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La petite musique en sourdine de Marthaler

Coup de coeur, Les critiques, Paris, Théâtre

photo Horn

Dans Die Sorglosschlafenden, die Frischaufgeblühten, le génie du théâtre musical allemand, Christoph Marthaler, signe un opus chambriste pour sextuor fatigué où la musique conjure le vide tout en finesse et en douceur.

Comme toujours chez Marthaler, dont le style est aussi inimitable que parfaitement identifiable, le plateau de théâtre se laisse contempler comme un monde étrange, incongru, et pourtant tellement familier. Les êtres s’y apparentent à des ectoplasmes magnifiques qui vivotent, hagards, éperdus, qui peinent à se rencontrer, à communiquer. Pourtant, murés dans leur solitude, ils forment une belle et fragile communauté. Dans un espace qui paraît d’abord si froid et inhospitalier avec ses hauts murs gris-bunker, son envahissante nudité, et son mobilier spartiate (quelques chaises, tables et pupitres old school déglingués) qui menace de s’effondrer, émane une singulière et confidentielle beauté. La poésie et la musique qui adviennent sans crier gare font de ce lieu un sanctuaire, un abri, loin de l’agitation du monde, et duquel ses habitants ne veulent finalement pas s’échapper.

En fond de scène, le musicien baroque Martin Zeller, déjà acolyte de Marthaler dans la pièce Keine Idee, a posé sa viole de gambe sur un cimetière d’instruments devenus des cadavres de bois épars et entassés. Plus au centre, un orateur répète son discours sur une tribune de fortune elle aussi bientôt désossée. Accompagné par le pianiste Bendix Dethleffsen, il trouve plus d’éloquence en entonnant l’ode schubertienne An die Musik avec une aigrelette voix de fausset.

Une ineffable tristesse mais aussi une fantastique drôlerie suintent de ce condensé d’instruments cassés et d’humains désorientés. C’est ainsi que se présentent les « dormeurs insouciants » qui donnent son titre au spectacle tiré d’un poème d’Hölderlin. A la fois comateux et aventureux, ils revêtent l’air somnolent et illuminé de personnages typiquement marthaleriens : allures formidablement rétro, gestes maladroits ou soudainement frénétiques, ils semblent s’être figés dans le temps lointain des années 1960-70 en Allemagne de l’Est. Plongeant hardiment la tête et le nez dans des étuis à tubas aux drôles de formes en conques dadaïstes, ils découvrent à voix haute des aphorismes empreints de l’angoisse du temps. Ils chantent aussi, embouchent des sourdines pour cuivres, se munissent de violons et d’altos sans cordes ni archet. Ils cherchent à s’adresser à qui veut les entendre, autant dire personne… seulement les murs auxquels ils font face.

Les interprètes se saisissent de leurs partitions volontairement malingres, réduites à des bribes de textes et de notes, et les habitent pleinement, intensément. Ils s’adonnent avec aisance au jeu apparemment imperturbable et forcément instable de Marthaler. Plongés au cœur de l’âme torturée du poète et philosophe allemand Friedrich Hölderlin, la troupe en extrait toute la profonde mélancolie qu’elle accompagne de son dérisoire humour et d’une petite musique intérieure, si triste, si belle, jouée tout en sourdine. Le chant confine au murmure jusqu’à sa propre dissolution.

Christophe Candoni – www.sceneweb.fr

Die Sorglosschlafenden, die Frischaufgeblühten
Mise en scène, Christoph Marthaler
Textes, Friedrich Hölderlin
Assistante mise en scène, Annalisa Engheben
Avec Bendix Dethleffsen, Josefine Israel, Sasha Rau, Lars Rudolph, Samuel Weiss, Martin Zeller
Dramaturgie, Malte Ubenauf
Scénographie, Duri Bischoff
Assistante scénographie, Philipp Eckle
Lumières, Annette ter Meulen
Musique, Carl Friedrich Abel, Johann Sebastian Bach,
Ludwig van Beethoven, Sergeï Rachmaninov, Franz Schubert, Robert Schumann, Carl Maria von Weber
Son et vidéo, Kai Altmann
Costumes, Sara Kittelmann
Assistante costumes, Daniel Goergens, Tabea Harms
Conseil artistique, Carl Hegemann

Production : Deutsches Schauspielhaus Hamburg 
Coproduction Schauspielhaus Zürich ; Akademie der Künste Berlin

Production à Paris : Festival d’Automne à Paris, en collaboration avec la vie brève – Théâtre de l’Aquarium    

Avec le soutien de Hauptstadtkulturfonds 

Durée : 1h30

Festival d’Automne à Paris
Théâtre de l’Aquarium – la vie brève
26 Septembre au 2 Octobre 2022

28 septembre 2022/par Christophe Candoni
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