46 spectacles seront programmés au Festival d’Avignon du 7 au 26 juillet 2022 avec, dans la Cour d’honneur, Le Moine noir dans une mise en scène de Kirill Serebrennikov. Olivier Py espère qu’il sera autorisé à se déplacer en France comme cela a été le cas pour la création du spectacle à Hambourg en janvier dernier.
Les programmations, notamment pour la Cour d’honneur, se font longtemps en amont. Le choix de Kirill Serebrennikov est-il un symbole encore plus fort depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie ?
Ce n’est évidemment pas en lien avec l’actualité, puisque cela a été décidé deux ans plus tôt. Mais c’est ainsi. Le Festival d’Avignon va s’ouvrir dans la Cour avec l’œuvre d’un très, très grand artiste russe. On verra aussi ses films au Festival. Et puis il va se clore par des Ukrainiennes. On a l’impression qu’on va se mettre au diapason de la situation épouvantable que nous sommes en train de vivre.
En 2019 pour la création de Outside, Kirill Serebrennikov n’avait pas pu quitter Moscou. En janvier dernier, il a été autorisé à se rendre en Allemagne. Espérez-vous qu’il soit présent cet été ?
On y croit très, très fort, bien évidemment, tout comme lui. On a rêvé ensemble qu’il vienne un jour faire la Cour. C’est un évènement considérable dans le parcours d’un artiste. Il vient avec Le Moine noir qui est une nouvelle de Tchekhov dans laquelle il a projeté beaucoup de choses extrêmement intimes et personnelles. Donc, bien sûr, toute l’équipe du Festival et moi-même rêvons d’avoir sa présence, d’autant plus que nous en avons été privés la dernière fois.
Qu’est-ce qu’il représente aujourd’hui pour vous, Kirill Serebrennikov ?
C’est d’abord, un très, très grand artiste, à la fois de cinéma et de théâtre. Je suis heureux que le Festival d’Avignon l’ait fait connaître pour son théâtre, comme le Festival de Cannes comme cinéaste.
En 2019, il n’avait pas pu venir. Il avait créé à distance son œuvre. Donc il y a toujours possibilité, même à distance, de présenter une œuvre théâtrale.
Oui, mais ce n’est quand même pas souhaitable. Je me rappelle du moment où je l’ai félicité à la sortie du spectacle au téléphone. C’était très étrange. Nous avons tous vécu dans un rapport de distance ces deux dernières années étranges. Moi, pour la première fois depuis deux ans, je retrouvais le public d’Avignon aujourd’hui en faisant ma conférence de presse. C’était évidemment très émouvant. Nous espérons tous, nous croyons tous, que nous allons avoir un festival normal. Un festival exalté comme on a pu le connaître dans le passé et cette fois, sans les masques, sans l’angoisse. Qui sait, peut-être dans une situation de paix ? Après tout, le festival est dans trois mois…
Quelle sera la place des femmes dans votre programmation ?
Elle est extrêmement importante. D’ailleurs, le dessin de l’affiche a été confié à l’artiste réfugiée afghane Kubra Khademi. Cela prend encore plus de sens au lendemain de l’annonce par les talibans de l’interdiction pour les petites filles d’aller à l’école.
Les Dakh Daughters sont souvent venues à Avignon, dans le Off, notamment au Théâtre du Chêne Noir. Grâce à Lucie Berelowitsch elles sont en France et elles vont conclure ses 9 années de festival à vos côtés, avec votre double, Miss Knife. Entre l’ouverture russe et la clôture avec l’Ukraine, ce festival sera une nouvelle fois au centre des préoccupations du monde ?
Le Festival, ce ne sont pas des vacances divertissantes. C’est un moment où tous ensemble, on peut vivre la conscience du monde. On peut approfondir notre rapport avec nos inquiétudes. C’est un moment de joie dans la conscience de l’état du monde. Alors que les apocalypses se multiplient d’année en année, non seulement géopolitiques, mais aussi écologiques. Les artistes sont là pour en témoigner. C’est déjà une victoire que le rideau se lève chaque soir. Alors profitons de ces moments là parce qu’ils ne sont pas du tout inconscients de ce qui se passe sur la planète.
Propos recueillis par Stéphane Capron – www.scenweb.fr
Laisser un commentaire
Rejoindre la discussion?N’hésitez pas à contribuer !