Dans ce documentaire de Jean-Stéphane Bron l’Opéra de Paris se dévoile comme jamais des coulisses aux ateliers, des studios au bureau de la direction. Captivant.
La scène est appelée à devenir quasi culte : la caméra du réalisateur suisse Jean-Stéphane Bron saisit le nouveau directeur de l’Opéra de Paris Stéphane Lissner en plein brainstorming avec son équipe de communication. Il faut évoquer la saison à venir, les tarifs -qui font grincer des dents- et bien sûr le ballet. « La meilleure compagnie du monde » lâche Lissner. « On ne dit plus ça ! » lui répond un de ses collaborateurs. « Ah bon ?« . Fin du dialogue. L’image est furtive mais elle révèle l’intimité de Bron avec son sujet l’Opéra de Paris, son directeur et ses centaines de « figurants ». Et ce alors que le réalisateur ne connaissait rien à cette maison de spectacles, une des plus filmées au monde. Il n’est pas un candide au pays des étoiles et des ténors mais un observateur attentif et passionné. Il a passé une année en 2015 sur place entre Bastille et Garnier.
De la production événement de Roméo Castellucci Moïse et Aaron -avec sa star XXL le désormais célèbre Easy Rider taureau de plus d’une tonne- au départ surprise de Benjamin Millepied de la direction de la danse Jean-Stéphane Bron est là encore et toujours. Dans son objectif on découvre un jeune chanteur lyrique venu de l’Est et émerveillé par la machine Opéra de Paris, des enfants joueurs participant à l’opération Dix mois d’école, une star Jonas Kaufmann et un chœur un rien récalcitrant. Il y a du suspens aussi comme dans cette longue séquence où le staff de Bastille part à la recherche d’une voix pour palier un désistement sur la distribution d’un opéra de Wagner.
Paradoxalement la danse, son corps de ballet, ses traditions sont peu présents à l’image. On sent ainsi Millepied un rien sur la réserve – ou sur le départ ?-… « Frederick Wiseman avait dévoré le territoire de la danse, à Garnier, et brillamment (avec son film La Danse en 2009); je savais que je me dirigerai moins sur ce terrain déjà si souvent représenté, que j’irai plutôt vers l’opéra et la musique, du côté de Bastille. » avoue d’ailleurs avec clairvoyance le réalisateur de L’Opéra. Dommage néanmoins que son film passe ainsi à côté de cette belle compagnie de danse et son lot de personnalités.
Mais la vraie vedette du film, outre les équipes en tout genre, reste Stéphane Lissner saisi sous toutes les coutures. C’est parfois grandiloquent lorsque le directeur seul dans son bureau regarde la place de la Bastille. Plus touchant lorsqu’il s’adresse a ses artistes juste après les attentats parisiens. On aimerait être dans la tête de Lissner pour savoir ce qu’il pense de ce rôle (de composition ?). Enfin on rit souvent devant cette réalisation ce qui n’est pas la moindre de ses qualités. Les amateurs et les habitués des lieux découvriront sans doute des détails nouveaux, les autres risquent de trouver l’Opéra de Paris toujours aussi inaccessible. L’Opéra n’en demeure pas moins un portrait sensible.
Philippe Noisette – www.sceneweb.fr
L’Opéra film de Jean-Stépahne Bron, image Blaise Harrison, montage Julie Lena ( France/Suisse)
en salles le 5 avril
Laisser un commentaire
Rejoindre la discussion?N’hésitez pas à contribuer !