Le Théâtre des Quartiers d’Ivry, c’est un Centre Dramatique National mais aussi un atelier de théâtre amateur qui accueille chaque année 200 élèves. Jean-Pierre Bao, le nouveau directeur du TQI a confirmé l’importance de l’école dans son projet artistique, plus en prise en cohérence avec les artistes qui seront invités lors de la prochaine saison. Les élèves de l’Atelier Théâtral d’Ivry ont défendu dans un courrier (reproduit ci dessous ainsi que la réponse de Jean-Pierer Baro) l’équipe de professeurs des ateliers adultes qui ne seront pas reconduits.
L’Atelier Théâtral d’Ivry va continuer à vivre, le metteur en scène Jean-Pierre Baro a tenu a rassurer les élèves qui lui ont écrit un courrier pour défendre le travail de leur professeurs. « Nous vous demandons de nouveau d’inscrire dans l’existant votre projet pour les ateliers amateurs, encore en gestation d’après vous, afin qu’il ne soit pas hors sol et permette ainsi une transition harmonieuse, cohérente et non clivante, en laissant leur place à la rentrée prochaine aux professeurs actuels, aux côtés des nouveaux intervenants que vous avez pressentis. Nous ne sommes pas par principe réfractaires à la nouveauté, mais nous savons qu’elle ne saurait tenir lieu d’argument pour qui voudrait faire table rase sans avoir pris la peine de considérer l’utilité et la beauté de ce qui existe aujourd’hui. » Jean-Pierre Baro souhaite inscrire l’atelier dans son projet pour le TQI. » J’ai donc pris le temps d’en discuter avec l’équipe du théâtre et d’imaginer diverses hypothèses avant de formaliser un projet concret » répond le directeur aux élèves. « Il me semble important que les artistes que j’invite à créer et/ou à présenter des spectacles au Théâtre des Quartiers d’Ivry puissent aussi intervenir dans les projets qui relient le théâtre à la cité et aux citoyens ; l’Atelier théâtral est un de ces projets » poursuit Jean-Pierre Baro dans son courrier qui indique par ailleurs réfléchir à l’avenir de l’équipe pédagogique actuelle « avec la Ville d’Ivry (pour) trouver des solutions (et) maintenir des heures de travail au TQI que ce soit dans le cadre des ateliers dans ou hors les murs. » Une rencontre est prévue début juillet avec les élèves et les artistes pédagogues de la saison 2019-20.
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
La lettre des élèves envoyée à Jean-Pierre Baro
En juin 2018, vous avez été nommé à la direction du Théâtre des Quartiers d’Ivry, Centre Dramatique National du Val-de-Marne.
Vous avez pris votre poste en janvier 2019.
Le 10 janvier, vous avez réuni l’équipe du théâtre afin de vous présenter et de présenter votre projet et avez donné aux professeurs intervenant dans les ateliers amateurs rendez-vous en avril pour des entretiens individuels, sans leur annoncer en aucune façon que vous ne les reconduiriez pas à la rentrée prochaine.
En avril, au cours de ces entretiens avec les professeurs des ateliers adultes, sans donc le moindre signe précurseur, vous leur annoncez qu’ils ne dirigeront plus les ateliers adultes à la rentrée, soit deux mois avant la fin des cours, à une date trop tardive pour qu’ils puissent anticiper cet arrêt brutal de leurs activités.
Les élèves, surpris, indignés, en plein désarroi, commencent à vous adresser des courriers personnels.
Le 24 avril, pour la première fois, et en retour à ces nombreux courriers, vous vous adressez aux élèves des ateliers adultes par un courrier (ci-joint) annonçant une rencontre en mai.
Avant cette date, vous n’aviez jamais communiqué avec les élèves amateurs, ni en personne, ni par courrier, ni par l’intermédiaire d’un collaborateur. Ne semblant pas vous soucier de comprendre le fonctionnement de l’école, vous n’êtes jamais venu assister ne serait-ce qu’à une seule séance d’atelier.
Les élèves ont été extrêmement surpris et choqués de cette totale absence de communication, de cet absolu manque de dialogue qui de surcroît les mettaient devant une décision injuste et arbitraire.
Réunis en collectif, ils vous ont adressé le 26 avril un courrier (ci-joint), vous demandant d’ouvrir le dialogue, dialogue que vous prétendez pourtant placer au cœur de votre projet théâtral, mais qui fait jusqu’à présent cruellement défaut au sein de la structure que vous dirigez. A la suite de ce courrier, d’un article de presse, et d’une pétition regroupant à ce jour plus de 500 signatures, une rencontre a eu lieu samedi dernier, le 18 mai.
Au cours de cette rencontre, vous avez évoqué l’insatisfaction de nombreuses personnes n’ayant pu intégrer les ateliers amateurs faute d’un nombre de places suffisant. Nous déplorons
également cet état de choses qui n’est nullement de notre fait. Nous tenons à rappeler que nous ne sommes en rien responsables des règles d’inscription et que jusqu’à maintenant, vous n’avez proposé aucune solution concrète à ce problème.
Cette longue liste d’attente, cette belle récolte qui a irrésistiblement poussé d’année en année, cette corbeille qui déborde de désirs de participer aux ateliers, d’où vient-elle, à quoi est-elle due ? A la notoriété de l’école, à la renommée de ses intervenant-e-s : Yaël Bacry, Anne Charvet-Dubost et Pierre Trocellier, Christian Germain et Gilles Nicolas, Louise Loubrieu, Youlia Zimina, par la qualité de leur pédagogie, par leur implication et leur engagement pour nous mener jusqu’aux spectacles de juin sur le grand plateau, représentations si unanimement appréciées par les spectateurs qu’elles suscitent massivement ces légitimes désirs d’intégrer l’école.
Voilà les raisons pour lesquelles nous vous demandons de nouveau d’inscrire dans l’existant votre projet pour les ateliers amateurs, encore en gestation d’après vous, afin qu’il ne soit pas hors sol et permette ainsi une transition harmonieuse, cohérente et non clivante, en laissant leur place à la rentrée prochaine aux professeurs actuels, aux côtés des nouveaux intervenants que vous avez pressentis. Nous ne sommes pas par principe réfractaires à la nouveauté, mais nous savons qu’elle ne saurait tenir lieu d’argument pour qui voudrait faire table rase sans avoir pris la peine de considérer l’utilité et la beauté de ce qui existe aujourd’hui.
Vous désirez que « cette École unique » reste « populaire et joyeuse, tout autant qu’exigeante ».
Nous l’espérons nous aussi, c’est pourquoi nous vous prions de ne pas marquer votre prise de fonction par une décision abrupte, injuste et impopulaire.
Une telle faute morale et politique entacherait gravement votre mandat débutant.
Vu l’urgence de la situation pour les professeurs des ateliers adultes, vous comprendrez que nous attendons de vous une réponse rapide.
Recevez, Monsieur le Directeur, nos salutations respectueuses.
Les élèves de l’École du Théâtre des Quartiers d’Ivry
La Réponse de Jean-Pierre Baro
Bonjour à toutes et à tous,
Comme je l’ai précisé dans mon courrier du 24 avril dernier, puis lors de notre rencontre du 18 mai, le projet que j’ai conçu pour le Théâtre des Quartiers d’Ivry propose de connecter la programmation au projet d’action culturelle – dont la formation et la transmission, et par conséquent l’Atelier théâtral, sont parties intégrantes. Il s’agit donc d’inscrire les artistes de la saison au projet de l’Atelier théâtral.
Ce n’est ni un désir de marquer le changement pour le changement, ni une lubie, c’est une nécessité lorsqu’on dirige un Centre Dramatique National dont l’épicentre de l’activité est la création artistique.
C’est pourquoi il me semble important que les artistes que j’invite à créer et/ou à présenter des spectacles au Théâtre des Quartiers d’Ivry puissent aussi intervenir dans les projets qui relient le théâtre à la cité et aux citoyens ; l’Atelier théâtral est un de ces projets.
Cette politique, à laquelle je tiens, je sais que vous la comprenez et que l’avez entendue. Je comprends parfaitement et suis heureux de l’attachement que vous portez à l’Atelier théâtral, sentiment que je partage ; c’est pourquoi l’École conserve la même importance dans le projet du TQI que
précédemment.
En somme, je ne pense pas me tromper en disant que ce n’est pas l’évolution du projet qui rencontre votre désaccord, mais la méthode et le calendrier de prise de décision. Aussi, je reviens sur ces points.
J’ai été nommé à la direction du Théâtre des Quartiers d’Ivry en juin 2018 et j’ai pris mes fonctions en janvier dernier. Comme je vous l’ai expliqué lors de notre rencontre, lorsque l’on est nommé à la direction d’un théâtre, des projets artistiques sont déjà enclenchés pour les mois à venir. Ainsi, à mon arrivée au TQI, je travaillais sur une nouvelle création (Méphisto {Rhapsodie}, créé en mars 2019 puis en tournée), j’avais une autre création en cours d’écriture (Le Code noir qui verra le jour en novembre 2019) et deux spectacles en tournée (Kévin, portrait d’un apprenti converti, créé en octobre 2018 et Master, spectacle créé en 2016 qui se joue dans les écoles). Ces projets ont donc mobilisé beaucoup de mon temps et j’ai été peu présent à Ivry.
De plus, lorsqu’on arrive à la direction d’un théâtre en janvier, le calendrier est très serré pour organiser la saison suivante (équipe, programmation, projets de territoire, partenariats, espaces de vie et de travail, identité visuelle, etc.), et pour gérer en même temps le quotidien. Surtout qu’un changement de direction et de projet entraine souvent des mouvements de personnel, ce qui a été le cas pour nous, et qu’il faut y faire face tout en poursuivant nos missions.
Ainsi, l’annonce aux professeurs des ateliers adultes (5 sur les 13 ateliers) de leur non-reconduction à la tête des cours en question (je le précise puisque certains dirigent aussi des ateliers pour les enfants/adolescents) la saison prochaine, est-elle peut-être arrivée tardivement. Mais nous n’avions pas les moyens d’aller plus vite dans notre réflexion concernant l’Atelier théâtral.
En effet, je ré-insiste ici sur le fait que, oui, je suis bien arrivé à la direction avec le projet d’intégrer des artistes lié.e.s à mon projet (artistes associé.e.s ou artistes programmé.e.s) dans les cours de l’Atelier théâtral mais, non, je n’avais pas de certitude quant à la façon dont j’allais procéder. J’ai donc pris le temps d’en discuter avec l’équipe du théâtre et d’imaginer diverses hypothèses avant de formaliser un projet concret. C’est pourquoi je n’ai pas annoncé lors de ma rencontre du 10 janvier dernier que certains professeurs ne seraient pas reconduits puisque je ne savais pas, à ce stade, qui et combien seraient concernés (tout ou partie des ateliers adultes ? les ateliers enfants/adolescents ?), voire, même si ça serait le cas (dans l’hypothèse de binômes entre anciens et nouveaux professeurs, solution hors budget que j’ai due écarter). Néanmoins, lors de cette réunion – comme je l’avais, par ailleurs, déjà communiqué en juin 2018, lorsque j’étais venu au TQI présenter mon projet à l’équipe et aux professeurs de l’Atelier – j’ai annoncé que je ferai entrer de nouveaux artistes à la direction des cours pour faire entendre que des mouvements pourraient être envisagés, c’est pourquoi je ne comprends pas que cela soit à ce point une surprise.
Maintenant, d’imaginer que nous aurions pu mieux communiquer sur notre calendrier et notre méthodologie de travail, oui, c’est bien le cas, et je l’ai admis lors de notre rencontre.
Je ne vous ai pas rencontré plus tôt non plus, mais la raison je l’ai évoquée ce 18 mai dernier et cidessus.
Je n’en avais pas la disponibilité comme vous l’avez compris, et je ne peux que le regretter.
Enfin, vous saluez les qualités pédagogiques des professeurs de l’Atelier théâtral qui en font sa renommée, je vous rejoins sur ce constat. C’est pourquoi, je reprécise et ré-insiste sur le fait que je ne remets en rien en question la qualité des enseignements qui sont dispensés dans les ateliers.
Mon désir de vouloir faire entrer d’autres artistes dans l’Atelier théâtral n’a pas à voir avec un déficit du niveau d’enseignement. C’est une nécessité de cohérence avec le projet que j’ai construit pour le TQI. Aussi d’avoir pu ou non assister aux cours – même si j’aurais sincèrement préféré en avoir l’occasion – ne change rien à mon ambition pour cette École : mettre en lien la programmation et le projet d’action arstitique du TQI. C’est pourquoi, je n’ai pas l’impression de travailler hors sol, ni d’oublier l’histoire de l’Atelier théâtral, mais bien au contraire de vouloir réinscrire celle-ci plus au cœur du théâtre.
Toutefois, depuis l’annonce faite aux professeurs en avril, j’ai entendu les difficultés personnelles que certains d’entre eux rencontraient quant à leur situation professionnelle et j’ai réfléchi – avec la Ville d’Ivry d’ailleurs – à trouver des solutions pour maintenir des heures de travail au TQI que ce soit dans le cadre des ateliers dans ou hors les murs. Ainsi, pour la saison prochaine, alors que j’avais initialement imaginé de faire intervenir de nouveaux artistes dans certains de ces ateliers, j’ai maintenu ou développé des heures d’ateliers hors-les-murs pour certains des professeurs actuels.
J’ai aussi,suite à la réunion du 18 mai dernier, décidé d’intégrer dans le cadre de cette première saison, 2019-20, un cours commun avec des professeurs actuels – que je prévoyais pour la saison d’après –, en reportant à plus tard l’entrée d’un nouvel artiste dans les ateliers.
Nous réfléchissons aussi à des solutions, toujours avec la Ville d’Ivry, qui permettraient aux professeurs que nous ne pourrons pas maintenir dans les ateliers adultes la saison prochaine, d’effectuer des heures d’actions culturelles avec d’autres publics.
Par ailleurs, s’il était besoin de le repréciser, les professeurs des ateliers enfants/adolescents sont tous reconduits pour la saison prochaine et, par conséquent, Christian Germain et Gilles Nicolas, conservent leur atelier.
Concernant le fort taux de demandes d’entrée aux ateliers adultes que nous ne pouvons satisfaire chaque année, sur la base de réflexions antérieures à mon arrivée et au regard des retours que vous m’avez faits le 18 mai, nous avons envisagé de mettre en place de nouvelles modalités d’inscription :
– Les élèves qui ont aujourd’hui plus de 5 ans d’ancienneté au sein des ateliers devront patienter un an avant de pouvoir se réinscrire,
– Le nombre de réinscriptions consécutives pour un élève sera de 5 ans, ensuite il devra attendre un an avant de pouvoir se réinscrire.
Ces deux conditions permettront un renouvellement régulier des élèves en diminuant ainsi fortement le nombre de ceux qui n’ont jamais pu s’inscrire tout en conservant le principe d’un parcours qui permette à un élève d’évoluer dans sa pratique.
J’ai également pris en considération l’importance pour vous des présentations de juin, et suis ouvert à ce que chaque artiste pédagogue avec ses élèves ouvre son atelier en fonction de l’avancée du travail et des projets de chacun. Ces restitutions pourront avoir lieu sur le grand plateau de la Fabrique, au Lanterneau, dans la salle de l’Atelier ou même dans la Halle.
Je l’ai dit, et vous l’avez entendu puisque vous le reprenez dans votre courrier, le projet de l’Atelier est encore en gestation, il n’est pas figé puisque je tiens compte du réel et j’ai le désir de trouver les solutions les plus appropriées pour concilier nos attentes respectives.
J’espère avoir répondu le plus précisément possible à vos questions et reste de toute façon à votre écoute. Je vous donne rendez-vous le samedi 6 juillet à 17h dans la Salle de l’Atelier pour vous
présenter les artistes pédagogues de la saison 2019-20 des cours Adultes de l’Atelier théâtral.
J’espère aussi que vous entendrez les points de mon projet sur lesquels je tiens à avancer et, qu’ainsi, nous serons dans une situation plus apaisée.
Au plaisir de vous découvrir en jeu lors des présentations des 22 et 23 juin,
Bien à vous toutes et tous.
Jean-Pierre Baro
directeur
Bonjour, assez surprise par l’article et la réponse au courrier des élèves qui ne relatent pas réellement les faits. Le sujet porte aussi sur la façon cavalière et assez violente de traiter des intervenants, intermittents, en les congédiant sans ménagement après que ceux-ci aient donné leur temps et leur passion pour les ateliers du TQI pendant de nombreuses années mais aussi hors les murs et sans projet concret communiqué par la nouvelle direction qui n’avait pas le temps entre sa nomination en 2018 et avril 2019 de les recevoir et de voir le travail qui était réalisé.