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Gaïa Saitta, l’art de la joie malgré tout

A voir, Avignon, Best Off, Les critiques, Marseille, Paris, Rennes, Théâtre
Je crois que dehors c'est le printemps de Gaïa Saitta
Je crois que dehors c'est le printemps de Gaïa Saitta

Photo Chiara Pasqualini

Accompagnée à la mise en scène par Giorgio Barberio Corsetti, Gaïa Saitta s’empare d’une histoire tragique, celle d’Irina Lucidi, dont les deux filles disparaissent en 2011 après avoir été enlevées par leur père. En prenant avec délicatesse le public pour partenaire, elle fait de ce fait divers le point de départ d’une reconquête de la joie, et du jeu. À découvrir à Avignon au Théâtre des Doms, avant la reprise de sa tournée, notamment à Paris au Théâtre du Rond-Point.

C’est une femme rayonnante, une personne dont la voix chaude installe d’emblée un climat d’amitié qui nous accueille. À sa manière méticuleuse de placer les spectateurs au fur et à mesure de leur entrée, demandant à certains de prendre place sur des chaises disposées au plateau et requérant leur aide pour ce qui va suivre, on comprend toutefois que cette gaieté apparente ne va pas de soi. On devine que pour vraiment conquérir cette légèreté qu’elle affiche, il lui faudra aller jusqu’au bout du rituel qu’elle met en place. Incarnée par la comédienne Gaïa Saitta, Irina Livina fête son anniversaire dans Je crois que dehors c’est le printemps. Les membres du public sont les convives de cette cérémonie dont l’enjeu dépasse largement la simple victoire sur le temps qu’elle met d’habitude en scène. Dès cette introduction, où plane l’ombre des Trois sœurs de Tchekhov, dont l’une des trois protagonistes centrales s’appelle également Irina, l’actrice italienne, qui cosigne aussi la mise en scène avec Giorgio Barberio Corsetti, réussit à faire de la scène un espace où le jeu entretient un rapport étroit avec la vie.

Grâce à son dispositif tout simple, Gaïa Saitta place au cœur de sa pièce les différentes relations qui font le théâtre. En réduisant, en bouleversant les distances entre l’interprète et metteure en scène et le spectateur, entre l’actrice et son personnage ou encore entre réalité et fiction, l’artiste aborde le fait divers qui l’intéresse sous un angle tout sauf sensationnel. La tragédie d’Irina ne se révèle d’ailleurs que lentement, au gré d’une parole qui forme des cercles autour d’une douleur encore vive plus de dix ans après : celle que provoque chez cette mère la disparition de ses filles, les jumelles Alessia et Livia, en janvier 2011. Adapté du roman Mi sa che fuori è primavera (Je crois que dehors c’est le printemps) de la journaliste et écrivaine italienne Concita De Gregorio, le texte de Gaïa Saitta est à la fois fragmentaire et fluide. Il évolue par l’anecdote, le récit bref, mais est aussi porté par un souffle continu, une urgence.

C’est en entretenant ce double mouvement tout au long de l’heure et demie que dure sa pièce, et en restant en suspens entre expression de la joie et du désespoir, que la comédienne nous mène au-delà de l’horreur. Non pas pour autant dans la lumière, mais dans la zone intermédiaire qui n’est autre que notre lot commun. Dans une langue très simple, directe, Irina dit à travers Gaïa sa rencontre avec Matthias et les débuts d’une relation qui de son côté n’est pas amoureuse, mais belle tout de même, suffisamment pour accepter l’enfant qui vient quelques temps après. Ou plutôt les deux enfants, des jumelles. Puis, après un court, presque imperceptible silence, elle dit son désir d’aller mieux, sa surprise de l’amour qui revient. Demandant à l’un de ses spectateurs volontaires d’incarner muettement la psychanalyste qu’elle voyait avec son mari, elle raconte le changement de comportement de celui-ci, sa manie des post-it. Elle décrit avec précision, en élevant à peine la voix, les petites feuilles jaunes posées partout dans la maison pour lui dire comment utiliser tel appareil, comment habiller les filles… Et puis il y a l’enlèvement des enfants par le père, le suicide de celui-ci et l’un de ses derniers messages : « Tu ne les reverras plus. Elles reposent dans un endroit tranquille ».

Cet aller-retour constant entre les choses belles, apaisées du présent et celles, douloureuses, du passé, place le public dans une situation d’enquête. Il crée une attention aigüe au mot autant qu’aux silences qui les séparent, dans lesquels Gaïa Saitta laisse subtilement, par un geste ou un sourire, s’exprimer ce qui la relie à Irina : une forme de reconnaissance. Le fait divers, dans Je crois que dehors c’est le printemps, est ainsi une manière de donner l’air de rien une réponse possible à la question complexe de la nature du jeu. L’artiste l’admet d’ailleurs d’une jolie manière une fois révélé le gros de la tragédie : grâce à un jeu d’ombres, elle laisse Irina dans un coin de scène pour prendre la parole en tant qu’autrice, metteure en scène et actrice de la pièce.

En évoquant sa rencontre – réelle ou imaginaire, nous ne saurons pas – avec Irina Livina, et en formulant son admiration devant la force de vie, de reconstruction de cette mère à jamais endeuillée, Gaïa Saitta met en évidence ce que l’on ressent tout au long de son monologue et qui fait beaucoup à sa profondeur : sa croyance dans le pouvoir du théâtre à réparer, à rassembler des personnes et des expériences éloignées. Autant qu’Irina, c’est alors Gaïa que l’on rencontre ici. L’occasion est précieuse : travaillant comme interprète entre Italie, en France et Belgique avec des metteurs en scène comme Giorgio Barberio Corsetti qui l’accompagne ici, Anatoli Vassiliev ou encore Mikaël Serre, elle n’est guère connue chez nous pour son travail personnel. C’est donc de deux femmes bien vivantes que cette pièce pleine de morts fait le portrait.

Anaïs Heluin – www.sceneweb.fr

Je crois que dehors c’est le printemps
Texte Concita De Gregorio
Mise en scène Gaïa Saitta et Giorgio Barberio Corsetti
Avec Gaïa Saitta
Adaptation théâtrale Gaïa Saitta
Scénographe Giuliana Rienzi
Costume Frédérick Denis
Créateur lumières Marco Giusti
Créateur son Tom Daniels
Vidéo Igor Renzetti

Coproduction Théâtre National Wallonie-Bruxelles, Les Halles de Schaerbeek, If Human, Le Manège – Scène Nationale de Maubeuge
Avec le soutien de la COCOF

Durée : 1h30

Festival d’Avignon OFF
Théâtre des Doms
du 6 au 27 juillet à 11h30, relâche les 5,12 et 19

Théâtre du Rond-Point, Paris
du 3 au 15 octobre 2023

Théâtre Joliette, Marseille
du 23 au 25 janvier 2024

Théâtre national de Bretagne, Rennes
du 6 au 10 février 2024

Mamer, Kinneksbond, Luxembourg
le 15 mars 2024

Théâtre de Namur, Belgique
du 19 au 30 mars 2024

10 juillet 2023/par Anaïs Heluin
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1 réponse
  1. Billon michel
    Billon michel dit :
    12 juillet 2023 à 13 h 09 min

    Gaïa
    Que dire quand on a été ton élève on reconnaît tout tonTalent mais aussi ta gentillesse, ton amour pour les belles choses …
    Je te souhaite pleins de belles choses … et surtout de te revoir et te serrer dans mes bras !
    Michel

    Répondre

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