Dans One night with Holly Woodlawn, Pierre Maillet se travestit pour rendre hommage à la star éponyme, rendue célèbre par Andy Warhol dans les années 70. Inspiré par les cabarets transformistes de l’époque, son spectacle est une vivifiante ode au jeu. Dans la vie et à la scène.
En chemise noire satinée et bas résilles, la tête prête à accueillir une perruque et les yeux déjà recouverts de bleu cyan et de paillettes, Pierre Maillet nous accueille. Tout en riant avec son équipe – les musiciens du groupe pop français Coming Soon, Howard Hughes et Billy Jet Pilot, le comédien Luca Fiorello et le régisseur Thomas Nicolle –, il nous invite à nous servir un verre de punch et à nous mettre à l’aise. À nous choisir une petite table ronde où trônent des photos de stars de la Factory d’Andy Warhol, éclairées par de petites bougies électriques. On opte pour Joe Dallessandro, d’autres pour Jackie Curtis et Candy Darling, ou encore Geri Miller. Tous des proches de Holly Woodlawn – née Haroldo Santiago Franceschi – l’une des premières stars travesties de l’histoire, à qui Pierre Maillet s’apprête à rendre hommage en reprenant des codes du cabaret transformiste à la mode américaine des années 70. Pour en dire les tragédies, les joies et surtout la grande liberté. L’indomptable imagination.
Créé pour l’ouverture des Plateaux Sauvages à Paris en 2018, et repris en ouverture de saison au même endroit, à l’occasion d’une carte blanche offerte à Pierre Maillet, One night with Holly Woodlawn est à l’image de son sujet : échevelé, plein d’une énergie qui emprunte des directions artistiques variées. Des voies théâtrales et musicales, tantôt proches du stand up, tantôt du mélodrame. Sans jamais s’oublier entièrement derrière son personnage « à la vie simple sur de hauts talons » – selon le titre d’une autobiographie inédite en France, A Low Life in High Heels, dont il s’est beaucoup inspiré –, le comédien et metteur en scène joue de tous les artifices de la scène pour composer un portrait entre ombre et lumière. Un tableau en transformation constante, où l’évocation de la célèbre Factory d’Andy Warhol ne cesse de convoquer le présent. De lui faire des clins d’œil malicieux, aguicheurs.
À travers ce vrai-faux cabaret, Pierre Maillet manifeste une fois de plus son talent à porter sur scène des paroles marginales. Ou simplement anonymes, comme dans le dialogue entre Michel Foucault et un jeune autostoppeur de Letzlove, Portrait(s) Foucault. Comme dans le parcours déambulatoire Ils ne sont pour rien dans mes larmes, où d’anciens élèves de la promotion 27 de l’École de la Comédie de Saint-Étienne portent des témoignages d’inconnus recueillis par Olivia Rosenthal sur des films qui ont changé leur vie. Deux créations présentées aux Plateaux Sauvages lors de la carte blanche, qui avec One night with Holly Woodlawn donnent une idée assez précise de l’univers de Pierre Maillet. De sa manière de mêler culture dite savante et références dites populaires en des formes toujours différentes, toujours nourries par plusieurs disciplines. Le cinéma et la musique surtout, centraux dans la présente proposition.
Depuis sa fuite hors de chez ses parents à Manhattan, jusqu’à sa carrière dans le cabaret transformiste, Pierre Maillet donne à voir toutes les grandes étapes de l’existence de l’héroïne un peu oubliée de la Factory. Avec ses complices qui enfilent pour l’occasion une perruque blonde ou rousse, il joue par exemple la rencontre de Holly avec Paul Morrissey, et sa collaboration avec lui dans plusieurs films. Parmi lesquels Trash, qui la propulse dans la célébrité. Avec une autodérision, un humour très personnel qui donne à l’ensemble l’allure charmante, un peu vertigineuse, d’un jeu de rôle improvisé, Pierre Maillet se démène pour faire tenir toutes ces aventures en moins de deux heures. À grand renfort de robes, de chaussures et de prothèses. Évident, son plaisir devient vite le nôtre, et il le reste jusqu’à la fin.
Anaïs Heluin – www.sceneweb.fr
One nigth with Holly Woodlawn
Texte
Pierre Maillet
Régis Delicata
Charles-Antoine Bossonavec
Pierre Maillet,
Howard Hugues
Billy Jet Pilot
Luca Fiorello
et Thomas NicolleAssistant stagiaire
Edwin HalterMusique
Howard Hugues
Billy Jet PilotRégisseur général
Thomas NicollePerruques et maquillages
Cécile KretschmarCostumes
Zouzou LeyensProduction
Les Lucioles
Rennes
Coproduction
Comédie de Caen
CDN de Normandie
Théâtre National de Bretagne Rennes
Avec le soutien
de la Cie Jean-Michel Rabeux – Paris
Avec la participation artistique du DIESE#
Auvergne-Rhône-AlpesDurée : 1h40
28 SEPTEMBRE > 5 OCTOBRE 2019
LES PLATEAUX SAUVAGES Paris (75)
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