Après Flamme(s), le dramaturge et metteur en scène poursuit son analyse de la jeunesse dans les quartiers populaires. Présentée comme une pièce sur la radicalisation en ligne, J’ai rencontré Dieu sur Facebook se transforme en mélo familial aux accents curieusement humoristiques.
Ahmed Madani l’avoue lui-même : « Les questions liées au détournement de la parole divine, aux manipulations à l’oeuvre sur les réseaux sociaux, à la révélation, ou à l’engagement pour une cause ne sont que des prétextes pour permettre au vrai récit de se déployer dans les interstices de la narration. » Et c’est bien là le noeud du problème. Présentée comme une pièce sur la radicalisation en ligne, J’ai trouvé Dieu sur Facebook devient, à l’épreuve des planches, un mélo familial comme le théâtre en produit tant, où une collection de topoï artistiques – « la solitude, le manque d’amour, la peur de la séparation, la quête de ses origines, le sentiment d’humiliation, le désir de se dépasser, l’acceptation nécessaire de la mort des être chers » – prennent le pas sur un sujet en or que le dramaturge ne parvient pas à creuser en profondeur.
Les ingrédients dramaturgiques semblaient pourtant réunis pour faire de ce projet un spectacle tout en subtilité. Spécialiste du destin de la jeunesse dans les quartiers populaires, Ahmed Madani a pris racine à Sevran, où Nina et sa mère vivent dans un modeste appartement. La femme vient de perdre sa propre mère qu’elle a dû aller enterrer en Algérie, en dépit des traditions qui lui refusaient tout accès au cimetière. Déboussolée par la mort de cet être cher, elle ne voit pas que sa fille, le soir venu, s’enferme dans sa chambre pour converser sur Facebook. Là, elle passe ses nuits à dialoguer avec Amar, un jeune homme qui se présente comme un combattant du djihad en Syrie. Peu à peu, ce grand séducteur parvient à enrôler Nina, à la persuader du bien-fondé de son combat mortifère, à radicaliser sa vision de l’islam, et à la convaincre de le rejoindre au « Shâm ».
Déployée dans un décor tout en simplicité, la pièce peine à en venir au fait. Au lieu d’entrer directement dans le coeur de son sujet, Ahmed Madani s’égare dans une narration rétrospective où il multiplie les portes d’entrée, sans toujours les exploiter comme elles le mériteraient. Insuffisamment porté par le jeu de Mounira Barbouch et Louise Legendre qui, s’il s’améliore en cours de route, n’est pas exempt dans les premiers temps de quelques faussetés, le spectacle échoue, à cause de son tropisme curieusement humoristique, à éviter les écueils caricaturaux et un certain didactisme. Se regardant avec le plaisir généré par un bon téléfilm, il ne cherche jamais à se hisser à la hauteur de la gravité de sa thématique. Du traitement d’un tel sujet, on attendait plus de nuances, de puissance et d’intensité. Las, la plume d’Ahmed Madani a cette fois pris le parti d’une curieuse légèreté.
Vincent Bouquet – www.sceneweb.fr
J’ai rencontré Dieu sur Facebook
Texte et mise en scène Ahmed Madani
Avec Mounira Barbouch, Louise Legendre, Valentin Madani
Création sonore Christophe Séchet
Conseiller à la scénographie Raymond Sarti
Création lumière et régie générale Damien Klein
Vidéo Nicolas Clauss
Costumes Pascale BarréProduction Madani Compagnie
En coproduction avec Le Théâtre Brétigny – Scène conventionnée – Résidence d’artistes, Fontenay-en-Scènes à Fontenay-sous-Bois, la Comédie de Picardie à Amiens, Théâtre de la Nacelle à Aubergenville, le Colombier-Magnanville – Résidences 17-18, La Communauté de communes du Val Briard, Act’Art, opérateur culturel du département de Seine-et-Marne
Avec le soutien de La Maison des Arts de Créteil, la Maison des Pratiques Artistiques Amateurs, la Ferme de Bel Ébat – Théâtre de Guyancourt, La Fondation E.C.A.R.T-Pomaret et le Conseil départemental de l’Essonne
Ahmed Madani est artiste associé au Théâtre de Brétigny – Scène conventionnée art & création, et compagnie en résidence à Fontenay-sous-Bois (Fontenay-en-Scènes)
Madani Compagnie est conventionnée par le Ministère de la Culture – DRAC Île-de-France et par la Région Île-de-France et distinguée compagnie à rayonnement national et international depuis 2017Durée : 1h30
Festival Avignon Off 2019
11 Gilgamesh
du 5 au 26 juillet à 11h50 – Relâches les 10, 17 et 24
Théâtre Roublot / Fontenay-en-Scènes, Fontenay-sous-Bois
du 21 au 23 novembreThéâtre de Chelles
le 26 novembreThéâtre Les Passerelles – scène de Paris – Vallée de la Marne
du 27 au 30 novembreThéâtre Montansier, Versailles
du 9 au 13 décembreEspace Jéliote, Oléron-Sainte-Marie
le 17 décembreThéâtre des 4 Saisons – Scène d’intérêt national, Gradignan
le 19 décembrePôle en Scène, Espace Albert Camus, Bron
le 16 janvier 2020Théâtre de la Renaissance, Mondeville
le 24 janvierL’Antarès, Vauréal
le 28 janvierCentre culturel Jean Vilar, Champigny-sur-Marne
les 31 janvier et 1er févrierLa Sucrerie, Coulommiers
le 6 févrierLe Quai des Arts, Argentan
les 11 et 12 février
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