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Dans la fabrique théâtrale de François Tanguy

À la une, Festival d'Avignon, Théâtre
François Tanguy
François Tanguy

Photo Claudine Doury / Agence VU

Malgré le décès de son capitaine, le Théâtre du Radeau poursuit sa route et présente ses deux ultimes pièces, Item et Par autan, au Festival d’Avignon. L’occasion de se replonger dans La voix sur l’épaule / Dans les passées de François Tanguy, où, interrogée par Olivier Neveux, Laurence Chable dessine les contours de l’oeuvre et de la pensée de cet artiste à nul autre pareil.

Le 7 décembre 2022, le décès de François Tanguy prend tout le monde par triste surprise. Alors qu’il s’apprêtait à présenter sa dernière oeuvre, Par autan, au T2G dans le cadre du Festival d’Automne à Paris, le Théâtre du Radeau se voit brutalement privé de son capitaine. Cette disparition soudaine aurait pu signifier la fin d’une aventure longue de plus de 40 ans, mais les membres de l’équipage, emmené par Laurence Chable, gardent le cap envers et contre tout. Si aucune création ne verra plus le jour, la troupe mancelle décide de faire vivre ses deux ultimes et sublimes pièces, Item et Par autan, de les emmener sur les routes de France afin que le geste si singulier de François Tanguy puisse continuer à exister, et surtout à rencontrer de nouveaux regards, notamment ceux des jeunes générations qui n’auraient pas encore eu la chance de croiser sa route. Alors qu’il n’avait plus eu cet honneur depuis Ricercar, en 2008, le Radeau poursuit cette année son chemin au Festival d’Avignon, où il présente successivement les deux « spectacles » en question – un terme que François Tanguy se refusait à employer pour parler des fruits de son travail – au Gymnase du Lycée Mistral. Une belle occasion de se replonger dans un livre paru il y a quelques mois dans la stimulante collection Méthodes des Éditions Théâtrales : La voix sur l’épaule / Dans les passées de François Tanguy. Un ouvrage en forme de passionnant entretien au long cours entre Laurence Chable et Olivier Neveux, destiné, comme elle l’écrit elle-même en guise de préambule, à « lier, relier, délier les fenêtres de la mémoire ».

Cette mémoire, la comédienne, qui a cofondé le Théâtre du Radeau au Mans, en 1977, avant d’être rejointe par François Tanguy cinq ans plus tard, l’incarne de la manière la plus vivante qui soit. Armée de ses cahiers où, au fil des créations, elle a plus ou moins scrupuleusement consigné les pensées, indications et autres aphorismes de l’homme de théâtre, elle permet d’avoir accès, à travers une parole prudente matinée de modestie, à la fabrique théâtrale d’un artiste qui, lors de la création des Cantates en 2001, avait prévenu : « Le spectacle existe comme un acte. Je n’ai rien à dire à ce propos. Si je pouvais définir cet acte, je ne le ferais pas. » Façon, pour lui, comme toujours, d’échapper à toute tentative d’explication ou de rationalisation d’un geste qui, pendant des décennies, s’est joué des modes et du temps. Cette propension à l’échappée belle de Tanguy, Laurence Chable la conserve d’ailleurs en héritage tant, face aux questions de son interlocuteur, qui permet d’avoir accès à ce magnifique tremblement, elle ne cesse de détourner, d’interroger et de ré-interroger, de préciser et de re-préciser sa pensée afin d’être la plus juste et la moins définitive possible, à l’image du travail de l’artiste, qui, comme l’écrit Olivier Neveux, « reste et restera un bloc d’énigmes, quelle que soit sa clarté ».

Malgré tout, à travers le regard et les mots de Laurence Chable, se dessinent les contours de l’oeuvre et de la réflexion artistique d’un homme qui, s’il « n’était pas metteur en scène parce que sa manière d’accomplir, de chercher, circulait dans tellement de matières et de gestes que le terme de metteur en scène restreint », procédait par assemblage – de fragments de textes, qu’il appelait « vocable » et percevait comme autant de « glissements de terrain », de lumières, de sons, de maquillage, de costumes, d’éléments de décor et d’accessoires en tous genres, qui servaient souvent d’« intercesseurs » – pour « restituer au regard, à la perception, ce qu’elle ne sait peut-être pas d’elle-même ». Sans « méthode » pré-définie, allergique à toute volonté de « faire joli », doté d’une « capacité incroyable à ne pas se prendre au sérieux », François Tanguy apparaît alors comme un artiste qui ne cesse de creuser dans les « écarts », en se situant sur le « seuil », vu comme une frontière, mais aussi comme un espace de création, de liberté, pour faire advenir un « art qui ne restitue rien d’autre que l’éphémère, le provisoire, le précaire ». Pour ce faire, il procède grâce à un subtil mélange où se combinent réflexion et pratique – notamment de la peinture – solitaires, nourries par ses auteurs fétiches, parmi lesquels Walser, Kafka ou Dostoïevski, la musique, les films et une grande porosité au monde, et travail au plateau où, muni de son « autorité artistique », il mène une recherche de très haute précision avec ce qu’il a face à lui et sous la main, d’un simple châssis jusqu’à ses comédiennes et comédiens, tout en étant attentif au « mouvement » et ouvert à « l’accident », à cet imprévisible d’où naît le plus souvent la beauté.

Au fil de cet ouvrage, qui se referme sur quelques magnifiques écrits de Tanguy, émergent également l’histoire de la base arrière du Théâtre du Radeau, La Fonderie, la fidélité que l’artiste entretenait avec une belle bande de comédiennes et de comédiens – Erik Gerken, Frode Bjørnstad, Vincent Joly, ou de plus anciens, tels Pierre Meunier, Marie-Noëlle Genod et Jean Rochereau –, mais aussi ses multiples facettes, celles d’un homme de « combat contre l’effondrement », comme le prouve notamment son engagement lors du siège de Sarajevo, et « toujours à la recherche d’alliances, de communautés », à l’instar de son art qui cherche toujours, et plus que tout, à faire tenir des choses ensemble. Par cet univers à nul autre pareil, que certaines et certains découvriront peut-être à l’occasion du Festival d’Avignon, les spectatrices et les spectateurs sont mis à contribution, y compris jusque dans leur for intérieur. « Il me semble que le travail de François aide à se demander : qu’est-ce qu’on fabrique quand on regarde ? Et fabriquer, de sa part à lui, c’est offrir la possibilité à l’autre de saisir la fabrique, ses mouvements, et ce qui nourrit sans qu’on le sache vraiment », résume Laurence Chable. Une forme d’invitation à profiter de ce geste si unique et essentiel dans le paysage théâtral. Tant qu’il en est encore temps.

Vincent Bouquet – www.sceneweb.fr

La voix sur l’épaule / Dans les passées de François Tanguy
Conversation entre Laurence Chable et Olivier Neveux

Ouvrage publié en novembre 2024 par les éditions Théâtrales, collection Méthodes
En partenariat avec le Théâtre des 13 vents – Centre dramatique national Montpellier, avec le soutien du Centre national du livre et de l’UMR 5317 (Ihrim)

4 juillet 2025/par Vincent Bouquet
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