Le mouvement d’occupation des théâtres fait boule de neige. Après l’Odéon à Paris, puis hier le TNS à Strasbourg, La Colline à Paris, ce matin le Théâtre Graslin à Nantes est occupé par des intermittents ou des étudiants en école d’art dramatique. Ils demandent la reconduction d’une année blanche pour les intermittents, la réouverture des lieux culturels ainsi qu’un plan de soutien à l’emploi dans le secteur culturel. Les grandes voix de la culture qui se sont élevées depuis un an, les soutiennent. C’est la cas de la comédienne Ariane Ascaride qui ne décolère pas..
Comprenez-vous la colère des artistes et des techniciens qui occupent l’Odéon ?
Comme je les comprends car cela fait un an que je suis en colère. Je commence à être un peu fatiguée. On joue la montre au Gouvernement. On ne bouge, on ne dit rien, on laisse faire, on laisse les gens s’exciter et se mettre en colère, en attendant de voir comment cela va se passer. Mais cela fait un an que l’on est traité comme ça. Nous continuons à être non essentiels. Et que l’on ne me dise pas que le Président de la République adore la culture. Si c’était le cas, il s’en préoccuperai.
Est-ce que la scène vous manque ?
Oui. J’ai juste envie de sentir l’odeur d’un théâtre, d’entrer dans les coulisses. Des fois, j’ai l’impression de vivre dans de la science-fiction, dans un cauchemar. Et que des intermittents occupent le Théâtre de l’Odéon, c’est un beau symbole, car cela fait un an que nous ne pouvons plus jouer.
La situation est-elle préoccupante ?
Oui car il y a des intermittents qui sont en train de mourir, qui n’ont pus de quoi payer leur loyer, qui font faire leurs courses dans les banques alimentaires. Et ces intermittents ne savent plus comment prouver leur existence puisque tout est fermé.
Et désormais, les étudiants font entendre leurs voix.
Ils n’en peuvent plus et je les comprends. Vous imaginez avoir 20 ans aujourd’hui ? Cela fait des mois que la jeunesse est sacrifiée, et aujourd’hui ils le disent. Comment un étudiant en art dramatique peut visualiser son avenir ? C’est impossible. C’est un boulot énorme, ils travaillent tout le temps. Ils sacrifient d’autres choses. Et tout ça pourquoi ? Parce que de toutes façons, ils ne peuvent pas jouer.
En ce moment les équipes artistiques jouent devant des professionnels et des journalistes. Qu’en pensez-vous ?
C’est de la survie. Et je me demande si cela ne fait pas plus de mal ? Effectivement, elles montrent leur travail pendant 3 jours à des programmateurs qui n’ont aucune vision sur l’avenir, à des journalistes qui ne peuvent pas dire ce qu’ils en pensent. En fait, tout le monde s’occupe quoi.
Qu’est ce que cette crise signifie pour le monde de la culture ?
Cela fait 40 ans que les politiques considèrent la création artistiques et la culture comme du divertissement. Ce n’est pas ce que nous faisons. Nous racontons le monde. On le fait depuis Shakespeare. Et on veut continuer à le faire car nous sommes des personnes responsables. Et nous l’avons montré. Quand on a pu jouer entre les deux confinements, tout le monde a respecté les consignes sanitaires. On ne sortait pas de chez nous, on allait juste jouer au théâtre. Il faudrait un peu de considération pour mes camarades et moi-même.
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
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