Avec A Love Supreme la paire De Keersmaeker/Sanchis met des mouvements sur les notes de John Coltrane. Une danse libre magnifiée par un quatuor de jeunes interprètes.
On ne parle pas de John Coltrane dans La La Land le film qui se veut hommage au jazz et à la comédie musicale. Trop libre peut-être le style Coltrane. L’été 64 ce dernier redevenu clean jette les bases de son grand œuvre A Love Supreme tout empreint de spiritualité et de rythmes. Il y a, pour les amateurs de musique, un avant et un après ce disque. Anne Teresa De Keersmaeker tout juste âgée de quelques années alors n’a sans doute pas été bercée par le saxophone de Coltrane. Quoique. Mais cette musicienne accomplie a toujours le chic pour se frotter aux maîtres -Mozart, Steve Reich, Miles Davis, Brian Eno.
Alors pourquoi pas A Love Supreme ? En 2005 elle co-écrit la première version chorégraphique du genre avec le jeune danseur Salva Sanchis issu de la première année de P.A.R.T.S. école créée par la Belge à Bruxelles. On en garde un beau souvenir. Qu’est ce qui fait alors qu’en revoyant A Love Supreme plus de dix ans après on reste émerveillé ? La distribution nouvelle fait sienne ce concert de danse qui n’illustre jamais la partition de Coltrane mais essaye plutôt de comprendre les mécanismes de la composition. Il y a l’improvisation d’abord qui gravite autour de noyaux thématiques défendus par le musicien puis l’allégresse d’un « chant » spirituel. Comment danser cela sans sombrer dans le décalque – un danseur = un instrument ? Tout simplement en prenant les libertés comme cette ouverture en… silence. Les deux chorégraphes imaginent une gestuelle en canon, des portés à trois, des solos épurés. Les mains, à plat comme posées dans l’air, dessinent des courbes ou des angles. Une trajectoire fugace qui semble s’épuiser dans le souffle de John Coltrane.
A Love Supreme avec ces corps formant des chaînes de vie est ici une affaire d’hommes. Anne Teresa De Keersmaeker expliquait un jour son rapport à l’autre, le masculin, elle qui avait commencé par des danses au féminin. Et le fait de ne pas ressentir en elle la même chose. Dans ce dialogue avec Salva Sanchis -qui créa sur le plateau le version originale- De Keersmaeker tente d’apporter une réponse à certaines de ses interrogations. Le mystère ainsi révélé, ce carré magique qu’évoque Stefan Hertmans dans le texte brillant qui accompagne le spectacle, fait de mélancolie et d’allégresse trouve sous nos yeux sa plus belle expression. Love is all we need après tout.
Philippe Noisette – www.sceneweb.fr
A love supreme
chorégraphie : Anne Teresa De Keersmaeker et Salva Sanchis
avec : José Paulo dos Santos, Bilal El Had, Jason Respilieux, Thomas Vantuycom
musique : A Love Supreme, de John Coltrane104 dans le cadre de la Programmation du Théâtre de la Ville et du Festival Séquence
Complet
05 > 09.04.2017
Reprise à l’Espace Cardin Théâtre de la Ville du 9 au 20 janvier 2018
10 au 13 mai 2017 Théâtre Garonne Toulouse
16 mai 2017 Le Parvis Tarbes
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