Loïc Corbery dit son amour pour Hamlet dans le Singulis (seul en scène) qu’il présente au studio de la Comédie-Française. Un hommage à ce personnage mythique, mais aussi aux grands noms du théâtre, à tous ces fantômes qui ont laissé une trace indélébile dans la mémoire du comédien, et dans la nôtre.
Loïc Corbery n’a encore jamais joué Hamlet à la Comédie-Française. Mais il n’est pas encore trop tard, il a l’âge de Gérard Desarthe quand Patricie Chéreau lui avait proposé d’endosser le rôle dans la Cour d’honneur du Festival d’Avignon en 1989. En attendant le sociétaire de la Comédie-Française s’est emparé de cette carte blanche laissée à la troupe pour interpréter des seuls en scène, dans des rôles de leur choix. Son spectacle est bien plus qu’une incarnation de l’un des plus grands personnages shakespeariens. C’est une plongée dans l’histoire du théâtre.
Allongé au sol, Loïc Corbery écoute un 33 tours. On l’imagine dans sa chambre d’ado à Avignon, en écoutant Supertramp, en imaginant suivre les traces de Gérard Philipe. Son rêve s’est réalisé lorsqu’il a joué avec ses partenaires Les Damnés en 2016 dans la Cour. Le comédien convoque les fantômes de tous les artistes qu’il admire. Il fait écouter sur de vieilles cassettes les voix de Patrice Chéreau, Gérard Philipe ou Thomas Ostermeier évoquant le ciel étoilé d’Avignon lorsqu’il a présenté son Hamlet en 2008. On pénètre dans l’intimité de Loïc Corbery, comédien adulscent, mélancolique, pétri d’amour pour la musique, aux choix éclectiques. Il sort d’autres vieux 33 tours d’une caisse usée. Il fait écouter Wagner, ACDC, Daft Punk, la bande originale du Parrain, le Thriller de Mickael Jackson « ce spectre singulier« .
Le texte est un collage d’extraits les plus marquants du texte de Shakespeare, de témoignages et de commentaires sur l’oeuvre. Un corpus documentaire fouillé et raconté par le comédien qui s’appuie sur les écrits de Voltaire, Philippe Avron, Baudelaire, Maeterlink… Jean Vilar écrit à Gérard Philipe pour lui expliquer combien le projet de la mise en scène de Peter Brook au TNP pour la saison 1960/1961 est important. Le comédien meurt d’un cancer le 25 novembre 1959 et ne pourra jamais jouer la pièce. Sarah Bernhardt qui a endossé le rôle d’Hamlet en 1899 se désole que « le théâtre fasse la part belle aux rôles pour les hommes« . Ismail Kadaré tente de percer le mystère du personnage le plus complexe du théâtre mondial.
Et pour figurer le crâne du père d’Hamlet, accessoire indissociable de la tragédie, Loïc Corbery froisse des exemplaires de Libération. Pas n’importe lesquels, ce sont des numéros historiques, ceux du jour de la mort de François Mitterrand, Coluche ou Jeanne Moreau. Autant de marqueurs importants dans la vie du comédien, et dans celle de beaucoup de spectateurs.
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
Singulis / (Hamlet, à part)
Shakespeare et autres…
Conception et interprétation Loïc Corbery
Durée: 1h30Studio de la Comédie-Française
6 – 24 février 2019
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