Dans Angelus Novus créé à Strasbourg et donné à la Colline avant une longue tournée, le metteur en scène Sylvain Creuzevault multiplie les inspirations, à commencer par Paul Klee et Walter Benjamin, et orchestre un touffu et confus fatras théâtral d’après le mythe de Faust.
A l’inverse de Faust qui pactise avec le diable et vend son âme pour devenir quelqu’un d’autre, les savants contemporains que met en scène Angelus Novus cherchent à devenir eux-mêmes en se laissant guider par de bizarres anges ou démons intérieurs, une sorte de doubles, de bonnes ou mauvaises consciences à l’image de Baal Seigneur des mouches qui ouvre la pièce, chemise tachée de sang et chevelure blondie à l’acide, l’air franchement hébété. A travers le trio déjanté que forment un docteur en neurologie, une Prix Nobel de biologie et un compositeur et chef d’orchestre d’avant-garde, politiquement engagé à gauche qui rêve de présidentielle, Sylvain Creuzevault veut interroger la place et la valeur accordées au savoir dans une société marchande comme la nôtre.
Avec cette dernière création de grande ampleur, Sylvain Creuzevault cherche à élargir, amplifier, son geste artistique en lorgnant vers le théâtre « grand format » d’un Mathias Langhoff ou d’un Vincent Macaigne. Angelus Novus est d’une durée conséquente. Sa forme est aussi foisonnante que décousue ; elle comprend même un mini opéra incorporé. Sa scénographie monumentale et mobile recycle des pans de murs et de toiles empruntés à de vieux décors de l’équipe de François Tanguy qui saturent l’espace autant qu’ils l’envoient valser. Le propos, à la fois politique, économique, social, philosophique est débordant et disparate, parfois drôle, hilarant même, souvent lassant. Il y est question d’insurrections et d’actions salutaires. En brassant quantité d’idées et de propositions, toutes mises sur le même plan, la représentation passe mal. Elle s’embourbe. Et ce, malgré le talent d’excellents comédiens et performeurs, camarades de jeu extrêmement vaillants et persuasifs, fidèles complices pour certains depuis Notre Terreur, Le Père Tralalère et Le capital et son singe. Ils développent en collectif un style de jeu et d’écriture basé sur l’improvisation et font preuve d’une invention vive et électrisante.
S’il y a quelque chose de faustien dans le spectacle, c’est son caractère inachevé, inaccompli, revendiqué comme une recherche, une quête constante et totalement foutraque. Pris au piège d’un rêve de grandeur et d’un impossible salut, Sylvain Creuzevault n’a, pour convaincre, pas assez chassé de démons.
Christophe Candoni – sceneweb.fr
ANGELUS NOVUS AntiFaust
Mise en scène Sylvain Creuzevault
Avec Antoine Cegarra, Éric Charon, Pierre Devérines, Évelyne Didi, Lionel Dray, Servane Ducorps, Michèle Goddet, Arthur Igual, Corinne Jaber, Frédéric Noaille, Amandine Pudlo et Alyzée Soudet
Musique Pierre-Yves Macé
Son Michaël Schaller
Peinture Camille Courier de Méré
Scénographie Jean-Baptiste Bellon
Lumière Nathalie Perrier
Vidéo Gaëtan Veber
Masques Loïc Nébréda
Costumes Gwendoline Bouget
Production Le Singe
Coproduction Théâtre National de Strasbourg, La Colline – théâtre national, Festival d’Automne à Paris, La Filature – Scène nationale de Mulhouse, MC2: Grenoble – Scène nationale, Le Printemps des comédiens, Théâtre Dijon-Bourgogne, Le Quai – Nouveau Théâtre d’Angers, La Comédie de Valence – Centre dramatique national
Avec le soutien de la DGCA du ministère de la Culture et de la Communication
Avec la participation artistique du Jeune Théâtre National
Avec le soutien de La Fonderie au Mans
Création le 23 septembre 2016 au Théâtre National de Strasbourg
Durée: 3h30Strasbourg du 23 septembre au 9 octobre 2016 – TNS
Toulouse du 18 au 21 octobre 2016 au Théâtre Garonne – Scène européenne
Paris du 2 novembre au 4 décembre 2016 à La Colline – théâtre national, dans le cadre du Festival d’Automne
Nogent-sur-Marne le 10 décembre 2016 à La Scène Watteau
Cergy-Pontoise les 15 et 16 décembre 2016 à L’Apostrophe – Scène nationale
Dijon du 21 au 25 mars 2017 au Théâtre Dijon-Bourgogne – Centre dramatique national
Bonlieu les 30 et 31 mars 2017 à la Scène nationale d’Annecy
Valence du 5 au 7 avril 2017 à La Comédie de Valence – Centre dramatique national Drôme Ardèche
Grenoble du 11 au 14 avril 2017 à la MC2: Grenoble – Scène nationale
Perpignan les 20 et 21 avril 2017 à L’Archipel – Scène nationale
Mulhouse du 26 au 28 avril 2017 à La Filature – Scène nationale
Angers les 4 et 5 mai 2017 au Nouveau Théâtre d’Angers – Centre dramatique national Pays de la Loire
Tarbes du 10 au 11 mai 2017 au Parvis – Scène nationale Tarbes Pyrénées
Montpellier en juin 2017 au Printemps des comédiens
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