Yvonne est le corps étranger introduit de force à la Cour de Bourgogne par le Prince. Son intégration forcée se révèlera un échec. La situation d’Yvonne me touche intimement car elle me rappelle le goût amer de l’incompréhensionet de l’infantilisation vécueslors d’une longue période de travail au Japon. Je voulais comprendre mais je n’avais pas les clés. Je voulais respecter l’autre, mais je ne connaissais pas les codes, je voulais m’intégrer sans abandonner aucune partie de moi-même. J’ai offensé et blessé sans en avoir la moindre idée et je me suis sentie privée de toute liberté. Yvonne offense, choque, humilie inconsciemment en ne respectant pas les codes de la société de Bourgogne. Elle aurait dû s’incliner devant le Roi et la Reine, mais elle regarde les êtres tels qu’ils sont et non tels qu’ils croient être.
Dès lors que reste-il du pouvoir? Des habitudes de vie, des certitudes, des façons de penser et de se représenter le monde, de concevoir ce qui est vrai et ce qui est faux, de distinguer le Bien du Mal, ou le Beau du Laid…? Ainsi, Yvonne devient le cancer de la société. La force de son mutisme va ébranler le fondement de l’identité de chacun dans cette cour.
C’est déstabilisant quand plus rien ne nous structure et ne nous définit dans une société.
À quoi nous raccrocher? Qui sommes-nousréellement? Que reste-t-il sous notre carapace?
Allons-nous chercher ce qu’il y a de plus profond en nous, tout ce qui a été réprimé, refoulé par la société? Gombrowicz pousse la perte d’identité et la dislocation du groupe à l’extrême. Ces processus de bouleversement du groupe par un corps étranger m’intéressent et me questionnent: pouvons-nous faire table rase d’une société, de notre culture, de notre éducation,…? Cette pièce est une double tragédie: une tragédie pour Yvonne qui subit la violence des autres et une tragédie pour chaque protagoniste qui se retrouve face à lui-même avec ses propres failles, ses peurs, ses angoisses… Mettre en scène la question de la différence m’amène nécessairement à traiter les réactions face à cette différence: l’exclusion, l’assimilation, l’intégration forcée, la désintégration, l’élimination… avec le cortège qui l’accompagne: la perte de repères et la recherche de soi.
Tout nous conduit à poser la question de l’identité comme centrale.
Yvonne, Princesse de Bourgogne
Compagnie Narcisse
Texte Witold Gombrowicz
Mise en scène Anne Barbot
Collaboration artistique Alexandre DelawardeScénographie Charlotte Maurel
Masques Yngvild Aspeli
Musique Vincent Artaud
Lumières Fabrice Bihet
Chorégraphie Jean-Marc Hoolbecq
Costumes Bruno Marchini (Atelier de Costumes du StudioThéâtre d’Asnières)
Avec Cédric Colas, Aurélie Babled, Daniel Collados, Alexandre Delawarde, Audrey Lamarque, David Lejard-Ruffet , Fanny Santer, Benoît Seguin, Marie-Céline TuvacheProduction déléguée Théâtre Romain Rolland–Villejuif
Coproduction Cie Narcisse, ECAM-Le Kremlin-Bicêtre, La Grange Dîmière Théâtre de Fresnes
Coréalisation Théâtre 13 Soutiens DRAC Ile-de-France, Conseil Général du Val-de-Marne, Ville de Villejuif
Participation artistique Jeune Théâtre National
Durée (envisagée) 1h50
Avignon Off 2013
Théâtre des Luciolesdu 6 au 28 juillet à 19h15
Relâche le 18 juillet
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