Amélie Wendling, collaboratrice et traductrice en France de Lars Norén rend hommage à l’auteur mort en 2021 lors d’une soirée unique au Vieux-Colombier le 24 avril 2023.
Sa silhouette, sa présence dans le silence, son regard transperçant jusqu’à l’os les autres et les événements comme s’il se nourrissait de leur singularité pour faire œuvre. Un homme écoutant simplement le monde sans jugement, avec cette conscience aiguë que la mort est l’essence même de la vie. Lars Norén a écrit et mis en scène deux pièces pour la Comédie-Française. De Pur, créé au Théâtre du Vieux-Colombier en 2009, Éric Ruf dit « C’est l’un des plus beaux et puissants spectacles qu’il m’ait été donné de voir à la Comédie-Française. Ne s’y trouvait rien de bien spectaculaire, sinon une prodigieuse direction d’acteurs et une profondeur inusitée ».
En 2018, l’auteur suédois revenait dans nos murs une nouvelle fois avec Poussière. « Je n’aurais pas pu écrire ce texte avant d’avoir l’âge que j’ai aujourd’hui. Je suis moi aussi dans les dernières années de ma vie et cette pièce me permet de faire face à mes propres inquiétudes et à mon propre chemin. C’est une pièce sur la fin, sur les au revoir, sur les souvenirs. Une pièce belle et mélancolique qui ne cesse de parler de la vie », nous livrait-il alors.
Né en 1944 à Stockholm, Lars Norén est publié dès l’âge de 18 ans. Poète pendant vingt ans, il bascule vers le théâtre en 1980, suite à un rêve. Il écrit alors plus d’une centaine de pièces. Son écriture, prenant au fil des années différentes formes, se découpe en plusieurs périodes selon les thèmes abordés. Dans un premier temps ses pièces sont autobiographiques (La nuit est mère du jour, Le chaos est voisin de Dieu, etc.) puis ses textes réalistes et implacables se centrent sur les névroses des familles et des couples. Ces œuvres qui mettent en scène des quartets bourgeois dans un huis clos (La Veillée, Démons, etc.) lui donnent une renommée internationale. Par la suite, il explore le monde capitaliste et l’image collective que nous avons de nous-mêmes dans ses pièces dites de mort. En 1998, avec Catégorie 3.1, il quitte le cercle étroit de la famille pour aller dans les lieux où se trouvent les plus démunis, les exclus, les marginaux, tous ceux qui n’ont plus de voix dans la société contemporaine. Son théâtre devient alors « sociologique ». Au début du xxie siècle, son écriture aborde une nouvelle phase : ses œuvres évoquent des rencontres dans un temps non linéaire, les débuts et les fins, les au revoir, la mort. Le ton est devenu plus existentialiste. À partir de 2002, en parallèle de ses pièces de théâtre, sont également publiés ses journaux de dramaturge, plusieurs recueils de poésie ainsi que deux ouvrages de philosophie.
Sous la direction artistique d’Amélie Wendling, sa collaboratrice et traductrice en France, la Troupe rendra hommage, le temps d’une soirée, à l’un des dramaturges les plus marquants de ces cinquante dernières années, disparu en janvier 2021. Elle traversera toutes les époques de son écriture, faisant découvrir ou redécouvrir les différentes couleurs et les différents visages de son œuvre.
Avec le généreux soutien d’Aline Foriel-Destezet, grande ambassadrice de la création artistique
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