Molière de la révélation théâtrale pour Est-ce que j’ai une gueule d’Arletty ? en 2020, la comédienne Elodie Menant est en lice aux Molières 2023 dans la catégorie meilleure autrice/auteur de l’année pour Je ne cours pas, je vole !. Trois autres autrices sont en lice, Aïda Asgharzadeh pour Les Poupées persanes, Léonore Confino pour Le Village des sourds et Mélody Mourey pour Big Mother. Ainsi que Ivan Calbérac pour Glenn, naissance d’un prodige et Joël Pommerat pour Amours (2). 4 autrices pour 2 auteurs, signe d’un renouvellement dans le théatre français, dont se réjouit Elodie Menant.
Diriez-vous que les choses avancent dans le milieu du théâtre en terme de parité ?
C’est toujours une question que je me pose : « Est ce que c’est vraiment un conditionnement social ou pas ? » C’est vrai qu’on m’a beaucoup poussé à faire des maths. Et puis au final, je me suis mise à écrire. En prépa scientifique que je n’étais qu’avec des garçons, alors qu’en prépa littéraire il n’y avait principalement que des filles et beaucoup moins de garçons. Je ne sais pas s’il y a une appétence naturelle ou pas en fonction de ce qu’on est ou si cela dépend du conditionnement social ? Mais aujourd’hui, c’est formidable de pouvoir se dire qu’il y a autant de femmes qui écrivent. L’idéal, c’est qu’il y ait une vraie égalité et que l’on reconnaisse la qualité de chacun pas forcément en fonction du sexe. Si la personne a du talent, c’est très bien. Homme ou femme. Ce qui compte pour moi, c’est l’égalité des chances.
On a le sentiment que les autrices sont plus curieuses et qu’elles prennent plus de risques. Votre pièce parle du sport, un thème fort peu abordé au théâtre.
D’ailleurs, on m’avait fortement déconseillé de faire une pièce autour du sport au théâtre ! On me disait que le public du sport n’est pas du tout le même que celui du théâtre. On démontre l’inverse et qu’il y a un intérêt car la pièce est un succès. Je ne sais pas si c’est parce que je suis une fille que j’ai voulu écrire sur ce thème. C’est vrai que les quatre filles nommées traitent de sujets souvent engagés, décalés. Peut être que l’on cherche une autre originalité, en effet. Alors moi, je ne le fais pas forcément pour me différencier. Je choisis vraiment des thèmes qui me touchent et qui me semblent intéressants de mettre en scène. J’ai envie d’essayer de faire autre chose de ce qu’on l’a déjà pu voir souvent au théâtre, sinon c’est extrêmement ennuyeux !
Ce qui vous relie aussi toutes les quatre, c’est une forme de narration. Votre génération est aussi celle qui a grandi avec les séries qui tournent en boucle sur les plateformes. Et cela permet de toucher aussi un public plus jeune.
Oui, j’ai très envie de rendre universel le théâtre. Et il est vrai que souvent, quand on parle aux jeunes, ils ont souvent l’impression que c’est poussiéreux et que l’on va s’ennuyer. Notre génération porte cette envie de mettre du dynamisme sur scène. Que les spectateurs sortent en se disant : « Ouah, on en a vu un voyage, ça nous a transportés, c’était intense en émotion et et on ne s’est jamais ennuyé. Et en plus, ça nous a surpris. On n’aurait jamais imaginé pouvoir voir ça sur scène, avoir plusieurs personnages, un comédien qui joue plusieurs personnages, des tas de lieux différents ». On oublie l’unité de lieu, l’unité de temps, on s’amuse, on est des enfants sur une scène !
Votre spectacle est nommé dans la catégorie théâtre public parce qu’il a été présenté au Rond-Point, mais il est produit par votre compagnie et Théâtre Actuel, la production est donc 100% privée. Votre génération fait aussi le pont entre le public et le privé ?
Oui et j’en suis très heureuse. Au départ j’avais essayé de contacter des théâtres publics, des CDN. On m’avait fermé les portes, il y a eu une forme de mépris qui a été assez difficile à vivre. Et puis, Jean-Michel Ribes a eu la gentillesse de venir nous voir alors qu’il ne me connaissait pas. Comme on avait reçu le prix SACD, un producteur lui avait parlé de la pièce et il nous a programmés. J’ai mis six ans à monter ce spectacle. C’était très long et très compliqué. Et puis le miracle est arrivé, un cadeau de la vie. Le théâtre, c’est le théâtre, qu’il soit privé ou public. Il y a des mauvaises choses dans les deux et il y a des choses merveilleuses dans les deux.
Laisser un commentaire
Rejoindre la discussion?N’hésitez pas à contribuer !