La pièce est le récit par Ella de sa vie : rejetée par son père qui la donne en mariage, à vingt- et-un ans, à un marchand de bestiaux qui en a quarante-neuf et qui vit déjà avec une autre femme dont il a cinq enfants, elle donne naissance à son fils Josef. Brutalisée par son mari, persécutée par sa belle-famille, croulant sous le travail, elle commence une descente aux enfers qui la mènera de l’hôpital psychiatrique à la prison en passant par toutes les cases de la déchéance sociale et morale, pour finir chez sa sœur qui l’héberge dans le poulailler avec son fils, sa cafetière et son téléviseur.
L’auteur s’est attaqué d’abord à l’écriture et aux bases de la fable théâtrale, avant de nous toucher sur un plan plus intime : comment se fait-il que nous puissions encore supporter une telle misère ? Le mal de l’époque à l’heure où l’hostilité envers les pauvres s’exprime de plus en plus ouvertement en France, jusqu’à créer la « pauvropho- bie » ? Que soixante-deux personnes possèdent autant que la moitié la plus pauvre de la population mondiale. Mais aussi que des milliers de migrants vivent sur notre territoire parqués en des camps dans des conditions inhumaines. Le sang du pauvre finit dans le bras du riche. Et alors, Michelet le disait, quand l’Etat est défaillant, les sorcières apparaissent.
Achternbusch, « l’anarchiste bavarois », avait senti venir le vent mauvais. Il a créé, pour porter la parole de ces sans-parole, Ella, persona non grata, figurante d’une pièce qui se joue sans elle. Ce qui reste, c’est cette voix dépossédée mais non domestiquée, et qui, par la force de la catharsis théâtrale, rend vie à ce qui était mourant, pour faire de cette femme-totem le réceptacle en creux de toutes les rages de vivre. Ella ne peut pas garder le silence. Nous sommes des créatures condamnées à la parole. La parole nous tient debout. Quel murmure se lèvera de ce qui n’a pas de nom ? Note d’intention d’Yves Beaunesne
Ella
texte Herbert Achternbusch
mise en scène Yves Beaunesne
texte français et dramaturgie Marion Bernède
avec Clotilde Mollet, Camille Rocailleux
scénographie Damien Caille-Perret
lumières Nathalie Perrier
création musicale Camille Rocailleux
création costumes Jean-Daniel Vuillermoz
assistanat à la mise en scène Marie Clavaguera-Pratx et Clara Farge
production La Comédie Poitou-Charentes – CDN coproduction La Coursive – Scène Nationale de La Rochelle
avec le soutien de la Drac Poitou-Charentes, de la Région Nouvelle-Aquitaine et de la Ville de Poitiers
en partenariat avec Le Théâtre d’Angoulême – Scène Nationale spectacleFévrier 2018
26 > 28 La Coursive – Scène nationale, La RochelleMars 2018
12 et 13 TAP – Théâtre Auditorium de Poitiers au Centre d’Animation de Beaulieu, Poitiers
16 Le Gallia Théâtre – Scène conventionnée, Saintes
21 et 23 puis 26 > 29 Théâtre d’Angoulême – Scène Nationale, Angoulême
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