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La Terre : une tragique partie de campagne

Coup de coeur, Les critiques, Saint-Denis, Théâtre

photo Simon Gosselin

Après son intense adaptation de L’Assommoir, Anne Barbot revient à l’œuvre romanesque de l’écrivain naturaliste Émile Zola en montant La Terre, quinzième volume de la série des Rougon-Macquart, auquel elle confère une puissance tellurique.

Si Le baiser comme une première chute (titre donné à la remarquable adaptation de L’Assommoir déjà présentée au TGP) se faisait l’évocation sombre car désespérée du monde ouvrier, La Terre du même Zola, désormais portée à la scène, s’offre comme une peinture encore plus noire et violente du monde paysan. Ancrées dans l’actualité de la seconde moitié du XIXe siècle en pleine révolution industrielle, les problématiques politiques, économiques et écologiques que soulève son dur récit ne peuvent que concerner le public d’aujourd’hui tant persiste la crise mettant à l’épreuve les travailleurs issus de la ruralité. Dans les pages du livre, comme sur le plateau de théâtre, l’éprouvant quotidien des paysans s’incarne à travers des situations, et surtout des figures, passionnantes de complexité. Si le tableau bien vivant et passionnant qui est fait de ce milieu n’est pas toujours avantageux, il fait montre d’une parfaite authenticité d’où surgit une saisissante âpreté. L’effet recherché par Zola comme par Anne Barbot à sa suite est bien de restituer, sans rien enjoliver, la langue, l’esprit et les mœurs de classes populaires invisibilisées dont la vie laborieuse et misérable se donne à voir d’abord gaiement autour d’une longue table en bois où, dans l’allégresse, on joue aux cartes, trinque au cidre, et surtout devise abondamment ; puis avec force rugosité, voire même avec une crudité primitive, dont les femmes surtout font les frais.

Le décor est un corps de ferme qui sent bon l’odeur du foin. Les personnages sont des travailleurs agricoles, tous membres d’une même famille, auxquels s’ajoute, Jean Macquart, très fin Wadih Cormier en gringalet parisien considéré comme l’étranger, et qui pourtant entonnera un chant vibrant de révolte prenant pleinement parti pour les paysans qu’il exhorte à faire grève. Le vieux père Fouan, patriarche imposant et bon vivant, annonce vouloir se retirer et partager ses terres entre ses trois enfants : Fanny, mariée à un propriétaire terrien et homme de loi dont la prospérité est autant jalousée que moquée, Hyacinthe surnommé Jésus-Christ, un épicurien affranchi de toute aliénation sauf celle de la boisson, et enfin Joseph dit Buteau, mauvais bougre bourru, agressif, immoral, obsédé par l’inégalité dont il se croit victime. Leur âpre existence se place sous le signe du travail acharné comme de l’appât du gain. Ainsi, ils se déchirent autour de la valeur de leurs lopins de terre comme ils s’écharpent au sujet des profondes mutations de leur société, à savoir le progrès technique qui suscite autant de raillerie hostile que d’enthousiasme parfois hâtif. La mécanisation, promesse de travailler moins pour produire plus, fait débat. La concurrence étrangère et la faillite se présentent comme des menaces de poids pour leur propre économie. Convaincus de pouvoir s’en sortir en se tuant à la tâche, ils finissent par tout perdre.

Le spectacle fait plonger dans l’intimité des personnages où l’union, la tendresse et l’extrême volonté cèdent vite la place à la fatigue, le conflit et la douleur. Une belle vitalité mais aussi une insoutenable violence transpirent dans le rapport entre les êtres jusqu’à s’imprimer dans les corps, vigoureux et exténués. Anne Barbot va à l’essentiel dans un geste brut et brutal, presque bestial, non dépourvu d’empathie mais qui refuse la joliesse, le maniérisme, au service du dramatisme de son propos. Déjà observée dans son premier opus zolien, la grande qualité de son travail de metteuse en scène et de directrice d’acteurs est que tout paraît impeccablement juste et bouleversant, car porté avec une véhémence physique et émotionnelle par une troupe d’acteurs épatants (Philippe Bérodot, Benoît Dallongeville, Ghislain Decléty en tête).

Christophe Candoni – www.sceneweb.fr

La Terre d’après Zola
Par Anne Barbot
Avec Milla Agid, Philippe Bérodot, Benoît Carré, Wadih Cormier, Benoît Dallongeville, Ghislain Decléty, Rébecca Finet, Sonia Georges
ADAPTATION Anne Barbot, Agathe Peyrard
COLLABORATION ARTISTIQUE Richard Sandra
DRAMATURGIE Agathe Peyrard
SCÉNOGRAPHIE Camille Duchemin
LUMIÈRE Félix Bataillou
SON Mathieu Boccaren
COSTUMES Gabrielle Marty
CONSTRUCTION DU DÉCOR Atelier du Théâtre Gérard Philipe

Production Compagnie NAR6.
Coproduction Théâtre Gérard Philipe, centre dramatique national de Saint-Denis ; Le Nest – centre dramatique national de Thionville ; Théâtre Romain Rolland – scène conventionnée, Villejuif ; Les Passerelles – scène de Paris-Vallée de la Marne, Pontault-Combault ; EMC91 – Saint-Michel-sur-Orge ; Fontenay-en-Scènes, Fontenay-sous-Bois.
Avec le soutien du ministère de la Culture (DRAC Île-de-France).
La compagnie NAR6 est conventionnée par le Conseil départemental du Val-de-Marne et reçoit l’aide à la permanence artistique et culturelle de la Région Île-de-France.
La compagnie NAR6 remercie toutes les agricultrices et tous les agriculteurs rencontrés au cours de sa recherche.

durée : 2h20

Du 29 février au 4 mars
Théâtre Romain Rolland, Villejuif

du 6 au 21 mars 2024
TGP Saint-Denis
du lundi au vendredi à 20h, samedi à 18h, dimanche à 15h30,
relâche le mardi

5 avril
Espace Marcel Carné, Saint-Michel-sur-Orge

3 mai
Théâtre Châtillon-Clamart

8 mars 2024/par Christophe Candoni
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