En 2015 la France est frappée d’une terreur nouvelle.
Bouleversés, ébahis, fragilisés, apeurés, nous avons tremblé et pleuré ensemble.
Et puis il a fallu libérer la parole, ouvrir des débats, se parler, se confronter. Les politiques, les médias, les associations ont tenté de répondre à notre effarement et ont accompagné un peuple meurtri qui vivait ici ce qu’il voyait jusque là se passer ailleurs.
Les artistes aussi ont cherché des réponses afin de conjurer le sort.
Déjà en 2010, après les attentats de Stockholm, Jonas Hassen Khemiri avait été confronté à ces questions. Il avait écrit, dans un important quotidien suédois, une tribune intitulée J’appelle mes frères, dont il avait tiré la pièce du même nom. C’est lorsqu’il a repris cette tribune dans Libération, après la tuerie de Charlie Hebdo, que j’ai découvert le texte.
L’auteur y traite ouvertement des problèmes d’intégration des immigrés et de leurs enfants, des questions liées aux sentiments d’exclusion, d’appartenance, de stigmatisation et de crise identitaire, en suivant la journée d’un jeune homme, enfant de l’immigration maghrébine, dans une ville européenne touchée par le terrorisme.
Jonas Hassen Khemiri empoigne le réel avec acuité. Il ne tente jamais de le réduire ou de donner des réponses simplifiées, une morale de l’histoire. Il s’évertue à en déployer toute la complexité et à travailler dans ce qu’il nomme « les zones grises ».
Amor le personnage principal de la pièce, n’est ni un héros, un modèle, ni un pauvre gosse de banlieue. C’est un jeune homme d’aujourd’hui, né en Europe de parents venus d’ailleurs et crument tourmenté de ne pas savoir qui il est ou qui il doit être, blessé par le monde qui l’entoure, apeuré par ces autres dont il se méfie, écorché de se sentir inadapté.
Je suis restée sidérée par la puissance de l’écriture, la densité rythmique, le montage d’espace-temps et les variations d’adresses qui en font un texte fort, pensé pour le plateau et pour les acteurs.
La frontalité avec laquelle Amor, le personnage principal, s’adresse au public tout au long de la pièce, son humour mais aussi la colère, la violence, la peur qui vibrent en lui m’ont accrochés à cette journée dans la ville comme dans une longue nuit d’errance dont je suis sortie essoufflée, tendue et déboussolée.
Jeune femme blanche, née en France de parents français, parisiens, « du bon côté » des barrières culturelles et sociales, j’ai choisi de faire du théâtre portée par le soutien culturel et la confiance de ma famille. Je suis entrée dans la vie professionnelle par les grandes portes officielles des conservatoires et des institutions publiques. Citadine, je suis habituée à la diversité depuis l’enfance. L’essence du métier que j’ai choisi est l’observation de l’humain, la rencontre avec l’autre et le travail en équipe avec des gens venus de partout, forts de leur savoir-faire et de leurs différences. Je défends dès que je le peux, dès que je le dois, la fraternité, l’écoute et le malheureusement galvaudé « vivre ensemble »
Extrait de la note d’intention de Noémie Rosenblatt
J’APPELLE MES FRERES
de Jonas Hassen Khemiri
Traduction Marianne Ségol-Samoy
Le théâtre de J.H. Khemiri est publié aux éditions Théâtrales
éditeur et agent de l’auteur
Mise en scène – Noémie Rosenblatt
Assistant mise en scène – Baptiste Drouillac
Scénographie – Angéline Croissant
Création lumière – Claire Gondrexon
Création son – Marc Bretonnière
Mouvement – Marie-Laure Caradec
Costumes – Camille Pénager
Avec Priscilla Bescond, Kenza Lagnaoui, Maxime Le Gall et Slimane Yefsah
et dans chaque ville une troupe de 11 amateursProduction : La Compagnie du Rouhault
Administration : Le Bureau des Filles – Véronique Felenbok / Annabelle CoutoCo-productions :
La Comédie de Béthune – CDN des Hauts-de-France
Le Grand R – Scène Nationale de La Roche-sur-Yon
Le Théâtre Jean Vilar – Vitry
Le Théâtre de l’Ancre – Charleroi
Le Prisme – Centre de développement artistique de Saint Quentin-en-Yvelines
La Compagnie LacascadeAvec le soutien du dispositif Le Réel Enjeux : Théâtre La Cité-Marseille / Théâtre Jean Vilar-Vitry /
Théâtre des Doms-Avignon / Théâtre de l’Ancre-Charleroi – Résidences au Théâtre La Cité et au Théâtre des Doms
Avec le soutien du Jeune Théâtre National et du Théâtre Le Temple – Bruay-la-Buissière
Avec l’Aide à la création du Conseil Départemental du Val de Marne (94)Avignon Off 2018
La Manufacture Patinoire
du 06 au 26 juillet
Relâches les 12 et 19 juillet à 15h55
Durée : 2h00
Trajet en navette compris
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