Face à une équation budgétaire qui devient, mois après mois, de plus en plus insoluble, le patron du CDN Toulouse Occitanie, Galin Stoev, décide de mettre un terme de manière anticipée à son troisième et dernier mandat, et allonge la liste des directeurs qui ces dernières semaines ont décidé de claquer la porte.
Depuis mon arrivée en janvier 2018, je me suis employé à ce que le ThéâtredelaCité – Centre Dramatique National Toulouse Occitanie soit une grande maison des artistes, aux qualités et savoir-faire certains, où l’accueil des équipes puisse se faire sur-mesure, au plus près de leurs besoins. Jusqu’à présent, le CDN était le pilote, le fédérateur de dizaines de partenaires pour rêver le territoire et ouvrir des fenêtres sur l’international. Jusqu’à présent, le CDN était un lieu de vie animé et festif, ouvert à toutes et tous grâce à un large public curieux et fidèle, reflet d’un succès indéniable. Tout cela, pour moi, traduit l’essence du service public dans le domaine de la culture.
Aujourd’hui, le CDN est confronté au résultat des crises passées et présentes, au retrait de la quasi totalité des financements du Conseil départemental de la Haute-Garonne depuis avril 2024 et à la baisse lourde de la subvention de la Métropole toulousaine cette année. Cela s’aditionne aux décisions de la Région et de la DRAC Occitanie pour atteindre une baisse totale des subventions publiques de 470 000 euros dès l’exercice 2025. En conséquence, le CDN doit réguler son activité et créer toujours plus de ressources propres, au détriment de l’accessibilité au plus grand nombre. Le théâtre se retrouve à annuler La Biennale – festival international des arts vivants, ainsi que des partenariats et coréalisations avec les théâtres toulousains, ce qui créera un effet domino désastreux. Tout cela entraîne des arbitrages et décisions qui vont à l’encontre de ce qui était réalisé jusqu’à présent.
Aujourd’hui, il m’est à nouveau demandé de réécrire le projet de direction pour lequel j’ai pourtant été renouvelé il y a un an par Madame la Ministre de la culture pour mon dernier mandat janvier 2025 – décembre 2027. Il devient extrêmement difficile pour moi de repenser, pour la énième fois, les axes et les priorités des derniers 18 mois (au-delà de la saison 2025-26 qui est à ce jour finalisée et donc engagée moralement), sans que le désir ne soit altéré par une morosité généralisée. Je me retrouve donc dans la situation paradoxale de devoir faire face à une dégradation du projet tout en étant le témoin d’une disparition programmée.
Aujourd’hui, un changement de paradigme, pourtant jamais explicitement énoncé, s’installe de plus en plus dans notre quotidien, entraînant des modifications non seulement dans nos pratiques, mais aussi dans la motivation profonde qui anime les acteurs du secteur. Ainsi, la création, la recherche et l’expérimentation seraient amoindries au bénéfice de l’autofinancement voire de la rentabilité. Le problème n’est pas seulement financier ; il s’agit là d’un problème de fond qui demande un positionnement de la classe politique.
C’est pourquoi, compte tenu du contexte et du cadre imposé, je pense qu’il est plus honnête, envers le théâtre et envers moi-même, de laisser la place à une ou un nouvel artiste et à d’autres façons de faire pour un nouveau cycle. Je quitterai donc mes fonctions d’artiste-directeur du ThéâtredelaCité – CDN Toulouse Occitanie à l’été 2026. Le temps n’est pas encore aux remerciements et aux regrets, mais à la sincérité, à la responsabilité et à la décision.
Galin Stoev, Artiste-directeur
ThéâtredelaCité – Centre Dramatique National Toulouse Occitanie
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