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Lou Simon aborde l’Histoire en pièces détachées

A voir, Charleville Mézières, Châtillon, Les critiques, Nanterre, Paris, Rouen, Théâtre
Insomniaques de Lou Simon
Insomniaques de Lou Simon

Photo Romain Le Gall Brachet

Après Sans humain à l’intérieur, la metteuse en scène, à la tête de la jeune compagnie Avant l’Averse, poursuit son chemin avec Insomniaques, et tresse avec succès théâtre documentaire et théâtre d’objets dans un spectacle où la matière dialogue avec les interprètes de façon éclairante.

« Vous, ça va ? Vous dormez bien la nuit ? » C’est sur cette question d’apparence anodine adressée au public que s’ouvre Insomniaques. La complicité d’emblée installée par le duo qui nous fait face pose les bases d’un spectacle tout autant ancré dans le présent que dans l’Histoire, qui avance par strates successives à l’image de sa scénographie évolutive. Du plus proche au plus lointain, on remonte le temps étape par étape, au rythme de la recherche documentaire qui en est le noyau dramaturgique. Co-écrit à quatre mains par Lou Simon et Karima El Kharraze, Insomniaques aborde en effet un épisode de la Seconde Guerre mondiale passé sous silence – le massacre par l’armée allemande de civils noirs et de tirailleurs sénégalais le 9 juin 1940 à Rouen – à partir de l’enquête menée par deux amis passionnés par cette période historique : Jean Michel, un professeur d’Histoire à la retraite, et Flora, infirmière de nuit et collectionneuse de photos de l’époque. L’enquête se mue en obsession, l’obsession se mue en insomnie chronique. Jean Michel raconte cette enquête à ses neveux qui, à leur tour, perdent le sommeil et, à leur tour, décident de nous la raconter. Insomniaques est une histoire de transmission, d’héritage, de traces, de mémoire, de silence, de racisme, de morts oubliés, de nuits de travail et de réparation.

Au plateau, Arnold Mensah et Clémentine Pasgrimaud (tous les deux lumineux de justesse) sont nos guides, le lien entre l’ici et maintenant du théâtre et le passé de l’évènement. Les jeunes neveux qui nous accueillent deviennent les enquêteurs en un passage de relais fluide et imperceptible, et le mouvement qui s’opère dans ce spectacle en mille-feuille est fascinant. Ajoutant un élément de costume supplémentaire, les interprètes changent de génération, tandis que c’est la dynamique inverse qui s’opère au niveau scénographique, celle d’un retranchement et d’un éclatement des éléments. D’un côté, les couches s’ajoutent (là une chemise, ici un châle…) ; de l’autre, les couches s’enlèvent. Le monticule posé au centre de la scène fait bloc, il est un support de jeu essentiel aux interprètes, un partenaire aux multiples possibles évocateurs. Amas de matériaux entassés que l’on découvrira au rythme des découvertes, empilement bien rangé, c’est l’Histoire qui est dérangée, remuée, débroussaillée, labourée, bousculée dans ses grandes lignes, pour mieux aller voir ses zones d’ombre, ses trous noirs, ses tabous.

En ce sens, la mise en scène de Lou Simon, formée aux arts de la marionnette, est remarquable de pertinence. Elle creuse un sillon scénographique qui va de pair avec la narration et l’éclaire. L’Histoire est littéralement forée dans un double mouvement de spéléologie et de séparation de ses différentes entités. Les matériaux et objets sont manipulés au même titre que les sources sont croisées, et leur présence mobile harponne notre imaginaire, réveille des images enfouies. Comme cette photo recouverte de suie qui apparaît sous l’éponge qui l’essuie, ou ces boîtes contenant les archives départementales qui forment un plan de la ville sur l’une de leurs tranches, tandis qu’elles deviennent mur des fusillés, puis stèles éparpillées des tombes retrouvées. Les disparus sont évoqués en poignées de terre exhumées. Ainsi, une géographie du passé se dessine au fur et à mesure que le plateau se remplit. Comme une mise à plat des sources, une répartition dans l’espace des différents éléments en jeu afin de mieux les identifier et les comprendre. La scène devient cartographie pour penser le passé, paysage où l’Histoire retrouve sa mémoire perdue. Ainsi, l’effacement des traces évoqué est contrebalancé par une mécanique opposée d’apparitions successives. À chaque étage du décor, un nouvel indice.

C’est un théâtre d’objets bien singulier où s’invite une marionnette filandreuse, une seule. Émanation d’une sous-couche du décor, elle sort de terre comme une revenante pour raconter la trajectoire hypothétique du seul survivant du drame. Dans ce théâtre de matière où se niche l’imaginaire, qui se construit en se déconstruisant sous nos yeux, le décor est agi par les interprètes eux-mêmes. Il répond à leur besoin d’appui, de concret, de tangible, pour démêler les fils à rebours, et révéler ce crime dans son effarant racisme. À leurs côtés, Mariama Diedhiou, qui rôde et compose l’ambiance musicale du spectacle, incarne une présence fantomatique tout du long. À la caisse claire ou aux maracas, elle rythme la représentation, la soutient, l’accompagne. Et lorsqu’à la fin, elle prend la parole, pieds dans la terre, verticale au milieu des racines qui se fraient un chemin dans ce champ de bataille, son monologue et son chant redonnent une voix aux morts.

Marie Plantin – www.sceneweb.fr

Insomniaques
Mise en scène Lou Simon
Avec Arnold Mensah, Clémentine Pasgrimaud
Dramaturgie Karima El Kharraze, Lou Simon

Regard jeu et direction d’acteur.ice : Marion Solange Malenfant
Scénographie Cerise Guyon
Création musicale et sonore Mariama Diedhiou, Thomas Demay
Création lumière Romain Le Gall Brachet

Coproduction Le Sablier, CNMa – Ifs et Dives sur Mer ; CDN de Normandie-Rouen ; Théâtre Le Passage, Scène conventionnée d’intérêt national – Fécamp ; Le Théâtre de Chartres, Scène conventionnée d’intérêt national ; L’Hectare, territoires vendômois – CNMa ; Le FACM (Pivo), Festival théâtral du Val d’Oise ; Festival Marto, Val de Marne ; ODRADEK/Compagnie Pupella-Noguès – LCMC – dans le cadre du dispositif compagnonnage
Soutiens Le Tas de Sable – Ches panses Vertes – CNMa, Amiens ; La Nef, Manufacture d’utopies, Pantin ; Le 37ème Parallèle, Tours
Avec le soutien du département de Seine-Maritime et du département du Val d’Oise
Ce projet a reçu l’aide à la création de la DRAC Centre Val de Loire en 2024
Ce spectacle est soutenu en diffusion par la convention Région CVDL – Onda – ScenOcentre jusqu’en août 2025.

Durée : 1h20
À partir de 12 ans

CDN de Normandie-Rouen, Théâtre des Deux Rives
du 14 au 17 janvier 2025

Le Sablier, Ifs, dans le cadre d’À partir du réel
le 29 janvier

Théâtre Le Passage, Fécamp
le 31 janvier

L’Hectare, CNMa, Vendôme, dans le cadre d’Avec ou Sans Fils
le 2 février

Le OFF, Chartres
le 27 février

Théâtre Bernard Marie Koltès, Nanterre, dans le cadre de Marto
le 10 mars

Théâtre de Châtillon, dans le cadre de Marto
le 11 mars

Festival Mima, Mirepoix
en août 2025 (à confirmer)

Festival Mondial des Théâtres de Marionnettes, Charleville Mézières
en septembre 2025 (à confirmer)

Le Mouffetard, CNMa, Paris
en septembre 2025

Le PIVO, Festival théâtral du Val d’Oise
en septembre 2025

18 janvier 2025/par Marie Plantin
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