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Avec « Fusées », Jeanne Candel nous met en orbite

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Jeanne Candel crée Fusées au Théâtre de l'Aquarium
Jeanne Candel crée Fusées au Théâtre de l'Aquarium

Photo Jean-Louis Fernandez

Il n’y a pas d’âge pour se délecter de la dernière création de Jeanne Candel, Vladislav Galard, Jan Peters, Sarah Le Picard et Claudine Simon qui s’adresse autant à tous les publics, dès 6 ans, qu’à nos rêves d’enfants et à nos vieilles âmes. Fusées est une pépite burlesque et mélancolique qui place le théâtre au centre de l’univers.

Au début, il y avait un plateau nu, et rien dessus. Le vide, le néant, sur lequel plane notre attente, grande, fébrile, notre impatience et notre joie juvénile à découvrir la nouvelle création de Jeanne Candel en son fief du Théâtre de l’Aquarium, au fond des bois de la Cartoucherie de Vincennes. Parfois, on croit qu’il ne se passe rien, mais l’air est déjà chargé de l’électricité de notre curiosité. Puis, à cour, une porte s’ouvre laissant entrer un faible halo de lumière et un piano droit, noir, ouvert à tous les vents, éclairé de l’intérieur, joué et déplacé à la force des bras jusqu’au centre de la scène. Synthèse visuelle et sonore d’une démarche artistique qui depuis des années traque la musique dans le théâtre, et vice versa, le mouvement des deux l’un vers l’autre, l’un contre l’autre, l’un au coeur de l’autre. Une dialectique que Jeanne Candel ne cesse d’explorer dans des créations sensitives, imprévisibles et pénétrantes échappant à toute modalité classique et calibrée du spectacle dit « musical ».

Avec Fusées, c’est une première. La metteuse en scène élargit le spectre de sa recherche au tout public et le résultat est sidérant. Comme si dans cette ouverture à l’enfance, l’artiste trouvait une liberté nouvelle, ou du moins accrue, un élan, une espièglerie, une amplitude du geste, certes déjà à l’œuvre dans ses précédentes créations, mais exacerbés. Le quatuor qu’elle confronte au plateau, les thématiques qu’elle explore, le ton qu’elle se permet, la mécanique scénique qu’elle affute, le déploiement de son écriture, le jeu sur le microcosme et le macrocosme, l’humour et la tendresse de son regard, la fantaisie de son imaginaire, tout est saisissant de maîtrise et farouchement débridé à la fois. C’est un théâtre ingénieux, artisanal et bricolé, fait main et fait maison, fabriqué à plusieurs – les interprètes étant, comme souvent, co-créateurs –, le contraire d’un produit manufacturé. Une pépite qui provoque l’hilarité de la salle et touche toutes les générations avec une générosité confondante.

Apparemment inspiré par un film allemand des années 1990 intitulé Out of the present – mais nul besoin d’avoir la référence pour entrer pleinement dans l’histoire –, le spectacle nous entraine depuis la création du monde jusqu’à la conquête spatiale au long d’un raccourci absolument réjouissant qui compacte l’espace et le temps, et fait de la boîte noire du théâtre le lieu où s’écrit l’Histoire de l’humanité, le lieu prophétique où tout commence. Ce prologue est un moment d’anthologie, un hommage à l’art dramatique dans sa forme la plus enfantine et dépouillée, où nos quatre interprètes, figures pittoresques et cabossées, réunies autour d’un castelet, rejouent la création du monde avec le peu qu’ils ont à disposition. Une machinerie miniature avec soufflerie et poulies, un petit théâtre évoquant les maquettes d’antan, qu’activent nos estropiés de la vie, infirmes grandioses et bras cassés célestes, tout entiers concentrés pour nous résumer avec les moyens du bord l’avant et l’après big-bang, la valse des planètes, le mystère des trous noirs et l’attrait de l’homme pour le lointain, l’ailleurs, l’inaccessible étoile.

Aussi poétique qu’hilarante, cette entrée en matière est un tour de force et annonce le climat de la suite, le décollage épique de deux cosmonautes en chaussettes – inénarrables Vladislav Galard et Jan Peters, jumeaux scéniques et opposés en personnalité. Duo burlesque à souhait qui emporte l’adhésion flagrante du public conquis par leurs numéros de tabouret aussi gracieux que désopilants. Nos deux aventuriers du cosmos cohabitent tant bien que mal à bord d’Hermès 33, reliés à la Terre-Mère par un tiers, personnage multifacettes que joue Sarah Le Picard avec cette facétie qui lui est propre. Échos de celles et ceux qui communiquent avec eux depuis la tour de contrôle et voix de l’ordinateur qui les accompagne dans leur périple, elle est le trait d’union entre les hautes sphères spatiales et la planète bleue, source de conseils rationnels autant que de questions terre à terre. Elle est la voix du bon sens et de la raison tandis que dans la cabine du vaisseau la santé mentale des deux coéquipiers s’effrite et la loufoquerie s’invite. Alors que l’un sombre dans la mélancolie, l’autre semble planer dans un univers parallèle où rien ne l’atteint vraiment.

Tout ici tient dans la présence et le jeu des acteurs, à la fois concrets et lunaires, burlesques et habités, dans le détournement d’objets familiers et l’usage incongru des instruments de musique. Le mouvement des corps est une invitation à croire à l’apesanteur dans laquelle ils évoluent tandis que les chants, en français, en anglais ou en allemand, ont des airs de berceuses interstellaires où les registres s’entrechoquent comme des météorites. De Tom Waits au répertoire classique, le bain musical imprègne la partition théâtrale et les références visuelles nous font voyager de 2001, l’Odyssée de l’espace à la peinture italienne, dans une allégresse visuelle et sonore roborative. Fusées place humains et animaux au même niveau. Le spectacle convoque aussi bien la petite chienne Laïka, premier être vivant envoyé dans l’espace, que La Planète des singes ou les oiseaux dialoguant avec Saint François d’Assise dans la fresque florentine de Giotto, humaniste éclairé, précurseur de la Renaissance, qui place l’humain au centre de l’univers.

C’est un théâtre humble, humaniste et éthique, ramassé dans une courte durée, qui s’épanouit dans ses contraires : pauvreté (des moyens et des matériaux) et richesse (de l’imagination et du propos), trivialité et transcendance, nature et culture, fantaisie et mélancolie. Un théâtre érudit et populaire qui emporte l’adhésion du public, happé par sa puissance évocatrice, sa force expressive, son humour bon enfant. La boîte noire devient le lieu d’un imaginaire cosmique qui défie les lois de la raison et appelle dans sa matrice l’immensité de l’univers. Il n’y a pas d’âge requis pour savourer cette expérience intergalactique qui s’adresse autant à nos rêves d’enfants qu’à notre solitude d’adulte. À nos mystères, à nos abymes et à nos bosses. Et c’est miraculeux.

Marie Plantin – www.sceneweb.fr

Fusées
Une création tout public à partir de 6 ans de Jeanne Candel, Vladislav Galard, Sarah Le Picard, Jan Peters et Claudine Simon
Mise en scène Jeanne Candel
Avec (au Théâtre de l’Aquarium) Vladislav Galard, Sarah Le Picard, Jan Peters, Claudine Simon
Avec (en tournée) Margot Alexandre, Jan Peters, Marc Plas, Claudine Simon
Scénographie Jeanne Candel
Régie générale et construction du décor Sarah Jacquemot-Fiumani
Toile peinte Marine Dillard
Lumières et régie générale Vincent Perhirin
Costumes Constant Chiassai-Polin
Regard extérieur en tournée Juliette Navis

Production la vie brève – Théâtre de l’Aquarium
Coproduction : TJP, CDN de Strasbourg – Grand Est ; Bonlieu, Scène nationale d’Annecy ;
Malraux, Scène nationale Chambéry – Savoie ; Théâtre du Bois de l’Aune, Aix-en-Provence
Avec le soutien du Centre National de la Musique et de la SPEDIDAM

Durée : 50 minutes

Vu en septembre 2024 au Théâtre de l’Aquarium, Paris

Théâtre de la Commune, Aubervilliers, dans le cadre du Pavillon Jeune Public Super Super
du 6 au 9 novembre

Théâtre Garonne, Toulouse
du 18 au 21 décembre

Malraux, Scène nationale Chambéry – Savoie
les 9 et 10 janvier 2025

Théâtre du Bois de l’Aune, Aix-en-Provence
les 30 et 31 janvier

Bonlieu, Scène nationale d’Annecy
du 5 au 7 février

T2G, Théâtre de Gennevilliers – CDN
du 12 au 15 février

1 novembre 2024/par Marie Plantin
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