Cette année au Funambule Montmartre on a pu voir Le Journal d’une femme de chambre, d’Octave Mirbeau, sur une adaptation de Michel Monnereau avec Catherine Artigala dans le rôle-titre. Si Mirbeau est aujourd’hui un auteur dont bon nombre de compagnies s’emparent, il n’est plus vraiment d’actualité sur la scène des CDN et autres théâtres nationaux.
Octave Mirbeau est de ceux qui ont connu une célébrité sans pareille de leur vivant et qui, après leur mort, passent des décennies dans l’oubli. Né en 1848 dans le Calvados, mort le jour de son 69e anniversaire, en 1917, à Paris, Mirbeau était un journaliste (l’un des mieux payés de son temps), un critique dramatique, un critique d’art et un écrivain extrêmement prolifique. Son œuvre est si abondante et parfois si contradictoire qu’il est difficile de l’appréhender dans son ensemble. Plus que sa prose, sa personnalité, teintée d’anarchisme, semble avoir marqué les dernières années du XIXe siècle.
Pierre Michel, docteur-ès-lettres et président de la Société Octave Mirbeau, a souligné tout au long de sa carrière l’importance de Mirbeau. De son vivant, celui qui a vu sa première pièce montée lors de sa 46e année, a connu un succès fou au théâtre. Mais il a fallu attendre plus de vingt ans après sa mort pour qu’il retrouve les grâce du public : Les Affaires sont les affaires (1903) est remontée en 1937 à la Comédie-Française, la pièce connaît de nouvelles productions dans d’autres théâtres à travers les années 1970, 1980 et 1990. La mise en scène de Régis Santon en 1994 a été jouée plus de 400 fois au Palais-Royal et a obtenu un Molière. Quelques années auparavant, en 1989, c’est Le Foyer (1908) qui remporte la statuette de Meilleur spectacle de l’année. Preuve que les comédies de mœurs au vitriol trouvaient encore les mots pour nous séduire…
Aujourd’hui, Octave Mirbeau donne à la fois une impression datée et terriblement moderne. Une contradiction aussi inexplicable que celle engendrée par la création des Mauvais Bergers, son grand drame prolétarien… joué par Sarah Bernhardt et Lucien Guitry au Théâtre de la Renaissance, alors symboles du théâtre bourgeois ! Contre ce dernier genre, Mirbeau milite pourtant activement pour un renouvellement de l’écriture dramatique, Pierre Michel relève trois conditions voulues par l’auteur pour lutter contre la mort de l’art : que le théâtre montre des « figures réelles », des « personnages pris sur le vif » et enfin qu’ils parlent « la langue de la vie courante ». Des consignes qu’il n’appliquera que partiellement à ses propres créations.
A l’heure où les combats dépeints par Mirbeau semblent passés de mode, ou du moins très « datés », si l’on se donnait quelque peu la peine de relire son théâtre, peut-être que l’on se rendrait compte de la finesse et de l’actualité de sa plume.
Hadrien Volle – www.sceneweb.fr
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