Créée en janvier 1981 à Turin, « Klaxon, trompettes…et pétarades » parle de notre époque, du rapport entre les pouvoirs politiques et économiques, de la lutte des classes. Le texte n’a pris aucune ride. Transposé en 2010, au lendemain d’une crise financière, il conserve toute sa charge critique. Nous sommes à la fin des années 70. L’Italie se relève peu à peu de l’assassinat du leader de la Démocratie chrétienne, Aldo Moro en mai 1978 après 55 jours de captivité. L’Europe est au cœur de ce que l’on appelle les années de plomb pendant lesquelles les activistes de tout bord utilisent le terrorisme comme action politique révolutionnaire. L’Italie connaît des mouvements sociaux – les usines Fiat sont bloquées pour plusieurs jours de grèves. Pour Dario Fo, l’action politique c’est l’écriture de cette pièce. Une farce politique, féroce, mais qui utilise l’humour pour aborder des thèmes politiques. Le théâtre permet cela : lancer des bombes inoffensives pour agiter le débat.
Antonio Berardi (Gilles Ostrowsky), ouvrier de chez Fiat est témoin d’un accident de voiture, une course poursuite entre deux voitures. Il sauve les occupants de l’une des voitures parmi lesquels se trouve Agnelli, le patron de Fiat. Grièvement brûlé, il l’enveloppe de sa veste. Agnelli se retrouve à l’hôpital, et les médecins ignorant sa véritable identité vont lui recomposer le visage…d’Antonio.
Pour traduire le texte, Marie-France Sidet s’est procurée des documents de travail (écrits et audio) de Dario Fo et de sa compagne Franca Rame. L’écriture est vive, acerbe, et nécessite une mise en scène alerte et enlevée. C’est exactement ce que recèle le travail de Marc Prin : une mise en scène bricolo qui laisse la possibilité aux acteurs d’aborder plusieurs registres : on passe du vaudeville (à travers le quiproquo sur l’identité et la présence de deux sosies) à la commedia dell’arte (avec l’utilisation de masques pour tourner en dérision le pouvoir policier et le pouvoir judiciaire). Marc Prin met le bazar sur scène et Gilles Ostrowsky dans ce double rôle est hilarant. Il joue avec le public (les comédiens sont d’ailleurs très souvent en frontal), lorsque son visage est entouré de bandelettes, ses yeux sont d’une expression inouïe. Le reste de la distribution est à l’unisson.
Dans ce déferlement comique, la pièce de Dario Fo conserve toujours le cap avec sa volonté profonde de critiquer la société politique et financière. Les dernières phrases de la pièce sont des moments d’anthologie. Agnelli monte sur une table et clame : « Je suis le pouvoir (…), nous sommes les seuls à présents, nous les industriels à lire Le Capital…(…) Le capital que je représente c’est l’Etat ! C’est ma dignité que vous devez sauver, dussiez-vous en crever ![1] » Trente ans après l’écriture de ce texte, ce sont effectivement les Etats qui ont renfloué les caisses des banques lors de la dernière crise financière…
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
[1] Le texte est édité dans l’Avant-Scène du 15 novembre 2010, n°1292
KLAXON, TROMPETTES… ET PETARADES de Dario Fo
Texte français Marie-France Sidet
Mise en scène Marc Prin
Scénographie et costumes Marc Prin
Dramaturgie Julien Dieudonné
Décors Ateliers du Théâtre Nanterre-Amandiers
Lumières Pierre Montessuit
Masques, perruques et maquillages Marie Messien
Accessoiriste Patrick Laganne
Arrangements sons et compositions musicales Valérie Bajcsa et Marc Delhaye
Photographe Alexandre Sargos
Assistanat à la mise en scène Ana-Lucia Luna
Avec
Le médecin/ Policier 2 Anne Dupuis
Rosa/ Policier 1 Céline Dupuis
Le commissaire/ Infirmier 3 Gérald Cesbron
Lucia/ La juge/ Infirmière 2 Milena Esturgie
Antonio/ Le sosie/ Infirmier 1 Gilles Ostrowsky
Coproduction : Théâtre Nanterre-Amandiers, Théâtre à bout portant
Durée : 2h
DU 12 MARS AU 27 AVRIL 2013
Représentations mardi, vendredi et samedi à 20h30
mercredi et jeudi à 19h00 – matinée samedi à 16h00
Relâches exceptionnelles les 9 et 11 avril 2013
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