C’est en 2004, lorsqu’elle reçoit le prix Renaudot à titre posthume, que j’entends parler pour la première fois d’Irène Némirovsky. J’apprends qu’elle était d’origine russe, mais écrivait en français (sa langue natale), qu’elle s’est installée à Paris dans les années 20, qu’elle a permis à la culture française de rayonner dans le monde entier, et que – pour autant – on ne lui a jamais permis d’en acquérir la nationalité. Irène Némirovsky achevait le deuxième tome de Suite française lorsqu’elle a été arrêtée le 13 juillet 1942, puis déportée à Auschwitz où elle a trouvé la mort le 17 août. Je suis saisie, bouleversée par le récit de ce destin. Je me précipite à la librairie, et en repart avec Le bal. C’est une telle découverte que je lis aussitôt l’intégralité de son œuvre ainsi que tout ce qui la concerne. Son regard est incisif, lucide, mais constamment empreint d’humanité. Sa langue est riche, inspirée. Son univers pourrait s’apparenter à celui de Tchekhov, l’un de ses auteurs de prédilection : ils ont tous deux l’élégance de parvenir à rire de la désespérance. Je suis dévorée par l’envie de monter « Le bal » au théâtre, et sollicite Laurent Grégoire, mon agent, pour qu’il appelle les éditeurs afin qu’ils prennent contact avec les ayants-droit d’Irène Némirovsky pour leur en demander l’autorisation. La famille répond aux éditeurs qu’ils peuvent reprendre contact avec Laurent pour qu’il revienne vers moi avec une réponse positive de leur part. Je suis extrêmement touchée de leur confiance. Je demande timidement s’il est possible de les rencontrer pour leur soumettre directement mon travail. Nouvelle réponse positive. Je me rends, le cœur battant, au rendez-vous que me fixe Denise Epstein, la fille aînée de l’auteure, rue des Saints Pères. J’ai le sentiment que cette rencontre va compter parmi les plus belles de ma vie. Et en effet…. Je vois venir à moi une frêle jeune fille de 82 ans, qui m’accueille avec une chaleur sans pareille. Après quelques minutes de lecture, elle m’interrompt pour me signifier son accord, puis m’invite à poursuivre. C’est le début d’une longue collaboration. Je prends l’habitude de soumettre à son approbation tous les éléments concernant le montage de la pièce. Sa disponibilité est extraordinaire et son retour précieux. L’émotion avec laquelle nous avons joué le soir où Denise Epstein est venue voir la pièce, entourée de sa famille, n’est pas descriptible. Cette représentation compte parmi les plus émouvantes de ma vie. Denise s’est éteinte quelques semaines plus tard. Je ne crois pas m’être encore tout à fait remise de l’amitié qu’elle me portait. Pour mon plus grand bonheur, les liens d’affection qui nous unissaient perdurent aujourd’hui avec ses enfants.
Nous décidons, mon ami auteur Stéphane Laporte et moi, d’adapter « Suite française » au théâtre. Nous en parlons à Laurent Grégoire qui, avec le même enthousiasme, élabore ce projet avec nous. Nous sollicitons Francis Nani, le directeur du Palais Royal. Avec une énergie sans pareille, il rend les choses possibles. Je prends contact, sans les avoir jamais rencontrés, avec Alexandre Piot, Florian Blache et Sylvia Depeyrot. Ils m’assurent de leur intérêt avec une gentillesse remarquable. La famille Némirovsky suit pas à pas l’élaboration du projet, nous facilitant toutes les démarches concernant le texte. Je reprends l’habitude de les informer de tous mes choix auxquels, patiemment, ils se montrent très attentifs. Lorsque nos avis divergent, ce qui arrive rarement, c’est toujours l’occasion d’un débat chaleureux et constructif. L’attention avec laquelle ils m’accompagnent depuis déjà quelques années m’est infiniment précieuse.
Je les remercie très chaleureusement pour le soin qu’ils apportent à ce nouveau projet, et tout particulièrement Nicolas Dauplé, et Olivier Philipponnat, respectivement petit-fils et biographe de l’auteure.
Virginie Lemoine
SUITE FRANÇAISE
d’après le roman d’IRÈNE NÉMIROVSKY Prix Renaudot – Editions Denoël
Adaptation théâtrale de
VIRGINIE LEMOINE & STÉPHANE LAPORTE
MISE EN SCENE VIRGINIE LEMOINE
Assistée de Laury André
avec Florence Pernel, Béatrice Agenin, Christiane Millet, Samuel Glaumé, Emmanuelle Bougerol, Cédric Revollon
Lumières Denis Koransky Décor Grégoire Lemoine Son Sébastien Angel Musique Stéphane Corbin Costumes Christine Chauvey Coiffures Christophe Nicolas-Biot Photo et création de l’affiche Sébastien AngelProduction
ASK US, THEATRE DU PALAIS ROYAL, UPL LIVE ET LAURENT GREGOIRELa Bruyère
A partir du 10 septembre 2019
Du mardi au samedi à 21h00 et matinée le samedi à 16h45
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