Écrite spécialement pour Véro Dahuron et Guy Delamotte, « Reconstitution » tente de reconquérir les émois perdus de la première rencontre. Se réconcilier pour mieux se dire adieu, tel est le credo bouleversant de la nouvelle pièce délicate et poétique de Pascal Rambert.
Il y a dans la « Reconstitution » de Pascal Rambert des signes qui ne trompent pas et font inévitablement penser à son « Clôture de l’amour ». Tout se passe comme si le dramaturge et metteur en scène avait simplement laisser un laps de quelques années s’écouler, avant de reprendre là où il s’était arrêté. Comme il l’avait fait pour Audrey Bonnet et Stanislas Nordey, Pascal Rambert a spécialement écrit cette pièce pour Véro Dahuron et Guy Delamotte, les deux animateurs du Panta-Théâtre de Caen. Cette fois, il n’est pas question de rupture, ni de magistrale déchirure, mais plutôt d’une tentative d’apaisement, de réconciliation, par le truchement de l’illusion théâtrale.
Trente ans après leur séparation, Véronique et Guy sont à nouveau face-à-face. Dans un lointain passé, ces deux-là se sont aimés. Avant que Guy ne plante un couteau dans le cœur de Véronique en la quittant brutalement, ils ont même eu une fille qu’aujourd’hui ils ne voient presque plus. Dans un grand hangar loué pour l’occasion, les deux anciens amants veulent rejouer leur première rencontre et retrouver la sensation des émois perdus, reconstituer pour panser les blessures, se réconcilier avant que la mort n’emporte Véronique, victime d’un cancer du sein. Loin d’ouvrir leur boîte de Pandore intime, de procéder à un règlement de comptes aux conséquences potentiellement dévastatrices, leur projet exhume autant qu’il apaise les maux anciens. Pour eux, ces retrouvailles savamment préparées sont aussi l’occasion de jauger les effets du temps, d’observer les transformations de leurs vies et de leurs corps, de confronter leurs souvenirs dissonants, d’évaluer ce qu’ils ont encore, ou non, en commun.
Dans une langue plus douce, plus simple, et une forme plus dialoguée qu’à l’accoutumée, le texte de Pascal Rambert puise sa force dans son pouvoir hautement réflexif. Du commun, le dramaturge fait naître le poétique et déniche la beauté dans l’impossibilité d’une telle quête. Au milieu des silences lourds de sens et des fulgurances textuelles dont il a le secret, la folle espérance de la régénération des sentiments le dispute à la valse-hésitation qui se dessine au gré des pas de côté exécutés par ces danseurs de l’amour dissous. Pour Rambert, « Reconstitution » est aussi l’occasion de toucher du doigt les limites du théâtre, de cette illusion qui pourrait être thaumaturge, mais ne parvient pas à guérir ceux qu’elle touche. « Tout cela est ridicule, tout est faux, tout est faux », assénera Véronique, telle une sentence irrévocable, au terme de ce vain rituel qui les oblige à trouver un remède plus simple, et encore plus beau.
Éclairés par une lumière crue, habillés selon des codes vestimentaires chers à Rambert, Véro Dahuron et Guy Delamotte jouent avec une implication retenue, et une pointe de fierté non dissimulée. Peut-être leur jeu manque-t-il d’une dose d’intensité supplémentaire pour décocher avec toute la force requise les flèches littéraires qui leur sont fournies. Qu’importe, le texte et la mise en scène sont suffisamment puissants pour que le spectacle demeure à chaque instant bouleversant. En acceptant d’écrire pour eux, Rambert leur a résolument offert un sacré cadeau.
Vincent BOUQUET – www.sceneweb.fr
Reconstitution
Texte, mise en scène, scénographie & lumière Pascal Rambert
Régie lumière Fabrice Fontal, régie Valentin Pasquet
avec Véro Dahuron et Guy Delamotte (PANTA THÉÂTRE)
Durée 1 h 20Off 2019
Manufacture Patinoire
Durée 1h50 (trajet navette inclus)
à 11h40 du 5 au 14 juillet, relâche le 11 juillet
Les éternelles mêmes critiques complaisantes vis à vis de Rambert tâcheron de l’écriture qui pense avoir réussi un coup de maître une fois et qui tente de le ré édditer. Sauf que là à la Cartoucherie les acteurs ne sont vraiment pas bons et que c’est laborieux et d’un ennui à vous donner envie de fuir. quelle débacle pas seulement pour le couple mais pour le public.Et nous étions plutôt nombreux à la sortie à penser cela.