Pour Le Ballet de Lorraine, Michèle Murray avec Dancefloor et Adam Linder, avec Acid Gems, dévoilent deux ballets aux airs clubbing qui se répondent, grâce à des textures, écritures et ambiances sonores singulières.
Pour sa deuxième programmation de l’année, le Ballet de Lorraine prouve à nouveau sa capacité d’adaptation bluffante en se glissant dans l’écriture de Michèle Murray et d’Adam Linder. Grâce à des textures, des ambiances sonores et des écritures singulières, Dancefloor et Acid Gems nous entraînent dans deux boîtes de nuit aux univers marquants, où les codes du clubbing s’infiltrent dans la composition chorégraphique. Un aperçu du futur du ballet ?
Chez Michèle Murrey, le dancefloor ne ressemble ni à celui de Marco Da Silva Ferreira, aux costumes fluos, ni à celui de (LA)HORDE, où l’énergie est projetée jusqu’à l’épuisement. La chorégraphe franco-américaine, de formation classique et Cunningham, privilégie plutôt une scénographie grise (signée Koo Jeong A), des costumes quasi normcore (jean bleu ou gris et t-shirt) et une écriture du mouvement subtile. Les danseuses et danseurs bien sont répartis sur le plateau, presque équidistants, et chacun semble exécuter sa propre partition. Un effet qui découle du mode composition instantanée de Michèle Murray ? Certains bougent peu, d’autres déploient des gestes étirés dans l’espace, où se niche une corporéité classique. Des gestes académiques, dégagés, arabesques surgissent parfois. Ils se mélangent à des pas de danse festifs, englobés par l’ambiance sonore sourde planante de Gerome NOX et les flash lumineux colorés qui hypnotisent. L’ensemble pourrait être une vision d’after, entre chaos et grâce.
Pour l’Australien Adam Linder, le dancefloor a un goût plus acidulé et surréaliste, avec le bien nommé Acid Gems. Au départ inspiré de Joyaux de Balanchine, qui déclinait en trois tableaux et pierres précieuses les trois écoles du ballet, française, russe et américaine, Acid Gems s’éloigne du propos pour mélanger les styles et les influences dans un scénographie quasi radioactive. De part et d’autre du plateau, deux observateurs sont postés sur des chaises d’arbitre, avec un tissu devant les yeux, pendant qu’un groupe d’interprètes ondule bassin et épaules en académique colorés un peu kitsch. Le groupe d’abord de dos se rassemble petit à petit, jusqu’à danser collé-serré, tandis que martèlent les scansions de Billy Bultheel. Là aussi, la technique classique trouve un chemin, entremêlée à une myriade de styles quasiment impossibles à discerner. Les lumières fascinantes de Shahryar Nashat englobe cette danse sensuelle et étrange, à coups de contre-jour orangés et de contrastes criards.
Ces deux ballets-clubbing, qui pourraient presque ériger Nancy au rang de Berlin, esquissent un futur du genre du ballet. Les paysages sonores y sont électro, la scénographie est faite de lumières intenses et colorés et la chorégraphie tisse avec habileté une myriade de styles.
Belinda Mathieu – www.sceneweb.fr
DANCEFLOOR
Chorégraphie : Michèle Murray
Scénographie : Koo Jeong A
Invitation de l’artiste plasticienne Koo Jeong A dans le cadre du dispositif «Artiste associé» avec le Centre Pompidou-Metz
Musique : Gerome NOX
Collaboration artistique : Alexandre Bachelard, Maya Brosch, Marie Leca
Pièce pour 25 artistes chorégraphiquesAcid Gems
Chorégraphie : Adam Linder
Création musicale : Billy Bultheel
Lumières : Shahryar Nashat
Costumes : Antonin Tron
Pièce pour 16 artistes chorégraphiquesSamedi 1er, mercredi 5, jeudi 6, vendredi 7 avril 2023 à 20h
À l’Opéra national de Lorraine – Place Stanislas à Nancy
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