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Gervais Tomadiatunga, l’enfant soldat devenu chorégraphe

Actu, Danse

La nouvelle création de Gervais Tomadiatunga s’appelle Réalité(s). Elle rassemble toutes les réalités rencontrées dans la vie du chorégraphe, de son adolescence volée à Brazzaville dans les camps des rebelles, à son travail dans les mines de Coltan. Gervais Tomadiatunga dirige la compagnie Danseincolore basée dans le Maine-et-Loire. Rencontre avec un chorégraphe engagé.

Comment s’est déroulée votre petite enfance ?
Bien, j’étais avec mes parents tous les deux ensemble, tout se passait très bien et jusqu’au moment où il y a eu le drame où j’ai été kidnappé à Brazza, et j’ai vécu avec les rebelles. Là, c’était une autre vie.

Vous aviez quel âge ?
J’avais 14 ans.

Vous vous souvenez du jour où c’est arrivé ?
Oui, je me rappelle on endormait avec mon grand frère et des rebelles qu’on connaissait sont venus chez ma mère à Macina. C’était un soir, il était minuit. Il y avait aussi mes grandes sœurs. Certains rebelles connaissaient mon frère. Mais au départ, ce n’était pas nous qu’ils cherchaient. C’était mon père, un ancien parachutiste de l’armée française. Mais cette nuit-là, il nous ont pris avec mon frère. On nous a mis dans le coffre d’une voiture noire. Direction : l’inconnu.

Et quand vous sortez du coffre de la voiture…
On s’est retrouvé dans une forêt avec beaucoup de gens et on a retrouvé ce chef de rebelles. Moi, j’étais jeune. Je voyais beaucoup de gens avec des armes. Mon frère a expliqué que mon père n’habitait pas avec nous, que nos parents étaient séparés. Il s’est passé des choses très horribles de ma vie. Ce jour là. J’ai perdu mon frère.

Vous êtes resté combien de temps dans ce camp ?
Quatre ans.

Cela doit sembler une éternité pour un enfant ?
Exactement. Tu es coupé de tout, tu n’existes même plus, tu deviens une machine à tuer. Les rebelles nous ont exploité pour faire la guerre aux sudistes. Pour moi, c’était très long. J’ai l’impression d’être resté plus de vingt ans.

Et comment vous en êtes sorti ?
Ah, j’ai fui. J’ai pu traverser le fleuve, dans une pirogue. Je me suis retrouvé à Kinshasa. J’ai retrouvé la famille de ma mère. Et à partir de là j’ai commencé à travailler dans les mines.

Travailler dans les mines, c’est un autre combat, c’est une deuxième partie de votre jeunesse qui a été volée.
Oui, exactement. C’est un autre combat, c’est une autre réalité. Mais on ne m’a pas forcé. Je suis parti travailler avec des cousins. J’espérais ramasser une grosse boule de diamant, un rêve d’enfant, pour devenir riche. Mais on était manipulé. On nous a fait croire à des rêves impossibles. J’ai travaillé dans les mines de coltan, dans les mines de diamants. On se déplaçait de village en village pour gagner plus. Mais malheureusement, ça n’a jamais marché et ça a duré plus de six mois.

Six mois de votre vie dans ces mines, vous et là aussi, comment vous en êtes sorti de ces mines et de ce travail ?
J’en avais marre de cette vie. On m’avait fait croire mes parents étaient morts, que j’étais un orphelin. Une fois, je suis revenu à Kinshasa pour faire des courses et j’ai croisé quelqu’un de ma famille. J’ai appris que mon père me cherchait. Il avait laissé son numéro de portable. J’étais ému et en colère parce qu’on m’avait fait croire que mes parents étaient morts.

A partir de quand la danse prend contact avec vous ?
On peut dire que c’est inné. J’ai une grande sœur qui s’appelle Édith, qui est danseuse et chorégraphe, elle fait partie des danseuses, qui ont marqué aussi l’histoire au Congo. Quand j’étais jeune, elle m’a transmis son savoir. Et quand j’étais dans les mines et les camps, la danse qui m’a sauvé. J’avais conservé une cassette de Bob Marley que j’écoutais en boucle dans mon walkman. C’est la danse qui m’a vraiment sauvé. C’est la danse qui m’a permis de me libérer. Quand j’ai repris contact avec mon père, il m’a inscrit à l’Institut Français à Brazzaville, et j’ai fait des stages. Et j’ai été repéré par le directeur du ballet national du Congo qui m’a engagé. Je suis parti en tournée, on a dansé dans de grands festivals. Et puis j’ai été sélectionné par Florent Mahoukou pour son spectacle On the Steps, et là les portes se sont ouvertes.

A partir de quand, vous créez votre compagnie ?
En 2007, j’ai créé ma compagnie au Cogo, elle s’appelait Tumamana, ça veut dire obéissance en français. J’ai commencé à encadrer des jeunes. Ma première création s’est appelée « Éoyo Ekoya Eya » (Advienne que pourra, 2012). Elle racontait l’histoire de la jeunesse du Congo. C’était déjà pour moi la volonté de témoigner. Puis mon solo Intouchable a permis de me produire en France. Et en 2017, Tumamana est devenu la compagnie Danseincolore. Et je me suis installé dans le Maine et Loire.

Donner la chance, transmettre, c’est le plus important pour vous ?
Oui donner c’est important. Après la vie que j’ai vécue, je ne m’attendais pas à être ce que je suis devenu aujourd’hui. On m’a ouvert les portes. Et j’ai envie de transmettre. Ce n’est pas le talent qui m’intéresse, ce sont les gens. C’est l’humain. Comment les danseurs ont vécu, comment il voient la société, comment ils voient l’autre. C’est ça qui m’intéresse dans mon métier.

Et vous aimez aussi raconter ce que vous avez vécu. Vos spectacles sont empreints d’autobiographie et de tout ce que vous avez vécu dans votre vie ?
J’aime témoigner. Et dans le dernier spectacle Réalité(s), il avec un s, car il y a plusieurs réalités dans ma vie, il y a eu beaucoup de réalités. Je ne peux pas garder ces réalités pour moi, le monde entier a besoin de les voir, malgré la violence que j’ai vécue dans ma vie, malgré la violence qu’on continue de subir jusque aujourd’hui dans nos pays.

Et cette réalité, ce sont tous ces téléphones portables, tous ces ordinateurs qui sont autour de nous, avec à l’intérieur ce minerai que vous avez extrait pendant une partie de votre vie et qui fait qu’il y a des enfants aujourd’hui qui sont contraints au travail.
C’est pour cela je crée ce spectacle. Pour prendre conscience qu’il y a des enfants exploités qui creusent, qui meurent pour extraire ce minerai. Je n’en veux pas aux gens. Ce n’est pas de leur faute, mais je souhaite éveiller les consciences.

Diriez vous que vous êtes un chorégraphe engagé ?
Oui, je suis un chorégraphe très engagé. J’ai besoin de témoigner de ce que j’ai vécu. Le public a besoin de se nourrir de ces histoires, même s’il vient parfois pour se distraire. Il a besoin de voir la vie autrement.

Propos recueillis par Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr

9 novembre 2021/par Stéphane Capron
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