La chorégraphe Sarah Baltzinger déploie son écriture singulière dans Vénus anatomique, un quintet qui montre la brutalité de l’exposition des corps féminin, où l’on se perd parfois.
Chorégraphe émergente de la scène luxembourgeoise, Sarah Baltzinger est encore peu connue en France. Formée à Metz et en Espagne, elle commence sa carrière en Europe dans les années 2010, comme interprète, puis chorégraphe. Vénus anatomique est sa neuvième pièce, où elle convoque cinq danseuses dans une lumière blanche crue, qui fait jaillir la brutalité de la surexposition des corps féminins.
Modèles aux corps exposés dans la peinture, dévoilés dans les ballets romantiques, décortiqués au cinéma, devenus produits de consommation dans la publicité, chair prête à consommer dans la pornographie… Les corps féminins ont à travers l’Histoire occidentale été montrés sous toutes les coutures, réduits en objet, sublimés, malmenés. Les cinq interprètes de Vénus anatomique sont chargées de cette histoire.
Évitant des grands pans de cheveux blonds emmêlés qui pendent du plafond, elles esquissent des danses de pantins mécaniques, saccadées. Les gestes sont brusques, ils semblent vouloir faire exploser les corps statiques. Sortes de machines recouvertes de chair, elles arborent des plastrons réalistes de poitrines, plus ou moins couvrantes qu’elles se plaisent par moments à malaxer, à maltraiter, entre rudesse et érotisme. Une tentative de s’arracher à ce corps limité et limitant ?
Elles ont parfois la bouche grande ouverte. Comme si elles criaient d’horreur. Elles se cachent dans les recoins du décor pour laisser à l’une d’entre elles le devant de la scène. Celle-ci se livre à une danse folle, désarticulée, qui envoûte la salle, comme une héritière des sorcières du film Suspiria. Elles font des rondes. Elles proposent en paroles saccadées “un ptit café ou un thé ». En alternance avec ces danses étranges, elles esquissent des grands jetés nets. Un saut libérateur ? Vénus anatomique propose-t-il aux corps empêchés une perspective d’émancipation à travers la danse ? Ou montre-t-il seulement ces corps encore et encore jusqu’à leur épuisement ? Les tableaux qui s’étirent, nous perdent parfois au passage. La dramaturgie est flottante, malgré la singularité de l’écriture de Baltzinger et son ambiguité qui intrigue.
Belinda Mathieu – www.sceneweb.fr
Vénus anatomique
Sarah Baltzinger concept et direction
Guillaume Jullien musique
Amandine Truffy, Alexandra Joly dramaturgie
Isaiah Wilson regard extérieur
Marion Terranova scénographiedanse Chiara Corbetta, Océane Robin, Marie Levenez, Clara Lou Munié, Shynna Kalis
Une co-production Cité musicale-Metz
Création
5 et 6 décembre 2023
Grand Théâtre du Luxembourg,
Les Théâtres de la Ville de LuxembourgPremière française
18 janvier 2024
L’Arsenal, Cité Musicale à Metz9 février 2024
Festival Faits d’hiver à micadanses, Paris25 mars 2024
Festival We love girls au Centre culturel Opderschmelz à Dudelange, Luxembourg
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