Pour interpréter le rôle de M, Jacques Osinski a tout de suite pensé à Denis Lavant. « J’ai immédiatement pensé à Denis et à cette folie, cette étrangeté qu’il peut amener sur un plateau. Il emmène les gens, il vous capte, il vous magnétise. Et j’aime son rapport au corps. C’est presque un danseur qui mettrait des mots. »
Marius von Mayenburg est un dramaturge né en 1972, devenu l’auteur associé de Thomas Ostermeier à la Schaubühne, bastion berlinois de la scène internationale. Je l’ai découvert à la lecture de L’Enfant froid, pièce extraordinaire d’un prodige dont l’écriture s’inscrit dans la tradition allemande, celle d’Horváth, de Büchner. Mayenburg est un véritable et noble héritier des classiques qui a intégré toute la dramaturgie moderne. Avec d’autres auteurs de sa génération, tels Falk Richter ou Roland Schimmelpfennig, il a créé une nouvelle dramaturgie allemande, totalement contemporaine. Le Moche et Le Chien, la nuit et le couteau traitent de deux manières contradictoires du même thème du monstre. Lette, le « moche », est d’une laideur monstrueuse, inacceptable pour les autres. M., le personnage de Le Chien, la nuit et le couteau est aux prises avec des figures monstrueuses, qui veulent le dévorer. Mais on peut aussi se demander si ce n’est pas lui le monstre, l’exception. Le monstre, c’est celui qui est anormal, qui n’est pas comme les autres. Cependant les deux pièces sont très différentes. Le Moche est une comédie implacable, grinçante et extrêmement drôle. Le Chien, la nuit et le couteau est une oeuvre plus dramatique, onirique, fantastique et noire. Mayenburg opère une réelle déconstruction de l’espace et du temps. Le matériau qu’il fournit aux acteurs est exceptionnel. Ses phrases sont courtes, vives. Les acteurs jouent plusieurs personnages qui deviennent des figures. Dans Le Moche, celles-ci sont quotidiennes : trois femmes prénommées Fanny, trois Karlmann, deux Scheffler. Les mêmes acteurs sont tour à tour l’épouse et la maîtresse, le patron et le chirurgien sans changer de costume… Dans, Le Chien, la nuit et le couteau, les changements sont plus marqués, les images plus fortes, les figures inquiétantes et fantasmatiques. Mais il reste toujours une connivence avec le public du fait que celui-ci reconnait l’acteur derrière la figure qu’il endosse. Mayenburg excelle dans les jeux de miroirs. Il s’amuse avec les conventions. Il porte un regard bienveillant sur les êtres. C’est un regard sans cruauté, sans jugement. Extrait de l’entretien avec Jacques Osinski d’après dossier de presse
Mayenburg / Osinski, le dyptique
Le Moche
avec Frédéric Cherboeuf Scheffler
Delphine Cogniard Fanny
Jérôme Kircher Lette (Le Moche)
Alexandre Steiger Karlmann
durée 1h
Le Chien, la nuit et le couteau
avec Frédéric Cherboeuf l’homme au chien, le policier, la patient,
le médecin, le chien
Grétel Delattre soeur cadette, soeur aînée, le criminel, l’avocat,
l’infirmière
Denis Lavant M
durée 1h15
et pour les deux spectacles
traduction de l’allemand Hélène Mauler, René Zahnd
dramaturgie Marie Potonet
scénographie Lionel Acat
collaboration artistique Alexandre Plank
lumière Catherine Verheyde
costumes Hélène Kritikos
musique Dayan Korolic
production Centre Dramatique National des Alpes – Grenoble, coréalisation Théâtre du Rond-Point et MC2 Grenoble
création du Centre Dramatique National des Alpes du 12 au 23 avril 2011 à la MC2 Grenoble
27 avril – 22 mai 2011
relâche les lundis et les 30 avril, 1er et 8 mai
Le Moche 18h30, le dimanche à 15h30
Le Chien, la nuit et le couteau 21h, le dimanche à 18h30
26 et 27 mai 2011 Amphithéâtre de Pont de Claix
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