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Amer Khalil : « Tant que les murs de notre théâtre seront debout, nous continuerons de créer »

Actu, Paris, Théâtre
Amer Khalil, directeur du Théâtre national palestinien
Amer Khalil, directeur du Théâtre national palestinien

Photo Christophe Péan

Premier théâtre à avoir vu le jour en territoire palestinien, le Théâtre National Palestinien est invité par Ariane Mnouchkine au Théâtre du Soleil pour une série de quatre représentations. Entretien avec son directeur, Amer Khalil.

Le Théâtre National Palestinien en tournée en France s’installe pour quinze jours à la Cartoucherie de Vincennes et présente L’Assemblée des femmes, d’après Aristophane, un spectacle créé à Jérusalem-Est en 2021, accompagné d’un film documentaire qui revient sur les parcours de vie de femmes palestiniennes en Cisjordanie rencontrées à l’occasion du projet. Aujourd’hui, on compte une trentaine de troupes professionnelles ou semi-professionnelles palestiniennes, qui continuent de créer malgré le contexte très tendu, mais, en 1977, quand la compagnie El Hakawati voit le jour, avant de devenir le Théâtre National Palestinien, il n’en existait aucune. « Vous et moi croyons à la vertu de l’Art », écrit la patronne du Théâtre du Soleil, Ariane Mnouchkine, dans sa note d’intention, en précisant avoir, dans un premier temps, refusé le projet en janvier dernier avant de revenir sur sa décision. Accueilli dans une maison qui a largement inspiré la création du Théâtre National Palestinien, Amer Khalil, son actuel directeur, revient sur la genèse d’une institution unique au monde.

Comment est né le Théâtre National Palestinien et en quoi sa création fut un évènement sans précédent ?

Amer Khalil : Après la guerre de 1967, il y avait vraiment un profond sentiment de déception de la part du peuple palestinien. Tous les jeunes, les intellectuels, les étudiants avaient besoin de se mobiliser. C’est comme ça qu’a débuté le théâtre palestinien, qui est donc, par essence, un théâtre militant. C’est dans ce contexte que François Abou Salem, le fondateur du Théâtre National Palestinien, est rentré à Jérusalem après avoir été formé au théâtre en France, notamment chez Ariane Mnouchkine. Il a continué à faire du théâtre militant, mais il a emmené le théâtre palestinien vers quelque chose de plus professionnel, de plus moderne.

Il a rencontré quatre jeunes Palestiniens en 1977, dont sa future femme, Jackie Lubeck. Elle a joué un rôle très important dans la vie du théâtre palestinien. Ensemble, ils créent leur troupe, El Hakawati. À l’époque, ils jouaient dans des salles d’écoles, dans des églises. Moi, je suis entré dans la troupe quelques années après, j’avais 16 ans et je ne connaissais rien au théâtre. Depuis, je ne l’ai jamais quittée. En 1983, on a découvert un vieux cinéma de Jérusalem-Est qui avait complètement brûlé. François a décidé d’en faire notre théâtre. Comme nous n’avions pas d’argent, la propriétaire nous a cédé le cinéma en nous disant : « Vous me paierez dans cinq ans ! ». C’est ainsi qu’est né le Théâtre National Palestinien, c’est-à-dire le premier théâtre de Palestine.

Que signifie « El Hakawati », et pourquoi ce nom ?

A.K. : « El Hakawati » signifie « le raconteur ». Il n’y a pas de tradition théâtrale en Palestine au sens strict, comme il peut y en avoir une en France. Par contre, il y a toujours eu le raconteur. Il va au café avec un costume et une boîte. Il sort le livre de la boîte et il raconte une histoire. Souvent, il ne la termine pas ; comme ça, il peut revenir le lendemain. Ce n’est pas vraiment un clown, ce n’est pas totalement un comédien non plus. C’est un raconteur.

Pourrait-on dire que la création du Théâtre National Palestinien a structuré durablement le théâtre en Palestine ?

A.K. : Oui, totalement, et il l’a professionnalisé surtout. Aujourd’hui, le Théâtre National Palestinien, qui emploie cinq personnes, dispose d’une grande salle de 300 places et d’une plus petite de 80, avec une programmation à l’année. On a créé un festival international de marionnettes et un autre de cinéma arabe. On produit ou co-produit quatre ou cinq pièces par an. On continue aussi de jouer des spectacles dans les écoles et dans les villages. On les tourne également beaucoup à l’international, avec l’aide des consulats, comme ceux de France ou d’Angleterre. Aujourd’hui, il n’y a plus de troupe permanente au théâtre, mais il y a une vingtaine de comédiens et comédiennes qui y restent fidèles, et nous finançons régulièrement des bourses de création pour de jeunes metteurs en scène.

Nous ne pouvons pas être financés par l’Autorité palestinienne et nous refusons toute subvention israélienne, donc nous sommes financés en partie par l’Union européenne, par des pays étrangers, des fondations, un peu par la billetterie, et nous louons aussi notre salle pour des évènements privés. Ces fonds servent surtout à financer les créations, mais les frais de fonctionnement pour faire tourner le théâtre restent notre plus gros problème. Ils sont estimés à 300 000 euros par an, et on n’arrive jamais à les trouver. J’en ai encore fait des cauchemars cette nuit. (rires)

Que signifie la mention « théâtre national » pour vous ?

A.K. : C’est une question qui me touche beaucoup. Moi, je vois le Théâtre National Palestinien comme un théâtre d’État, avec une troupe qui représente un peuple. Et puis, c’est la seule organisation de Jérusalem qui porte encore le nom « Palestinien » sur son fronton. Donc, pour nous, c’est très important. D’un autre côté, notre statut légal, c’est d’être une organisation non gouvernementale, ce qui est évidemment paradoxal ; mais, nous, nous décidons de fonctionner comme un théâtre national.

Ce n’est pas la première fois que le Théâtre National Palestinien est invité au Théâtre du Soleil, n’est-ce pas ?

A.K. : Déjà, c’est ici que François a été formé après une école de théâtre à Strasbourg. Il avait 18 ans et, pour lui, cela a été une expérience fondatrice. À l’époque, c’était déjà une maison où tous les comédiens rêvaient de jouer. Quand il est revenu vivre à Jérusalem, François nous racontait ce qu’il avait appris au contact d’Ariane, comment elle gérait son théâtre. L’expérience qu’il a gagnée là-bas est plus importante que tout ce qu’il a appris en école. Chez elle, il a gagné une certaine rigueur.

Et puis, en 1988, nous étions en tournée pour quatre mois en Europe quand la première Intifada a éclaté. Alors, Ariane Mnouchkine nous a donné les clefs de son théâtre et nous avons joué deux semaines chez elle, car elle était programmée dans un festival de théâtre en Israël, à Jérusalem-Ouest. Elle a dit : « Je ne viendrai que si les Palestiniens peuvent venir jouer dans mon théâtre en mon absence ». Aujourd’hui, le fait de retourner au Théâtre du Soleil est assez émouvant pour nous, il y a beaucoup de souvenirs qui remontent. C’est là-bas que nous avons rencontré beaucoup de comédiens qui sont devenus des amis. C’est un lieu très spécial.

Est-il encore possible de faire du théâtre depuis le 7 octobre 2023 et les deux ans de guerre qui s’en sont suivi ?

A.K. : Qu’est-ce qu’on peut encore raconter comme histoire aux Palestiniens après cette guerre ? C’est une question très difficile. Chacun de nous connaît quelqu’un qui est à Gaza. J’ai construit deux théâtres à Gaza qui sont aujourd’hui totalement détruits. Personnellement, j’ai perdu onze membres de ma famille, qui sont toujours ensevelis sous les décombres depuis cinq mois. On ne sait plus de quoi peuvent parler nos pièces. Notre imaginaire est totalement gelé. L’avenir est très incertain pour le théâtre, mais aussi pour la vie en général, mais, tant que les murs de notre théâtre seront debout, nous continuerons de créer.

Propos recueillis par Fanny Imbert – www.sceneweb.fr

Une assemblée de femmes (version palestinienne)
Un diptyque théâtre et film documentaire par le Théâtre National Palestinien
d’après Aristophane
Spectacle de Roxane Borgna, Jean-Claude Fall, Laurent Rojol
Avec Ameena Adileh, Iman Aoun, Mays Assi, Firas Farrah Nidal Jubeh, Amer Khalil, Shaden Saleem, Yasmin Shalaldeh

Durée : 2h15 (entracte compris)

Théâtre du Soleil, Paris
les 11, 12, 18 et 19 octobre 2025

11 octobre 2025/par Fanny Imbert
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