Avec une dernière pièce encore très engagée, Maguy Marin dénonce sans détour et une volonté de simplicité esthétique, les violences sociales et un libéralisme dévastateur dans DEUX MILLE VINGT TROIS. La danse disparaît, comme si elle n’avait plus rien à apporter dans le contexte politique actuel.
Un mur en briques occupe le devant de la scène. Il bouche la vue, imposant. Des noms sont inscrits dans les blocs de bois : Arnault, Musk, Trump. Le mur s’écroule. Le ton est donné. Maguy Marin est connue pour son engagement politique contre le néo-libéralisme et son attachement à dénoncer les violences sociales. Avec cette dernière pièce intitulée simplement DEUX MILLE VINGT TROIS ses revendications n’ont jamais été autant explicites, franches, littérales.
Celles et ceux qui attendent d’être divertis vont vite déchanter…Tout comme ceux qui attendaient un spectacle de danse. Nombreux ont été frappés par la danse de May B (1981), son succès qui déployait une danse à la théâtralité frappante, inspirée du théâtre de Beckett, que sa compagnie joue encore. Si DEUX MILLE VINGT TROIS est sûrement tout aussi dérangeant que la vision des corps et des attitudes de May B, il l’est cependant à travers le matraquage des images et des discours de manière méthodique.
Sept interprètes arpentent avec lenteur le fonds du plateau plongé dans une semi-obscurité. Ils enjambent et déplacent les blocs aidés par une lampe torche, façon cambrioleurs ou archéologues. L’un d’entre eux est assis sur le devant de la scène à jardin. Sur un écran à cours, une photo de Sarah El Haïry, ancienne secrétaire d’État chargée de la Jeunesse. Débute alors une diatribe qui martèle les hypocrisies, les méfaits voire les crimes, des hommes politiques, des chefs d’entreprises, des patrons de médias et autres hommes et femmes d’influence. Au fil des discours, défilent comme sur un powerpoint les photos de Vincent Bolloré, Nicolas Sarkozy, Gérald Darmanin, Eric Zemmour ou encore Stéphane Bern. Elles arrivent comme des vagues assommantes, qui mettent la rage, font osciller entre désir de révolte et résignation.
Entre ces chapitres qui dénoncent un à un les maux de la société, comme le pouvoir des banques, les abus des GAFAM, le contrôle des médias par quelques milliardaires… Un interprète vêtu façon théâtre de Nô Japonais, au masque de diable, défile sur le bord du plateau avec un couvre-chef différent à chaque fois (représentant une banque, les logos des GAFAM). Comme un oracle, il annonce la thématique suivante, sur les percussions assourdissantes scandées par les interprètes, accompagné de vidéos de planche à billet sur l’écran.
En prenant le parti pris d’une mise en scène minimalisme, en apparence sans recherche esthétique, on nous montre la réalité telle quelle, qui ne saurait être ornementée pour être dénoncée. Maguy Marin la livre comme ça, brut de décoffrage, dans un condensé presque indigeste. Alors que les interprètes ont réaménagé les blocs sur le plateau en un plateau plus ou moins praticable, sorte de reconstruction dans les décombres, l’un d’entre eux entame une chanson. Une note lénifiante en guise de conclusion. Le mouvement dansé a disparu de cette création, comme si, dans le contexte politique actuel, la danse n’avait plus lieu d’être.
Belinda Mathieu – www.sceneweb.fr
DEUX MILLE VINGT TROIS
Création 2023
Chorégraphie Maguy Marin | Interprétation Kostia Chaix, Kaïs Chouibi, Chandra Grangean, Lisa Martinez, Alaïs Marzouvanlian, Lise Messina, Rolando Rocha | Lumières Alexandre Béneteaud | Recherche documentaire et éléments de scénographie Paul Pedebidau | © Davide RagusaProduction Compagnie Maguy Marin. Coproduction Reggio Parma Festival ; Maison de la danse, Lyon – Pôle européen de création ; La Comédie de Saint Etienne CDN ; Théâtre de la Ville de Paris ; Gymnase de Roubaix ; Cndc Angers ; RAMDAM, UN CENTRE D’ART. La Compagnie Maguy Marin est soutenue par la Direction Régionale des Affaires Culturelles Auvergne-Rhône-Alpes. La Compagnie Maguy Marin est subventionnée par la Ville de Lyon, la Région Auvergne-Rhône-Alpes et reçoit l’aide de l’Institut français pour ses projets à l’étranger.
du 8 au 10 novembre 2023
Maison de la danse, Lyon16 janvier 2024
Le Quai Angers18 et 19 janvier 2024
L’onyx Saint-Herblaindu 5 au 9 mars 2024
Les Abesses – Théâtre de la Ville13 et 14 mars 2024
CDN Tours – L’olympiadu 19 au 21 mars 2024
La Comédie de Saint-Etienne9 avril 2024
Le Gymnase Roubaix
Avez-vous vu son spectacle avant d’écrire l’article ou fait ce qu’est censé dénoncer Maguy Marin, c’est à dire recopier ce qu’elle vous a fourni pour parler de son spectacle et qu’elle appelle pouvoir des médias au service des « puissants »? Je l’ai vu pour sa première et il est difficile de trouver un sens à son propos ou à sa mise en scène. Elle dénonce tout et son contraire, fait des raccourcis et manipule l’histoire et l’information (ce qu’elle dénonce). Il n’y pas de danse dans le spectacle, 2 pauvres petits morceaux de chants et une mise en scène conceptuelle mais répétitive. Difficile de trouver un sens ou un esthétisme à cette « œuvre ». Dommage. 1er et sûrement dernier spectacle que je verrai d’elle. Et si elle voulait être logique et en phase avec son propos, l’entrée devrait être gratuite pour tous. Navrant.
Ce soir, point de danse pour cette bien triste mise en scène de Magy Marin .qui prends en otage les spectateurs dans une vision bien étriquée et caricaturale du monde.
Qu’avez vous donc perdu, dans la programmation, le mot lié à la dénomination du lieu :’Maison de la danse’; sûrement
bref a éviter absolument
Programmé dans un festival de danse, grosse déception !
Maguy Marin prend en effet son public en otage avec un long exposé sur les puissants, illustré par d’un montage vidéo qui se veut, je crois, drôle ? Elle prêche des convertis…première fois de ma vie que je sors avant la fin…quel ennui !
Tout à fait d’accord avec les commentaires précédents c’est extrêmement pauvre dans le contenu, le côté répétitif est insupportable et puis finalement c’est sans doute une forme snob d’art dit engagé, une bonne vingtaine de personnes sont sorties et j’en aurais fait autant si j’avais été seul. C’est la première fois que je n’applaudis pas du tout à la fin d’un spectacle même mollement par politesse.