En 1984, la pièce de Pina Bausch – Auf dem Gebirge hat man ein Geschrei gehört (Sur la montagne, on entendit un hurlement) – est animée et agitée par « La peur de l’autodestruction qui menace l’humanité ».
Le cocasse se mêle à la frayeur et 40 ans plus tard, la pièce garde toute son acuité : les sources d’inquiétude, quant à l’avenir du monde, n’ont pas vraiment disparu.
Au printemps 1984 alors qu’elle crée Auf dem Gebirge hat man ein Geschrei gehört (Sur la montagne, on entendit un hurlement), que perçoit Pina Bausch, depuis l’ancien cinéma où répète sa compagnie, à Wuppertal, des soubresauts du monde extérieur ? Face au spectacle, la critique évoque la crainte d’un cataclysme nucléaire… deux ans avant Tchernobyl ! « La peur a toujours existé dans mes spectacles, mais auparavant elle touchait au problème de l’individu dans la société. Maintenant elle est collective. C’est la peur de l’humanité entière menacée d’autodestruction ou d’avenir sombre », confiait Pina (1). La peur, dans tous ses états, est le sujet central de cette pièce. Elle jette son ombre diffuse sur un univers de terre brune, molle, salissante, qui recouvre le plateau -une invention de Peter Pabst, scénographe de génie -; et s’incarne dans la figure d’un clown macabre, bourreau en puissance qui fait éclater l’un après l’autre, sans sourciller, des ballons gonflables qu’il tire de son slip de bain. Ogre des cauchemars de l’enfance, monstre de toutes nos peurs, sa présence narquoise ouvre le bal des agitations. Un monde torturé. Mais avec ce sens de l’ambiguïté dont Pina avait le secret, la frayeur se mêle au cocasse et les situations virent du réalisme à l’absurde. Près de 40 ans après sa création, aujourd’hui repris par le Ballet de l’Opéra de Lyon, Auf dem Gebirge hat man ein Geschrei gehört (Sur la montagne, on entendit un hurlement) n’a rien perdu de son acuité, sur une bande son où grésillent les voix de Billie Holiday, de Fred Astaire, de Gerry Mulligan, ou encore cette chanson dont le titre vaut à lui seul promesse et prière de toutes les pièces de Pina Bausch : Parlez-moi d’amour…
(1) Raphael de Gubernatis, « La gloire de Pina Bausch », Le Nouvel Observateur, 10-16 avril 1987.
Auf dem Gebirge hat man ein Geschrei gehört (Sur la montagne, on entendit un hurlement)
Direction & Chorégraphie : Pina Bausch
Scénographie : Peter Pabst
Costumes : Marion Cito
Dramaturgie : Raimund Hoghe
Collaboration musicale : Matthias Burkert
Collabotation : Hans Pop
Musique : Billie Holiday, Fred Astaire, Enrico Caruso, Boris Vian, Henry Purcell, Felix Mendelssohn, entre autresPremière mondiale: 13 mai 1984, Schauspielhaus Wuppertal
Distribution originale :
Jakob Andersen, Melanie Karen Lien, Elena Majnoni, Anne Martin, Dominique Mercy, Jan Minarik (Jean Mindo), Nazareth Panadero, Héléna Pikon, Arthur Rosenfeld, Jean-Laurent Sasportes, Janusz Subicz, Beatrice Libonati, Ed Kortlandt, Anne Marie Benati, Bénédicte Billiet, Matthias Burkert, Jean-François, Duroure, Dominique Duszynski, Josephine Ann Endicott, Lutz Förster, Kyomi Ichida, Urs Kaufmann, Silvia Kesselheim, Francis VietDirection des répétitions
Jo Ann Endicott, Jorge Puerta ArmentaAdaptation scénographie
Gerburg StoffelAdaption costumes
Petra LeidnerConseil musique
Matthias BurkertConseil son
Andreas Eisenschneider, Karsten FischerLumières
Peter Pabst, Jo VerleiChargée de production
Gertraud JohneBallet de l’Opéra de Lyon
Production Opéra de Lyon en complicité avec la Pina Bausch Foundation et Peter Pabst
Opéra de Lyon
Du 28 juin au 7 juillet 2022
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