Fuck America : l’incroyable roman d’Edgar Hilsenrath dans une mise en scène radicale de Benjamin Duval

Rodolphe Congé et Lucie Boscher @ Alain Julien

Le jeune metteur en scène Benjamin Duval nous fait découvrir ce roman surprenant d’Edgar Hilsenrath dans une mise en scène radicale, portée par un beau duo d’acteurs.

Une vieille table en formica et une chaise sont les seuls éléments de décor de cette pièce incroyable adaptée du roman d’Edgar Hilsenrath. L’histoire de Jakob Bronsky, émigré juif, arrivé à New-York dans les années 50. Jakob a eu plus de chance que son père qui a tenté à la fin des années 30 d’émigrer, sentant la montée du nazisme. La pièce raconte le parcours vengeur de Jakob devenu écrivain cynique aux Etats-Unis, avide de sexe et de luxure.

Benjamin Duval, jeune metteur en scène installé à Reims, a crée sa compagnie nood avec l’auteur Anne Mulpas. Son théâtre est brut, radical, sans fioritures. Dans la première partie de la pièce, Lucie Boscher s’adresse frontalement au premier rang des spectateurs. Elle lit un échange épistolaire entre le père de Bronsky et le Consul des Etats-Unis de Varsovie lorsqu’il essaye d’émigrer. L’autre comédien Rodolphe Congé se tient un peu en retrait. Son jeu est distancié presque détaché. L’effet est saisissant et nous fait tout de suite plonger dans l’action. Puis les deux comédiens vont s’éloigner un peu du public pour entrer dans une quasi obscurité et continuer de raconter l’histoire de Bronsky, sa naissance, la quête de ses parents disparus dans le ghetto de Varsovie. Les mots nous bercent. Le duo de comédiens tient la pièce de bout en bout, souvent dans des postures pas faciles. Lucie Boscher (prix de la révelation théâtrale en 2000 pour la Jeanne dans la mise en scène de Christian Schiaretti) est formidable tout comme Rodolphe Congé dans ce petit bijou d’intimité et d’inventivité.

Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr