Première manifestation d’envergure ayant annoncé non pas son annulation mais son report de quelques mois Montpellier Danse fêtera ses 40 ans avec force. Jean-Paul Montanari son directeur évoque pour nous les enjeux de cette édition.
Assez rapidement vous avez lancé l’idée d’un festival en archipel, décalé sur la rentrée 2020. Un peu à contre-courant de vos confrères
Montpellier Danse n’a pas une seule économie de festival. C’est un lieu également et une saison. 11 mois sur 12 on y travaille. Surtout même si nous ne gérons en direct qu’un seul lieu l’Agora, nous nous invitions un peu partout sur la ville et même au-delà. De l’Opéra Comédie au théâtre de la Vignette, du Corum au Kiasma à Castelnau-le-Lez. Nous avons appelé tous ces directeurs. Ils nous ont fait de la place sur ces premières semaines entre septembre et décembre. Qui en repoussant un concert, qui en décalant des répétitions. Au final entre 10 et 12 projets du festival prévus sont maintenus. On peut dire que c’est un « festival transporté ».
Quels spectacles devez-vous annuler malgré tout ?
La pièce de la Batsheva avec un dispositif bi-frontal sera donnée durant le festival 2020. La création de Bouchra Ouizguen et celle de Fabrice Ramalingom sont également décalées d’un an. Quant à la reprise du spectacle de Christian Rizzo, D’après une histoire vraie au Corum, nous devons y renoncer faute de pouvoir réunir les interprètes à une certaine date.
Vous deviez inviter la canadienne Daina Ashbee avec cinq pièces. Un pari pour le Festival.
Nous avions dégagé de la place pour elle au Studio Bagouet. Mais avec les conditions actuelles, nous aurions été dans l’obligation de limiter la jauge à 35 personnes. Faire venir une artiste qui habite à 7000 KM de Montpellier dans ces conditions c’est intenable. Elle sera avec nous l’année prochaine.
J’image qu’un directeur et programmateur, dans une telle situation de crise sanitaire, a passé l’essentiel de son temps à rassurer les artistes ?
Tout est passé par le téléphone, 6 ou 7 heures par jour, pour discuter avec nos collègues des théâtres partenaires. Et avec les chorégraphes. Emanuel Gat ainsi voulait reprendre très vite ses répétitions. Ce n’est pas possible dans le cadre d’un festival, ce dernier devant respecter les protocoles sanitaires. Ce qui est envisageable pour Angelin Preljocaj chez lui à Aix en Provence –il reprend les répétitions de son Lac en débutant par les solos et les duos- ne l’est pas à Montpellier Danse. En août Gat sera avec nous et on espère présenter LOVETRAIN2020 en octobre non au Corum mais à l’Opéra Comédie.
Peut-on dire aujourd’hui que le festival ainsi étalé sur le temps aura lieu ?
D’une certaine façon c’est encore un festival d’hypothèses. Même si nous souhaitons tous qu’il ait lieu. On navigue encore de 15 jours en 15 jours. Mais il me semblait important de relever le pari de cette édition. Entre le 3 et le 13 mars, dates d’ouverture de la location, 60 % des sièges étaient occupés. Notre public est fidèle. Mais qui peut dire à cette heure qu’il reviendra en masse. Le spectacle vivant c’est cette expérience du partage, avec des inconnus, et ce depuis la nuit des temps. A mes yeux c’est pourquoi il est symboliquement si important dans notre société. Etre ensemble pour voir des artistes, partager au même moment cette aventure.
La culture a-t-elle été négligée dans cette crise sans précédent ?
Disons qu’elle n’était pas le premier problème à régler. Cela peut aussi s’entendre. L’urgence c’était surtout la question des intermittents, de ce côté-là l’essentiel a été fait heureusement. Pour beaucoup la période des festivals est primordiale. Après on peut dire que le spectacle vivant ce n’est pas le cinéma ou les grands concerts avec des économies différentes. Pour revenir à notre domaine, l’année la plus difficile ce n’est pas 2020, ce sera 2021. Et cela pour beaucoup. L’état va demander encore plus aux collectivités locales. Ces dernières ne voudront pas augmenter les impôts. Il y a donc des raisons de craindre des baisses de subventions. Je travaille sur l’édition prochaine et j’anticipe une baisse de 15 % du budget.
Philippe Noisette – www.sceneweb.fr
Rens sur www.montpellierdanse.com
So Schnell de Dominique Bagouet ouvrira le festival « bis » le 19 septembre au Théâtre de l’Agora. Le reste de la programmation sera déroulée jusqu’à la fin du mois de décembre
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