Huppert jouer dernièrement dans un film, elle jouait une prof… ridicule! Isabelle Huppert? Prof? Laissez moi rire. On sait bien qu’elle n’a pas son capes.
Ha ha haaaa !! Votre commentaire est amusant. Dans mon souvenir Platon pensait aussi que l « étranger » n avait pas sa place dans cité, que la parole de la femme ne devait pas être prise en compte politiquement et bien d autres fixités encore admises à l époque… ! Platon dans son regard sur la figure de l artiste ne fait qu appuyer sa conception de la pensée; un savoir relié à l intelligible. L art pour lui est une expérience sensible et se situe donc en dessous de la « vérité » philosophique … mais sincèrement en 2019 convoquer Platon pour rappeler à quel point la complexité de l être humain – alliant pensée et expérience, société et animalité, réalités et fantasmes – n avait pas été effleurée du doigt c est tout de même un peu léger !! Mais ça permet peut être de s’en rappeler quelques fondamentaux (et leurs contextes )